Après une hospitalisation prolongée en France et des rumeurs de tous genres sur son état de santé, le Premier ministre ivoirien et candidat du Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) pour la présidentielle d’octobre prochain, Amadou Gon Coulibaly, est de retour en Côte d’Ivoire, depuis le 2 juillet 2020. Si ce retour au bercail semble avoir ramené une certaine sérénité dans le camp présidentiel, au sein duquel cette longue absence avait fait naître progressivement des doutes, des inquiétudes demeurent tout de même chez bon nombre d’Ivoiriens. Ces derniers s’interrogent sur la capacité réelle de l’homme à endosser les charges de dauphin qui lui ont été confiées par le président sortant, Alassane Ouattara, dont le deuxième mandat arrive à terme. Candidat du RHDP, Gon Coulibaly devra défendre les couleurs de la coalition face à l’opposition ivoirienne qui n’exclut pas de faire bloc derrière une candidature unique. Ce scenario « Tous contre le camp Ouattara », à y penser, donne déjà des migraines au pouvoir en place, tant il est très redoutable dans le contexte politique actuel de la Côte d’Ivoire. En effet, le mandat d’arrêt international contre l’ancien président de l’Assemblée nationale ivoirienne, Guillaume Kigbafori Soro, aujourd’hui en exil à Paris, le maintien de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé à l’étranger malgré leur acquittement par la Cour pénale internationale (CPI), ajoutés à la rupture entre Bédié et le président Alassane Ouattara ont favorisé le rapprochement des leaders de l’opposition.
Avec à leur tête l’ex-président Henri Konan Bédié, dont l’investiture pour la future présidentielle par le Parti démocratique et de Côte d’Ivoire (PDCI) est attendu dans les semaines à venir au bord de la lagune Ebrié. Manifestement poussé à bout par le divorce, Bédié a décidé de repartir à la conquête du fauteuil présidentiel dont il a été éjecté en décembre 1999 par le général Robert Guéi à la suite d’un coup d’Etat sans bain de sang. Au regard de ce qui se profile à l’horizon, on peut dire que l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire sera une compétition très rude, dont il faut s’assurer de l’état de santé du cheval sur lequel l’on veut miser. Agé de 61 ans, Gon Coulibaly, qui a subi une transplantation du cœur en 2012, avait été évacué d’urgence à Paris le 2 mai dernier en pleine pandémie de COVID-19 à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, où il a été interné pendant deux mois. Les craintes des militants du RDHP sont justifiées dans la mesure où l’élection avance à grands pas, ce qui nécessite un lancement de la machine électorale.
Connaissant les énormes sacrifices à consentir et la débauche d’énergie que cela nécessite, Gon Coulibaly, qui n’a pas encore terminé sa convalescence, doit être dans l’embarras. Faut-il céder à la pression des caciques du RHDP face à la fièvre électorale qui monte sans cesse et engager des tournées dans les différentes régions du pays ou bien attendre de se refaire une santé ? Une chose est sûre, le Premier ministre qui est apparu quelque peu amaigri et aux pas lents, à son arrivée à Abidjan, comme l’ont relevé certains confrères, aura du mal à supporter l’endurance des tournées d’une précampagne. On se demande même si le candidat de la coalition au pouvoir n’a pas forcé son retour au bercail dans le but de mettre fin aux rumeurs et empêcher qu’un quelconque doute ne se fonde dans l’esprit des électeurs ivoiriens. Il devrait prendre toutes les précautions pour ne pas fragiliser davantage sa santé. Son ambition présidentielle ne doit pas prendre le dessus sur sa vie, car le pouvoir n’a de sens que pour les vivants. Mais d’ores et déjà, le secrétariat exécutif du RHDP, dirigé par Adama Bictogo, annonce un marathon de meetings dans les quatre coins du pays. Attendons donc de voir !
Beyon Romain NEBIE
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