Footballeur de haut niveau, il l’a été. Pur produit de l’EFO, il a fait les beaux jours de cette formation et des Etalons. Avec son franc parler et sa bonne connaissance du sport roi, il se prononce sur l’actualité brulante de l’heure : l’arrêt du championnat et le départ souhaité par des clubs du président de la Fédération burkinabè de football.

Quel commentaire fais-tu de la situation que vit le football burkinabè présentement ? Indescriptible ! Même si je savais qu’à un moment où un autre cette situation allait exploser. Gouverner c’est prévoir, mais comme nos dirigeants ont l’habitude de travailler dans l’urgence et de se foutre de la planification, ce qui se passe actuellement était un peu prévisible.

Penses-tu que la FBF devait reverser les 84 millions au Trésor public ?

J’ai surtout besoin de savoir pourquoi cet argent dédié à un but spécifique n’a pas été utilisé à cet effet. Seules les personnes qui ont posé cet acte peuvent l’expliquer. Le constat est là. Aujourd’hui, il y a une crise de confiance entre les clubs et la faîtière du football. Il y a les clubs qui estiment qu’ils ont été lésés, mettant le public sportif devant les faits. Toute cette pagaille est une mauvaise publicité pour notre pays.

L’attitude des clubs demandant la démission du président de la FBF est-elle la bonne ?

Une chose est de vouloir de la visibilité sur les 84 millions, une autre est de vouloir la démission du président de la FBF. Trop de conflits larvés, et cette demande cache bien la profondeur de la cassure entre les clubs et la structure dirigeante. Je ne sais pas si la démission du président est la panacée à tous les problèmes de notre football. Je sais juste qu’un mauvais arrangement vaut mieux qu’un bon procès.

La crise actuelle du football burkinabè ne va-t-elle pas, selon toi, jouer négativement sur les Etalons pour la CAN à venir ?

J’espère bien qu’il n’y aura pas une relation de cause à effet entre cette crise et la future prestation des Etalons. Même si la majeure partie de nos footballeurs évoluent à l’extérieur, c’est toujours préférable d’avoir une atmosphère apaisée autour d’une équipe nationale qui n’a pas besoin de cette crise actuelle. Notre pays a assez de défis actuellement que de continuer à se tirer dessus. Vivement que les différends puissent être mis à plat afin de permettre une réconciliation du monde du football burkinabè.

Que penses-tu de cette subvention allouée aux clubs par l’Etat ?

Cette subvention allait être une bonne chose, si derrière, cela permettait aux clubs d’en faire bon usage et surtout bien l’utiliser afin de créer de la richesse. Malheureusement, beaucoup de clubs sont en difficultés actuellement, car, ils sont toujours dans une gestion archaïque alors que le monde du football a évolué. Le modèle économique actuel exige une nouvelle approche dans le management du club. Les clubs ont besoin d’une nouvelle vision, une meilleure organisation, une parfaite auto-gestion. Les clubs sont comme une entreprise, et ils doivent être gérés comme telle, avec la même rigueur.

Cette subvention ne rend-t-elle pas paresseux les présidents de clubs ?

Un président de club qui n’attend que les subventions de l’état ne mérite pas son poste de président. Un président c’est un manager. C’est un visionnaire, c’est un meneur d’hommes. Si un président est à la tête d’un club, il est appelé à créer de la richesse. Il est appelé à avoir des stratégies commerciales et marketing pour générer des retombées pour son club. Si le club n’est pas organisé de sorte à impliquer toutes les parties prenantes, supporters et sympathisants, le club ne tiendra pas longtemps. La chute est programmée.

Avec cette subvention, ne penses-tu pas que n’importe qui peut être président d’un club si l’on sait que beaucoup ne se décarcassent pas pour chercher d’autres ressources ailleurs pour leur club, se contentant seulement de la manne venant de l’Etat?

Absolument ! J’ai donné un peu un aperçu sur les prérogatives d’un président : vision, planification, action. Il doit avoir l’étoffe et aussi l’envergure. Quand on est président, on n’a pas besoin d’être baby-sitter.

Que pense–tu des dirigeants actuels de nos clubs si l’on sait qu’à votre temps, il y avait des managers dégourdis et pleins de bonne volonté pour leur club comme les Georges Marshall, feu Noufou Ouédraogo et j’en passe.

C’est une autre époque (ndlr : année 90), c’était une autre gestion. C’était un peu le mécénat. Le club pouvait s’adosser sur une seule personne. Les personnes que vous avez citées sont des exemples de charisme et de leadership. L’argent n’était pas leur seul moyen de persuasion. Ils connaissaient très bien le football. Ils puaient le football. Mais, c’était avant. Le dirigeant actuel doit développer plus de compétences. C’est un chef d’entreprise avec des qualités managériales, des aptitudes en communication, de solides connaissances en stratégies. Je voulais, avec votre permission, demander aux uns et aux autres de jouer balle à terre. Nous avons besoin de nous entendre, de nous réconcilier, d’avancer main dans la main. Il y a trop d’amertume, trop d’animosité, trop d’aigreur, trop de rancœur. C’est un combat usant. Nous devons tous travailler pour l’intérêt supérieur de notre football. Le football doit rassembler, pas diviser.

Interview réalisée par Yves OUEDRAOGO

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