Dénouement de l’affaire « Charbon fin »: le REN-LAC affirme sa déception

Le SG du REN-LAC, Sagado Nacanabo (milieu) : « C’était bien l’occasion de sonner le glas de l’impunité et de faire comprendre que le Burkina mérite respect ».

Le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) a, au cours d’une conférence de presse, le jeudi 1er février 2024, à Ouagadougou, dit être déçu du dénouement de l’affaire « Charbon fin » qui a opposé principalement, la société Iamgold Essakane à l’Etat burkinabè.

L’affaire « Charbon fin », malgré l’extinction de l’action publique pour cause de transaction entre la société Iamgold Essakane et l’Etat burkinabè, continue de faire des remous au sein de la société civile burkinabè. En effet, la décision du Tribunal de ce que Essakane doit neuf milliards FCFA à l’Etat burkinabè, en plus de la restitution des 30 conteneurs de charbon fin, des deux cargaisons de « corps solides » et des objets saisis, n’est pas du goût du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC).

Le jeudi 1er février 2024, à Ouagadougou, lors d’une conférence de presse, le Secrétaire général (SG) du REN-LAC, Sagado Nacanabo, a dit « clairement » être déçu du dénouement de l’affaire « Charbon fin ». « C’est donc avec une grande déception que le REN-LAC a accueilli la décision du gouvernement de conclure un accord transactionnel avec Iamgold Essakane et les autres personnes poursuivies, abandonnant ainsi la recherche de la lumière sur cette sombre affaire », a-t-il déclaré.

Selon Sagado Nacanabo, ce procès était une « occasion en or » pour mettre à nu les insuffisances textuelles exploitées par les sociétés minières pour siphonner les ressources et les mauvaises pratiques de l’administration publique. D’autant plus que, pour lui, la tenue effective du procès à son terme n’était nullement pas une entrave, sur le plan juridique, aux différentes parties de conclure un accord transactionnel par la suite, si elles le désiraient.

Le SG du REN-LAC a aussi insisté sur le fait que le procès « Charbon fin » était d’un enjeu capital pour les acteurs engagés dans la lutte contre la corruption et une gouvernance « vertueuse » au Burkina. Car, a-t-il expliqué, les débats lors des différentes audiences ont mis en exergue des dysfonctionnements dans l’exploitation minière au Burkina. «… Au moins, le procès aurait eu le mérite d’éclairer l’opinion sur le fond de cette affaire sombre et de condamner les coupables s’il y a lieu », a-t-il ajouté. Sagado Nacanabo a, en outre, rappelé qu’au début de l’affaire « Charbon fin », les représentants de l’Etat, tout comme la société Iamgold Essakane, elle-même, clamaient que tout était clair.

« C’est pour vous dire que si aujourd’hui, on parle de cette affaire de Charbon fin, c’est grâce à l’abnégation du Parquet, de certaines OSC et de certains journalistes tels que Yacouba Ladji Bama qui avait même reçu une mention spéciale du jury lors de l’édition 2021 du Prix de la lutte anti-corruption (PLAC) », a-t-il laissé entendre. Par ailleurs, Sagado Nacanabo a fait comprendre que si l’Etat burkinabè a pu avoir gain de cause dans l’accord transactionnel ainsi que les cargaisons de charbon fin saisi, c’est parce que des acteurs ont maintenu allumée la flamme de la veille citoyenne. « Dans tous les cas, notre position de départ qui est celle qu’il y a eu fraude dans cette affaire se justifie par cet accord transactionnel », s’est réjoui M. Nacanabo.

L’Etat, la justice, la société civile et la presse salués

Même si la soif de vérité et de justice du REN-LAC n’a pas été étanchée avec le règlement à l’amiable considéré comme une « mauvaise affaire », le SG du REN-LAC a félicité les acteurs judiciaires et de la société civile, les agents de l’Etat et les journalistes qui ont porté, à ses dires, ce combat plus de cinq ans. Le mécontentement du REN-LAC de la solution amiable est-il réellement justifié ?

Pour exprimer juridiquement sa déception, le REN-LAC ne peut-il pas interjeter appel du jugement rendu du moment où, les parties ont été autorisées par le Tribunal à le faire dans un délai de 15 jours à compter de la date du 25 janvier 2024 ? Ce sont autant de questions qui ont été posées par les journalistes aux responsables du REN-LAC. En réponse à la première interrogation, Sagado Nacanabo a répété que le REN-LAC estime que la vérité sur l’affaire « Charbon fin » a été malheureusement abandonnée au profit de la transaction à l’amiable.

« Nous regrettons qu’on a manqué, à la faveur de ce procès, de jeter les bases pour mettre fin à ces genres de situation. Il faut qu’on quitte ce cercle vicieux. Ce que nous perdons, c’est la mise en garde contre toutes ces sociétés minières qui portent atteinte au développement économique du Burkina», a-t-il lancé. Concernant la seconde préoccupation de la presse, de l’avis de M. Nacanabo, la déception seule ne peut pas amener le REN-LAC à interjeter appel du jugement sans des preuves solides.

Boukary BONKOUNGOU

Haadiyatou NACANABO (Stagiaire)

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