Lutte contre la défécation à l’air libre à Ouagadougou : des toilettes mobiles publiques en renfort

Trouver une toilette publique au centre-ville de Ouagadougou pour se soulager relève parfois d’un parcours du combattant. Faute d’infrastructures adaptées, les populations sont contraintes de se soulager en plein air. Ce qui pose des problèmes sanitaires et environnementaux. Pour pallier cette situation, la Direction du développement des infrastructures d’assainissement (DDIA) a construit, en 2024, cinq complexes de toilettes mobiles publiques dans la commune de Ouagadougou. Reportage.

Moussa Tamboura, la trentaine bien sonnée, est un conducteur de tricycle à la gare routière de Kongoussi, située au quartier Tampouy, dans l’arrondissement 3 de Ouagadougou, à proximité du monument « Plus jamais ça ». Depuis plus de 10 ans, il exerce ce métier. Avant de commencer sa journée de travail, il prend le soin de se soulager à domicile pour éviter d’avoir à chercher un endroit où faire ses besoins durant la journée, faute de toilettes publiques dans les environs.

Bloc de latrine mobile publique

« J’évite de boire trop d’eau pour ne pas avoir besoin d’uriner. Je loge à Kamboinsin et je ne peux pas faire des aller-retours pour me soulager, car cela me coûterait du temps, du carburant et des clients», explique-t-il. Comme lui, des milliers de riverains, voyageurs et commerçants doivent chaque jour improviser des solutions pour leurs besoins physiologiques. Depuis le 21 janvier 2025, cette préoccupation appartient au passé pour de nombreux habitants. En effet, un bloc de latrines mobiles publiques a été installé à côté du monument « Plus jamais ça ». La Direction du développement des infrastructures d’assainissement (DDIA) a également réalisé quatre autres complexes de toilettes mobiles publiques, situés au cimetière municipal de Gounghin, au cimetière municipal central, au Palais de la culture Jean Pierre Guingané, et à la mairie de l’arrondissement 3. «Maintenant, je viens ici me soulager et faire mes ablutions. Parfois, je prends une douche. Ouf, quel soulagement ! », se réjouit Moussa Tamboura, visiblement satisfait. Chaque bloc comprend une cabine de latrine avec un trou de défécation, un urinoir, un dispositif de lavage des mains (intérieur et extérieur) et une cabine de douche. Les infrastructures sont divisées en deux parties distinctes : une pour les femmes et l’autre pour les hommes. « Nous proposons des blocs de deux, trois, quatre ou cinq cabines. Le format à deux cabines est le plus fréquent », précise la directrice du développement des infrastructures d’assainissement, Zalissa Ouédraogo.

Une installation facile et adaptée aux besoins

La directrice du développement des infrastructures d’assainissement, Zalissa Ouédraogo, souhaite l’installation des latrines dans chaque station de la ville.

Selon elle, ces toilettes mobiles ont été choisies pour leur flexibilité. Elles peuvent être installées rapidement là où le besoin se fait sentir et déplacées en cas de nécessité. Bien que plus coûteuses (7 à 10 millions F CFA pour un bloc de deux cabines) que les toilettes classiques en parpaings (3 à 5 millions F CFA), elles constituent une solution efficace pour combler le déficit en infrastructures d’assainissement dans les grandes villes. Les toilettes mobiles sont construites à partir de conteneurs maritimes aménagés. Des fosses externes, constituées de fûts et de polytanks, qui recueillent les eaux usées et les excrétas. Le bloc est connecté à l’ONEA et la vidange des fosses se fait lorsque celles-ci sont pleines. « Contrairement aux latrines ordinaires en matériaux définitifs, qui doivent être démolies puis reconstruites, les toilettes mobiles peuvent être déplacées avec leur fosse (fûts et polytanks), laissant le site intact », explique Mme Ouédraogo. Une fois construites, les toilettes sont rétrocédées à la mairie, qui en assure la gestion.

De l’eau potable est disponible sur le site au profit des populations.

« Les gestionnaires sont recrutés par appel à candidature. Il s’agit généralement d’associations dont l’activité principale est la gestion des toilettes publiques », souligne la directrice. Azèta Sawadogo gère le bloc de latrines du monument « Plus jamais ça ». Sa journée de travail commence à 7h30 et se termine à 18h. « Chaque matin, je balaie les alentours et nettoie les toilettes. L’installation de ces latrines à proximité de la gare était indispensable. L’accès est payant. L’usager doit débourser la somme de 50 F CFA, que ce soit pour uriner, déféquer ou se doucher. Par jour, je peux encaisser entre 5 000 à 6 000 F CFA », explique-t-elle. Cependant, certains utilisateurs refusent de payer et continuent de se soulager dans la nature. « Certaines personnes souillent les toilettes et gaspillent l’eau du robinet. Il serait utile d’engager un vigile pour surveiller ces infrastructures », plaide la gestionnaire. Pour Mme Ouédraogo, le principal défi reste la disponibilité de l’espace. « Les plans d’urbanisation ne prévoient pas toujours d’espaces pour la construction de toilettes, surtout dans les zones à forte affluence. « Nous avons sollicité certaines communes pour identifier des sites, mais sans succès », regrette-t-elle. Nonobstant cela, elle invite les citoyens à adopter de meilleures habitudes d’hygiène et de civisme. « Chaque utilisateur doit respecter et entretenir les latrines comme il les a trouvées. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas », martèle-t-elle. C’est pourquoi, elle appelle à une responsabilisation collective pour préserver ces infrastructures.

Fleur BIRBA

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