Des populations, en majorité paysanne, en provenance de Nagré et de Natiaboani, des localités environnantes, affluent vers Fada, depuis le 2 décembre 2019. Elles fuiraient la terreur, semée par des groupes armés, ces derniers jours.
A pied, à bord de camions et de tricycles ou encore sur des motos, enfants, vieux, hommes, femmes, fuyant l’insécurité grandissante, affluent vers Fada, à la recherche d’un abri sûr. Les tout-petits au dos, leurs frères aînés aux côtés de leurs géniteurs, les bagages portés en bandoulières, des paysans, contraints à l’exode, y débarquent, les uns après les autres. Avec des noms d’emprunt, certains racontent leur mésaventure. Kolima Thiombiano et sa famille, venus de Konkoufouanou, sont aux portes de la cité du Yendabli, ce mardi 3 décembre 2019. Au bout d’un périple de plus de cinquante kilomètres, le quinquagénaire peut pousser un ouf de soulagement, les siens étant désormais loin de la menace terroriste. Boureima Ouoba, un autre déplacé de Natiaboani, dépeint, également une situation terrifiante, assimilable à «l’enfer sur terre». Il témoigne, sans détour, que des groupes armés sévissent à Nagré, à Natiaboani et dans les hameaux de culture environnants. Dans la même situation, Moussa Sawadogo affirme avoir vécu l’horreur. «Ils ont égorgé mon père sous mes yeux et ont filmé la scène avec mon téléphone», raconte-t-il, larmoyant. Sans même pouvoir enterrer son géniteur, le jeune Moussa et les autres membres de la famille ont plié
bagage, direction
Fada N’Gourma.
Madou Kombari de Natchambouri, autre infortuné, éclate en sanglots. Il se ressaisit avant de lâcher : « J’ai frôlé la mort ».
Retrouver le gout de vivre
«Hier, ils ont tué quatre personnes et en ont blessé trois. Ils ont débarqué sur des motos et ont commencé à tirer sur tout ce qui bouge. Et quand ils saisissent quelqu’un, ils lui tranchent la gorge», raconte ce père de famille, toujours sous le choc.
Outre les assassinats, les groupes armés s’adonneraient au pillage des récoltes et des bétails des paysans. Kolima Thiombiano, obligé d’abandonner la terre de ses aïeux et ses biens, débarque à Fada sans vivres. «Nos récoltes sont restées là-bas, à la merci des terroristes. Nous n’avons pu rien prendre », confie-t-il. Comme M. Thiombiano, Madou Kombari est désespéré à l’idée de ne pas pouvoir jouir des retombées de plusieurs mois de dur labeur.
Au-delà du périple et de l’atrocité qu’ils ont vécus, les déplacés de Nagré, de Natiaboani et des localités environnantes demandent assistance pour «revivre», avec l’espoir de retourner au bercail, au plus tôt. Cet appel semble avoir eu un écho favorable. En fait, selon le maire de la commune de Fada, Jean-Claude Louari, son équipe est à pied d’œuvre pour assister les déplacés qui seraient, à ce jour, plus de 2000. « Une commission a été mise en place pour les accueillir», rassure-t-il. En attendant les secours, la nuit s’annonce longue pour ceux qui ne disposent d’aucune famille d’accueil. Car, si certains ont trouvé un refuge dans les quartiers périphériques, d’autres errent encore dans la ville, à la recherche de la première famille hospitalière.
Sidgomdé