Le temps joue contre le chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall. Après avoir récemment renoncé à un troisième mandat, il doit choisir un dauphin pour la présidentielle du 25 février 2024. Son parti, l’Alliance pour la république (APR), a absolument besoin d’un cadre digne de ce nom, pour défendre ses couleurs face à une opposition de plus en plus confiante.
C’est une grosse équation pour Macky Sall qui, jusque-là, garde le mystère sur ses préférences, alors que la bataille pour sa succession se mène dans son entourage. Plusieurs cadres de l’APR croient en leur étoile. Le silence du chef de l’Etat sénégalais aiguise les appétits et ravive les rivalités. Une réunion, tenue le 18 juillet dernier et censée montrer l’unité autour du futur choix de Macky Sall, a viré au pugilat.
Les partisans des deux présumés dauphins du président sénégalais, Amadou Ba, ex-Premier ministre et Abdoulaye Diouf Sarr, ancien maire de Yoff et plusieurs fois ministre, se sont battus. Les images de ce triste spectacle ont d’ailleurs fait le tour des réseaux sociaux, à la désolation des Sénégalais qui attendaient mieux. Certaines sources internes à l’APR rapportent, que Macky Sall devrait rendre sa décision publique, d’ici à fin juillet.
Plusieurs noms circulent déjà à Dakar, dont entre autres, ceux de ses deux héritiers putatifs et de certains anciens ministres, Abdoulaye Daouda Diallo et Aly Ngouille Ndiaye. Le président sénégalais dispose manifestement d’une liste de personnes à même de lui succéder. A lui d’opérer un bon choix, s’il veut préserver ses acquis et la cohésion au sein de l’APR.
On le sait, les deux poids du parti présidentiel, Amadou Ba et Abdoulaye Diouf Sarr, se regardent en chiens de faïence, tant leurs ambitions politiques sont fortes. Aux législatives de 2017, les deux hommes voulaient diriger la liste de la coalition présidentielle, Benno Book Yaakar, dans le département de Dakar. Macky Sall avait été obligé d’arbitrer en faveur d’Amadou Ba.
Cette dualité a ressurgi aux élections locales de janvier et aux législatives de juillet 2022. Le chef de l’Etat avait donné sa confiance à Abdoulaye Diouf Sarr pour les locales. Pour les législatives, il n’avait misé sur aucun des deux, préférant se tourner vers le socialiste Aliou Ndoye. L’unité n’est donc pas une évidence au sein de l’APR et Macky Sall devrait en tirer toutes les conséquences, pour ne pas faire un choix à problèmes.
Un double défi se pose au président sénégalais : choisir un bon cheval et lui donner les moyens de se faire élire pour préserver son héritage. Malgré la tempête que cela pourrait susciter dans son propre camp, le choix du dauphin du président sénégalais est une urgence. L’heureux élu devra disposer d’un temps relativement court pour se préparer, que son nom doit être incessamment connu.
Il devra surtout travailler à rassembler dans son camp pour faire face à l’opposition et espérer triompher dans les urnes. Ce qui n’est pas gagné d’avance. La réalité est que l’opposition monte en puissance au Sénégal, ces dernières années, comme les résultats des législatives de juillet 2022 l’ont prouvé.
Son chef de file, Ousmane Sonko, empêtré dans des affaires judiciaires, est plus que jamais populaire auprès de la jeunesse. Certains observateurs voient d’ailleurs en lui le futur président du Sénégal. Sonko a été investi candidat par sa famille politique. Il reste à savoir si sa candidature sera validée par le juge constitutionnel, son éligibilité étant menacée par les dossiers judiciaires.
Il est difficile d’imaginer une présidentielle sans Sonko, mais sait-on jamais. Peu importe la situation, le dauphin de Macky Sall n’aura pas la tâche facile dans la conquête des électeurs, tant sa gouvernance laisse à désirer.
Kader Patrick KARANTAO