«Tuez Sankara et mille autres Sankara naîtront ». Au plus fort des contradictions qui traversaient le Conseil national de la révolution (CNR) à la fin de l’année 86 et qui conduiront au dénouement tragique du 15 octobre 1987, le leader de la Révolution d’août, le capitaine Noël Isidore Sankara prononçait cette phrase prémonitoire. Mais, il était loin de se douter que sa « prophétie » se réaliserait un peu partout en Afrique, quatre décennies plus tard (4 août 1984 – 4 août 2024). Affirmer, en effet, que nous vivons le temps des révolutions sur le continent serait comme enfoncer une porte ouverte, au vu de la pléthore de régimes progressistes et souverainistes qui marquent leur volonté de rompre avec l’ordre ancien. Un ordre qui a exacerbé les crises sociales et politiques, et réuni, dans le même temps, les conditions subjectives des ruptures actuelles, étant entendu que partout où il y a oppression, il y a résistance et lutte.
Cette maxime, le peuple voltaïque puis burkinabè en a fait sienne à l’orée des indépendances, puis tout au long de son histoire sociopolitique. Un peuple qui a connu un soulèvement populaire, à peine six ans après son accession à la souveraineté internationale et qui a permis d’organiser des élections « véritablement démocratiques » sous un régime militaire en 1978. S’en est suivie cette « éruption volcanique » sous le vocable d’Insurrection populaire en 2014.
Nourri à la sève de Daniel Ouezzin Coulibaly dit le lion du RDA, aguerri par les « injonctions » de Nazi Boni et les sentences du professeur Joseph Ki-Zerbo, sans oublier la verve journalistique de Norbert Zongo, le peuple burkinabè a encore su assumer son destin au lendemain du tournant historique d’octobre 2022 avec l’avènement du capitaine Ibrahim Traoré au pouvoir pour « rectifier » la trajectoire du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR). Héritiers de cette tradition de lutte et de fierté, lui et ses compagnons ont annoncé les couleurs dès leur prise de pouvoir en optant de mettre fin à la « férule humiliante et à la rapacité » de l’impérialisme.
Un combat titanesque et une lutte pleine d’embûches. Les enjeux sont si colossaux pour les Burkinabè qu’on peut dire qu’il s’agit véritablement d’une lutte de survie. C’est en cela qu’il faut comprendre la sortie récente d’un haut-gradé occidental affirmant la main sur le cœur que son pays reviendra en Afrique fusse par la force. Voilà qui confirme une autre prophétie de Thomas Sankara qui disait que l’impérialisme est un mauvais élève qui n’a jamais appris les leçons de son échec.
Il importe donc que le vaillant peuple burkinabè se mette au diapason de cette disposition d’esprit en acceptant les sacrifices qui en découlent, mais surtout en restant soudés derrière leur leader, dans la quête de la souveraineté et de l’intégration véritables.
Boubakar SY