Adjima Thiombiano, président de l’université Thomas-Sankara : “ Nous allons travailler sur l’éveil des consciences”

La cérémonie d’inauguration et de baptême de l’Université Thomas-Sankara (UTS) aura lieu, ce jeudi 15 octobre 2020. Pour mieux, comprendre les raisons de la mutation de l’Université Ouaga 2 en UTS, son président Adjima Thiombiano, nous donne des éclairages, dans cet entretien.

Sidwaya (S) : L’université Ouaga 2 devient université Thomas-Sankara. Qu’est-ce qui justifie ce changement de nom ?

Adjima Thiombiano (A.T.) : Thomas Sankara est celui qui est reconnu sur le plan national comme le héros d’une époque, dont les idéaux et les valeurs défendus par l’homme ont traversé le temps. Lorsqu’on regarde les valeurs qu’il a défendues, c’est quelqu’un qui s’est résolument engagé dans le développement de son pays à travers certains repères. Il y a d’abord, la question de l’intégrité de l’homme qui est une valeur très importante connue par tout le monde. Il y a aussi, le sacrifice qui a été promu pendant cette période et son engagement dans l’éveil des consciences et surtout des masses populaires. Il a également mis un accent particulier sur la formation et l’éducation. Parce que dans ces slogans, on parlait de génie créateur. Ces génies, je crois qu’on ne peut les fabriquer majoritairement dans les universités. C’était également un homme qui avait un regard sur la qualité de l’environnement à travers la lutte contre la désertification. Tellement de valeurs incarnaient l’homme et nous estimons que ce sont ces dernières qui ont amené le gouvernement à vouloir transcender cela sur la jeunesse d’aujourd’hui. Et l’un des créneaux possibles pour que cette jeunesse puisse retrouver ses repères, c’est véritablement les universités. C’est la chance pour notre université, qui a été choisie pour incarner ces valeurs et les traduire en réalité sur le terrain.

S : L’université Thomas-Sankara est considérée comme une université futuriste. Quelle est la différence avec les autres universités ?

A. T. : C’est une université futuriste pour plusieurs raisons. La première raison, c’est l’une des rares universités à avoir un domaine aussi futuriste. Lorsqu’on prend la superficie, nous avons globalement 1890 hectares. Cet espace dispose d’un plan d’aménagement global. C’est-à-dire que toutes les infrastructures qui viendraient à être mises en place dans cette université, sont déjà géo-référencées. La seconde chose, c’est une université qui se reconnaît dans les idéaux de Thomas Sankara. Par exemple, dans cette université, nous prenons beaucoup en compte les questions de l’intégrité, de rigueur, du sacrifice et de la transparence. En plus de tout cela, je pense qu’en termes d’offre de formation, l’UTS est l’une des universités qui présente une diversité de formation où les produits qui en sortent sont véritablement de qualité. Si vous prenez un peu l’architecture socioéconomique du pays, il y a rare de secteurs porteurs où vous ne trouverez pas des produits de l’UTS. Cette université se veut futuriste parce qu’au-delà des idéaux, dans lesquels se reconnaissent cette université, nous voulons mettre un accent particulier sur trois dimensions. La première dimension est celle sociale pour que ce soit une université socialement intégrée. La deuxième dimension est le savoir d’où jailliront les connaissances qui pourront tirer cette société vers son développement harmonieux. La troisième, c’est l’environnement. Nous voulons que ce campus soit un éco-campus où, on pourra mettre en pratique les comportements éco-citoyens.

S : Votre université rejoint son nouveau site en cette rentrée universitaire. Cela a été maintes fois reporté ? Qu’est-ce qui sera fait réellement ?

A. T. : Je pense qu’on parlera plutôt de ce qui est déjà fait. Sur ce plan, des choses ont été faites dans plusieurs domaines. Le premier domaine, ce sont les infrastructures sur le plan pédagogique. Nous avons globalement un amphithéâtre jumelé de 3 300 places, deux pavillons de 2 500 places chacun, des salles de cours, des bâtiments pédagogiques. Le tout cumulé, nous avons environ 13 000 places assises pour les cours. En plus de cela, nous avons près de 140 bureaux pour le personnel. Indépendamment de tout cela, au niveau social, nous avons également deux grandes cités d’une capacité de 2000 lits, deux grands restaurants de 700 places chacun et un centre médical moderne. Aujourd’hui, tout le site est alimenté en eau et en électricité.

S : A ce jour, l’UTS est-elle prête à accueillir les étudiants, les enseignants et l’administration cette année académique ?

A.T. : Aujourd’hui, je peux dire que le minimum est réuni. C’est même plus que le minimum. Déjà, l’administration est sur place depuis pratiquement une semaine. Nous attendons impatiemment nos étudiants dans les semaines à venir. C’est pour vous dire, que la rentrée 2020-2021 se fera sur ce site.

S : Toutes les promotions sont concernées pour le déménagement sur ce site ?

A. T. : Non. Ce que nous avons prévu, c’est un déménagement graduel des étudiants. Ce qui est prévu cette année, ce sont surtout les nouveaux bacheliers de l’année 2020 qui seront emmenés sur le site. Naturellement, vous comprendrez que c’est en même temps un décrochage avec les cohortes qui sont déjà à Ouagadougou. Il est prévu que les nouveaux bacheliers arrivent sur le site, mais que les anciennes cohortes, c’est-à-dire les anciennes promotions restent à Ouagadougou et puissent poursuivre leur parcours. Ce qui va nous amener naturellement à dispenser des cours quelquefois en double.

S : On dit de vous souvent, que vous êtes une grande université. Qu’est-ce qui caractérise cela ? Parlez-nous de vos offres de formations.

A. T. : Nous avons une diversité d’offres de formation. Pour le niveau licence, nous avons 25 filières. Au niveau master, nous avons une trentaine de filières et au niveau du doctorat, nous avons cinq filières. Cela fait globalement 60 filières de formation. Mais, en termes de perspective dans ce domaine, nous nous apprêtons à lancer les opportunités de mise en place d’une école de hautes études commerciales et d’échanges internationaux. Nous envisageons également, la création d’un institut universitaire des métiers. Enfin, une autre école de production forestière et agricole.

S : Quels sont alors les défis à relever pour votre université ?

A. T. : Les principaux défis, c’est de pouvoir véritablement mériter d’abord ce nom que le gouvernement nous a donné. C’est-à-dire travailler sur l’éveil des consciences, sur la transformation des mentalités, résolument engager tout le monde vers les idéaux de Thomas Sankara. C’est l’un des grands défis. Le second défi, c’est également de trouver les moyens de traduire en pratique les ambitions que nous avons de cette université. Parce qu’au-delà des infrastructures que nous venons de citer, nous voulons faire de cette université, une ville universitaire dans laquelle, on pourra trouver toutes les commodités. Nous voulons faire de cette université, le deuxième Dubaï. Au niveau des aspects socioculturels, nous voulons bâtir des infrastructures socio-sportives qui puissent accueillir des compétitions sur le plan international. A côté de cela, nous voulons bâtir des infrastructures hôtelières. Nous comptons bâtir sur ce site l’un des plus grands hôtels de la sous-région. Mais pas 5 étoiles, mais le minimum, c’est 7 étoiles. Ce n’est pas un vain mot. C’est possible. Je pense qu’il faut y croire. Cela aussi, c’était l’une des caractéristiques de Thomas Sankara. Il faut avoir des rêves fous. Mais, il faut développer toutes les initiatives pour les rendre pratiques. Nous voulons aussi construire un centre commercial où, on va trouver des supermarchés, des pharmacies, des banques, des assurances, des boulangeries… C’est de faire en sorte qu’on ait une sorte de vie possible dans l’enceinte du campus. Mais surtout le changement de mentalité de tous ceux qui sont dans l’enceinte du campus.

S : Vous avez des perspectives à l’égard de ce temple du savoir ?

A. T. : Sur le plan académique, ce sont les filières que nous allons ouvrir bientôt. Mais à termes, ce que nous souhaitons vraiment que cette université soit véritablement un centre de renaissance des forces vives de la nation. Cela veut dire que cette université soit effectivement le point de départ d’une prise de conscience généralisée de la société, mais à travers la jeunesse. Et je pense que c’est encore possible. Nous avons ce rêve qu’à travers la mission de l’UTS, on pourra impacter positivement la qualité des services publics qu’on constate aujourd’hui.

Mamourou BENAO
(Collaborateur)

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