Soudan : un pas vers la paix

Le gouvernement de transition soudanais a formalisé un accord de paix avec les cinq principaux groupes rebelles du pays, le lundi 31 août 2020, à Juba, la capitale du Soudan du Sud. Après une année d’âpres négociations entre les différents protagonistes, qui ont permis de remonter à des problèmes de fond qui existaient depuis 1956, date de l’indépendance du Soudan, les autorités transitionnelles viennent de faire un pas important en faveur du retour de la paix. Les huit protocoles, qui constituent l’ossature de l’accord de paix paraphé par le gouvernement et les rebelles, comprennent la sécurité, la propriété foncière, la justice transitionnelle, les réparations et compensations, le développement du secteur nomade et pastoral, le partage des richesses et du pouvoir et le retour des réfugiés et des déplacés. Un document à tout le moins exhaustif, qui recèle un certain nombre de préoccupations, pourrait permettre à ce pays de fermer la triste parenthèse sanglante qui dure plusieurs décennies. « Nous allons affronter quelques problèmes, lorsque nous allons commencer à procéder sur le terrain, mais nous et nos amis dans l’armée avons cette volonté politique pour que cela fonctionne », a laissé entendre le ministre de l’Information et de la Culture, Fayçal Mohamed Saleh, à l’issue de la signature de l’accord de paix. C’est dire, que la partie gouvernementale est consciente qu’il ne suffit pas d’apposer une signature en bas d’un document pour que s’opère par magie le processus de mise en œuvre de la paix. Plus qu’une signature, le gouvernement soudanais et le Front révolutionnaire soudanais (FRS), constitué de quatre mouvements de guérilla ayant combattu au Darfour (ouest) et dans les États du Kordofan-Sud et du Nil Bleu au sud, devront faire preuve d’une volonté manifeste pour que la feuille de route puisse se concrétiser. En paraphant l’accord de paix, les protagonistes ont suscité de l’espoir chez des millions de Soudanais qui ont plus que subi cette guerre fratricide. Ils devront maintenir allumée cette flamme de l’espoir en posant des actes qui traduisent leurs intentions profondes. En chassant du pouvoir l’ancien président Omar el-Béchir, le 11 avril 2019, le peuple soudanais a montré à la face du monde qu’il en avait marre d’un régime qui avait entrainé le pays dans un abîme de l’affliction et de la ruine. C’est au nom de la paix et de la démocratie, que des Soudanais ont accepté de sacrifier leurs vies en 2019 pour que tombe le régime répressif d’Omar el-Béchir. Les autorités transitionnelles ont promis de restaurer la démocratie au Soudan. Toute chose qui passe nécessairement par une volonté de faire taire les armes qui ont longtemps semé la désolation. C’est pourquoi, elles ne devraient pas lésiner sur les moyens pour que les fleurs de l’accord de paix conclu dans une ambiance festive à Juba portent la promesse des fruits. De leur côté, les rebelles du FRS doivent comprendre que toute guerre ne dure pas une éternité. Les pourparlers qui ont prévalu à la signature de l’accord ont permis d’examiner de fond en comble les malentendus qui alimentaient le conflit. Il est donc temps d’envisager un nouveau départ qui sera à la fois bénéfique et aux protagonistes et au peuple soudanais. Il y a longtemps que le Soudan, pays aux richesses insoupçonnées, a tristement occupé la Une de l’actualité. Cette lueur d’espoir suscité à Juba, ce 31 août, doit ouvrir sur une période de stabilité et de réconciliation dans ce pays. En s’attelant à la mise en œuvre effective de la feuille de route de l’accord de paix sur le terrain, les signataires finiront par convaincre les deux groupes rebelles, à savoir le Mouvement de libération du Soudan (MLS) d’Abdelwahid Nour et le Mouvement populaire de libération du Soudan-Nord (SPLA-N) d’Abdelaziz al-Hilu qui étaient absents à la cérémonie, à en faire autant. Espérons que tous travailleront à faire abstraction de la frontière entre les bonnes intentions et leurs réalisations.

Karim BADOLO

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