Côte d’Ivoire : Le déclin du PDCI-RDA ?

L’ancien Président de la Côte d’Ivoire, Henri Konan Bédié s’est éteint le 1er août dernier. La nouvelle s’est répandue comme une trainée de poudre sur les réseaux sociaux dans la soirée du mardi. Pris par un malaise depuis son fief de Daoukro au centre du pays, le leader du Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) avait été héliporté en urgence dans une polyclinique à Abidjan où il a rendu l’âme quelques heures plus tard.

Ainsi, celui qui a marqué la scène politique ivoirienne plus d’un demi-siècle tire sa révérence à 89 ans laissant sa famille politique orpheline. Né le 5 mai 1934, l’homme a connu une ascension politique rapide. Le « Sphinx de Daoukro», s’est engagé en politique dans les années 1960, auprès du père de l’indépendance, Félix Houphouët-Boigny au sein du parti unique à l’époque, le PDCI-RDA. Fils d’un planteur de cacao, il va succéder à son mentor en 1993 à la suite de son décès.

Il présidera à la destinée de son pays jusqu’en 1999, date à laquelle il sera renversé par un coup d’État par l’armée, une première du genre au bord de la lagune Ebrié. Durant son temps de gloire, M. Konan va promouvoir un nouveau concept « l’ivoirité », une notion d’identité nationale et d’économie nationale dans un pays. Cette politique sera vivement contestée par ses deux principaux adversaires, l’actuel Président Alassane Ouattara et l’ex-président Laurent Gbagbo.

Après la perte du pouvoir, le politicien de carrière tente sans succès de reconquérir le fauteuil présidentiel en 2000, 2010 et 2020. A la dernière élection, il arrive en troisième position avec un taux de 1,7% de voix. Malgré ce score squelettique, la « bête » politique ne désarme pas et n’excluait pas de se présenter à la prochaine élection présidentielle de 2025. Mais, la mort en a décidé autrement.

La question qui taraude désormais les esprits des militants de son parti est certainement le devenir du PDCI-RDA après le départ inattendu de leur guide ? M. Konan préparait les élections municipales et régionales du 2 septembre prochain, le congrès de sa formation politique, en octobre, deux évènements décisifs pour l’avenir du PDCI, à l’orée de la présidentielle de 2025. Sa disparition n’augure guère de lendemains meilleurs au sein de la famille politique.

En effet, en 2021, l’on a assisté à des tensions inédites entre le secrétaire exécutif du PDCI-RDA, Maurice Kakou Guikahué et le président du groupe parlementaire du parti, Simon Doho. Ce linge sale qui devait être lavé en famille a fini par être étalé sur la place publique, avec des commentaires acerbes sur les réseaux sociaux et attaques par médias interposés. Face à la menace de l’unité de la formation, Henri Konan Bédié s’est vu obligé de jouer au sapeur-pompier.

Le conflit générationnel en latence risque de refaire surface car d’un côté, il y a les fidèles du maitre. M. Konan soutenait que « au PDCI, l’âge unit l’expérience et aussi la compétence est un atout ». Cette doctrine n’était pas acceptée par une bonne partie des militants notamment la jeune génération qui bouscule pour se faire une place au soleil. A cela s’ajoute le jeu trouble des autres partis pour attirer dans leurs rangs les compétences du PDCI-RDA.

Ce fut le cas de Bertin Kouadio Konan qui avait quitté le navire PDCI-RDA pour se rapprocher du pouvoir actuel. Aussi, au regard de la faune politique ivoirienne avec la présence des deux mastodontes, il n’est pas exclu qu’en l’absence du patriarche, des militants du PDCI-RDA n’emboitent le pas de KKB pour se retrouver sous les manteaux de Alassane Ouattara et de Laurent Gbagho. Dans de telles conditions, autant dire que le départ du patriarche risque de rimer avec le déclin de son parti.

Abdoulaye BALBONE

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