Port du casque : réprimer ou pas ?

Et, on reparle de la sempiternelle question du port du casque au Burkina Faso. Ce sujet pour le moins sensible a été remis sur la table, le mardi 5 décembre 2023, à l’occasion d’une question orale avec débat adressée au ministre des Transports, de la Mobilité urbaine et de la Sécurité routière, Roland Somda. Appelé à réagir sur les mesures à prendre pour une application effective des décrets portant intégration du casque aux équipements d’accompagnement des véhicules motorisés à deux roues et son port obligatoire, ce membre de l’exécutif a dressé un tableau peu reluisant de la situation. Plus de 45 ans après l’adoption des textes sur le port obligatoire du casque, les lignes n’ont pas bougé, les Burkinabè n’étant pas manifestement disposés à respecter la mesure.

L’option de la sensibilisation retenue par le gouvernement pour amener les citoyens à adhérer au port du casque n’a pas porté ses fruits. Malgré les arguments déployés pour montrer que le casque peut limiter les dégâts en cas d’accident et sauver même des vies, la majorité des motocyclistes n’en ont cure. Il y a visiblement une résistance des citoyens à porter le casque. En 2006, le ministre de la Sécurité d’alors, Djibrill Bassolé, avait pu mesurer cet état de fait, quand il avait voulu relancer le port du casque, à la suite de la modification du décret y relatif, qui faisait désormais obligation aux vendeurs de l’intégrer dans les équipements des motos lors de la vente.

Cet officier supérieur de gendarmerie avait dû faire face à de violentes manifestations, qui avaient contraint le gouvernement à remiser son projet au placard. Hormis l’argument d’inconfort, notamment le sentiment d’étouffer dans le casque et la cherté supposée ou avérée de son coût mis en avant, la majorité des motocyclistes ont du mal à se servir du casque. Certains Burkinabè disposent de casques, mais n’en portent presque jamais. C’est à croire, que c’est un objet ornemental. L’heure est pourtant grave, comme l’attestent les statistiques des accidents de la circulation, fournies par la police et la gendarmerie. En 2022, 24 686 cas d’accidents ont été répertoriés, avec 1 150 tués et 15 384 blessés. En attendant un bilan exhaustif, on peut dire que la situation sur nos routes ne semble pas s’être améliorée, cette année. Dans le premier semestre de 2023, 11 717 accidents ont été dénombrés par les services compétents, avec et 471 vies fauchées et 7 335 blessés. Ces chiffres ont de quoi arracher le sourire et montrent à l’analyse, que la fréquence et la gravité des accidents de la circulation sont plus élevées chez les utilisateurs de cyclomoteurs, les vélomoteurs et les motocyclettes, comme l’a signifié le ministre Somda. Si, la mayonnaise de la sensibilisation ne prend pas, le gouvernement de Transition n’entend pas pour autant baisser les bras.

Le département en charge des transports va insister et persister. Il pourrait surtout être amené à utiliser la méthode forte pour amener les contrevenants à se conformer à la mesure de port obligatoire du casque, à en croire, le ministre Somda. Réprimer n’est pas la chose la plus souhaitée, mais, il faut admettre que les lois sont faites pour être respectées. Si, la mesure était prise en compte, on allait peut-être avoir moins de cadavres, du fait des accidents de la circulation, sur le macadam. Le Burkina étant un pays où, les deux roues pullulent comme des mouches, cette problématique n’est pas à prendre à la légère. S’il faut sévir pour préserver des vies, il faut le faire sans état d’âme. Le gouvernement, qui a sensibilisé sans succès les esprits à adopter le casque, durant toutes ces années, peut se réserver le droit de faire respecter de force son usage en circulation. Cette politique de répression pourrait s’accompagner de la sensibilisation des commerçants à vendre les motos avec les casques sous peine de subir la rigueur de la loi ou de subvention de l’acquisition du casque, dont le prix moyen tourne autour de 15 000 F CFA. En tous les cas, le port du casque revêt une importance capitale, qu’il faille sévir pour le faire respecter sous nos cieux, où la route tue régulièrement. Rien ne vaut une vie…

Kader Patrick KARANTAO

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