Le péril guinéen

Le bras de fer entre manifestants et forces de l’ordre en Guinée se poursuit. La manifestation de l’opposition guinéenne du lundi dernier a encore dégénéré. Des échauffourées ont eu lieu dans plusieurs villes du pays où les populations sont sorties à l’appel du Front national de défense de la constitution (FNDC). Le bilan fait état de deux morts, dont un à Conakry et l’autre à Labé, une ville située à environ 400 km de la capitale guinéenne. A moins d’un mois des élections législatives, l’heure n’est pas au discours constructif mais à un durcissement de ton. Contre la volonté supposée du président Alpha Condé de doter son pays d’une nouvelle constitution, chose que désapprouve l’opposition, le torchon ne fait que brûler entre les deux parties.

Dans les faits, cette révision constitutionnelle est perçue comme une volonté du pouvoir en place de remettre le compteur à zéro, afin de permettre au président actuel de briguer un troisième mandat lors de la présidentielle d’octobre 2020. L’opposition se sent plus réconfortée dans sa position, au regard du silence « coupable » du président guinéen. D’où sa ferme détermination à maintenir la pression sur Alpha Condé jusqu’à la satisfaction de ses revendications. Mieux, le FNDC ne compte donc plus boycotter seulement, mais empêcher la tenue des prochaines élections. De grandes mobilisations devant des institutions de la République sont annoncées dans le pays. « S’ils mettent le pied sur l’accélérateur, ils comprendront que nous utiliserons les moyens légaux pour empêcher ce scrutin. Nous prendrons la rue. La manifestation dans ce pays est garantie par l’article 10 de la Constitution en vigueur », déclare Lansana Faya Millimono, président du Bloc libéral (BL) et membre du FNDC.

C’est donc dire qu’il risque encore de « pleuvoir sur Conakry ». Surtout que les responsables de ce front, promettent de ne plus informer les autorités du calendrier de leurs manifestations, tant que le président Condé n’annonce pas officiellement qu’il ne briguera pas un autre mandat. Cette position montre de façon implicite, que les opposants guinéens veulent explorer le scénario soudanais qui a abouti au départ de l’ancien président, Omar El-Béchir, le 11 avril 2019. Du côté du pouvoir, l’heure n’est pas au fléchissement. Malgré les victimes et dégâts à chaque manifestation, il n’y a pas des signes de décrispation qui pointent à l’horizon. Le pays de Sékou Touré se dirige inéluctablement vers la zone rouge de son histoire sociopolitique. Les Guinéens pourront-ils éviter le danger comme ce fut le cas en Mauritanie et au Congo RDC ou tomberont-ils dans le piège ? La réponse est entre leurs mains, parce qu’il leur appartient de faire un bon choix pour l’édification d’un état démocratique.

Abdoulaye BALBONE

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