Une élection présidentielle est prévue en janvier 2026 en Ouganda, pays d’Afrique de l’Est de plus de 45 millions d’habitants. Le quarantenaire Bobi Wine, star du reggae devenu le principal opposant au Président Yoweri Museveni, entend encore défier celui-ci dans les urnes, comme en 2021. A 80 ans, l’indéboulonnable chef de l’Etat n’a pas encore officialisé sa candidature à un 7e mandat, mais il devrait le faire selon toute vraisemblance. La Constitution n’ayant pas fixé de limite d’âge, rien ne l’empêche a priori de rester dans la course à la magistrature suprême. Courant 2023, le fils de Museveni et actuel chef des forces armées ougandaises, Muhoozi Kainerugaba, avait semé le doute dans les esprits en annonçant sa candidature à la présidentielle. Aussi, avait-il renoncé par la suite à son projet pour maintenir son soutien à son père.
Ce scenario avait-il été orchestré en haut lieu pour tester l’opinion publique ougandaise, Muhoozi Kainerugaba étant considéré comme le successeur de son père ? Peu importe, Museveni règne toujours d’une main de fer sur le pays, même si son avenir politique semble derrière lui, vu le poids de l’âge. Bobi Wine qui rêve de lui succéder, sait qu’il n’est pas facile d’entretenir des ambitions présidentielles face à Museveni. Au lendemain du dépôt de sa candidature pour la présidentielle de 2021, l’opposant qui séduit une bonne partie de la jeunesse ougandaise avait été interpellé sous prétexte de la violation des consignes sanitaires de la COVID-19. Cette arrestation avait donné lieu à une vague de protestations violemment réprimées, avec pour conséquence une dizaine de morts. Battu à cette élection avec 34,8 % des votes contre 58, 6% pour Museveni, Bobi Wine avait dénoncé des fraudes, sans réussir à influer le cours des résultats. Pour autant, il poursuit son combat contre le régime de Museveni, ce qui lui vaut des ennuis. En août et septembre 2024, il avait été respectivement placé en résidence surveillée pour un appel à manifester contre l’état des routes en Ouaganda et blessé par balle par la police, dans des circonstances non encore élucidées. Le pouvoir Museveni veut-il réduire l’homme au béret rouge au néant ? On ne saurait l’affirmer tout de go, mais il reste que Bobi Wine évolue dans un environnement hostile à l’opposition ougandaise.
Il a plusieurs fois eu maille à partir avec les forces de l’ordre et l’avenir ne devrait pas disposer autrement, au regard de son engagement à combattre le régime Museveni. A quelques mois de la future présidentielle, les opposants sont sous pression, comme en 2021. C’est à croire, que tout est mis en œuvre pour éteindre leur activisme. En fin avril dernier, le parti de Bobi Wine a été empêché par la police de tenir une conférence de presse, sans oublier la traque de ses membres. Museveni ne tolère visiblement pas la contestation ni l’adversité, mais il devrait se rendre à l’évidence qu’il n’a plus le physique de l’emploi. Il ne devrait plus s’accrocher au pouvoir, mais organiser la relève et passer la main. Vivement critiqué aujourd’hui, Museveni a été pourtant celui qui a œuvré à stabiliser l’Ouganda et à l’aider à oublier les années sombres des dictatures incarnées par Idi Amin Dada et Milton Obote. S’il gouvernait de sorte à se démarquer de ses devanciers à ses débuts, Museveni a malheureusement fini par suivre leurs pas avec une gouvernance plus ou moins similaire. C’est pour cette raison que Bobi Wine, potentielle menace à son régime, se met en travers de son chemin. Le leader
de l’opposition ougandaise réussira-t-il à remporter le second duel qui s’annonce ?
Kader Patrick KARANTAO