S’achemine-t-on vers un enlisement total dans la crise soudanaise qui met aux prises les forces armées nationales avec à leur tête le général Abdel Fattah al-Burhan aux Forces de soutien rapide (FSR), dirigées par un autre général, Mohammed Hamdan Daglo. Cette guerre, dite des généraux, qui déchire le Soudan depuis avril 2023, ne finit pas de surprendre par ses multiples rebondissements. En effet, en dépit des tentatives de médiations menées par différents acteurs, à l’initiative de la communauté internationale, la situation ne fait que prendre des tournures inquiétantes, préjudiciables à la paix. Alors que l’on redoutait une scission du pays, les FSR du général Daglo ont annoncé, samedi 26 juillet dernier, la nomination d’un Premier ministre avec la création d’un gouvernement parallèle dans les zones sous leur contrôle.
Cela n’a pas surpris les analystes et autres observateurs de la situation. Faut-il le rappeler, de nombreuses voix s’étaient déjà fait entendre contre les velléités sécessionnistes qui se laissaient transparaitre, ce d’autant plus qu’une telle initiative risquerait de compromettre, voire d’annihiler toute perspective de pacification. Selon ce qui se dit, Mohamed Hassan Al-Ta’ayshi, ex-membre du Conseil souverain de Transition, entre 2019 et 2021, a été désigné à la tête de ce gouvernement. Par ailleurs, un Conseil présidentiel de 15 membres, présidé par Daglo lui-même et installé à Nyala, capitale du Kordofan du Sud, a aussi été mis en place. Désormais, le pays est donc morcelé en deux.
L’armée conserve la main sur le Nord, l’Est et le Centre, y compris la capitale Khartoum et de leur côté, les FSR contrôlent la majeure partie du Darfour et certaines zones du Centre-Sud, où de violents affrontements ont récemment causé la mort de centaines de civils. Face à ce nouvel épisode de fragmentation et de « balkanisation » politique du pays, la question qui taraude l’esprit de plus d’un observateur est comment sortir de cet imbroglio politico-militaire meurtrier ? Avec cette donne politique, les médiateurs engagés dans ce conflit auront du pain sur la planche. Sauront-ils un jour, parvenir à unifier le pays et rapprocher les anciens alliés du coup d’Etat de 2021 ?
La question mérite d’être posée. Car, cette impasse nécessite plus que jamais, d’autres actions fortes de la communauté internationale dans le cadre d’une résolution définitive afin de mettre fin aux supplices du peuple soudanais. Et, il faut aller vite, vu que le conflit, en passe d’être une guerre sans issue, a déjà provoqué l’une des pires crises humanitaires avec à la clé de nombreux morts. Le hic, c’est que l’on ne sait pas, du moins pour l’instant, quelle appréciation de la situation fera cette communauté internationale qui semble à bout de souffle dans ses recherches de voies de pacification. Mais déjà, le ministère des Affaires étrangères du gouvernement de Khartoum, qualifiant le gouvernement des FSR de factice et de « tentative désespérée », a appelé l’Autorité intergouvernementale pour le développement en Afrique de l’Est (IGAD) et les acteurs internationaux à ne pas s’engager avec cette administration.Seulement, dans un contexte géopolitique marqué par des jeux d’intérêt, l’on se demande ce qu’il en sera réellement. Les jours suivants nous en diront plus. En attendant, le plus préoccupant pour les Soudanais, c’est que le crépitement des armes se taise à jamais dans leur pays qui garde indélébiles les séquelles et les souvenirs douloureux qu’il traine toujours.
Soumaïla BONKOUNGOU