Le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) a tenu du 24 au 26 septembre 2021 à Ouagadougou son deuxième congrès extraordinaire. Outre le bilan moral et la révision des textes, les congressistes ont élu un nouveau bureau exécutif pour conduire la destinée du parti.
Le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), parti au pouvoir, veut maintenir sa place de leader sur l’échiquier politique national. A l’occasion de son deuxième congrès extra-ordinaire tenu du 24 au 26 septembre 2021 dans la capitale, les congressistes venus des 45 provinces du Burkina et de l’extérieur du pays ont dressé le bilan moral de la vie de leur parti et revisité les statuts et règlement intérieur ainsi que le manifeste du MPP.
Les militants ont également passé au peigne fin le thème du congrès « Poursuivre le renforcement du MPP dans un Burkina Faso réconcilié, résilient et prospère ». Pour conserver leur place de champion, les congressistes ont élu un nouveau bureau exécutif fort de 95 membres avec à sa tête le Président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala Sakandé. Selon le Président sortant du MPP, Simon Compaoré, l’heure est venue pour lui, de céder la place à un autre camarade, qui, avec son équipe, viendront « ajouter de la terre à la terre », continuer l’œuvre de consolidation du parti et de l’élargissement de sa base, dans toutes les sphères de la société burkinabé.
De son avis, avec ses compagnons de lutte, ils ont supporté sans fléchir, ni plier, les
épreuves de tous ordres, physiques, morales et psychologiques. Fort de ce constat, M. Compaoré a invité la nouvelle équipe a relevé les défis du moment. Un message bien reçu par le président entrant du parti du Soleil levant. « C’est en toute humilité que j’assumerai la charge des responsabilités qui m’incombent désormais, conscient que sans l’engagement, le courage et la détermination de tous, je ne pourrai pas réussir ma mission » a-t-il déclaré.
De son avis, assumer un tel niveau de responsabilité politique n’est jamais chose aisée. « Il y a un cap à maintenir, des obstacles à franchir, des batailles à décider, des choix à opérer, des défaites à assumer, des attentes à combler, des incompréhensions à lever et des colères à apaiser », a relevé Alassane Bala Sakandé. Cependant, le président du MPP a soutenu ne pas douter que son équipe puisse relever les nombreux défis à venir.
Pour ce faire, il a évoqué deux valeurs cardiales pour la bonne marche de son parti. Il s’agit du rassemblement et le pardon. A l’écouter, il ne sera pas le président d’un clan politique. « Je serai le président au service de l’unité du MPP », a-t-il rassuré.
Regarder dans la même direction
Concernant le second défi, M. Sakandé a indiqué que le MPP a connu des moments de discorde, des instants de querelles internes, qui ont provoqué des frustrations et des rancœurs. C’est pourquoi, il a exhorté ses camarades à tourner le dos au passé qui pourrait les diviser, pour mieux regarder dans la même direction. « C’est à cette condition que le MPP, que nous chérissons tant, pourra survivre à la génération de militants que nous sommes aujourd’hui pour être légué en héritage aux générations futures , a assuré le nouveau président du MPP. Pour le rayonnement du parti, les 3500 congressistes ont adopté 8 motions et 4 recommandations et résolu-tions.
Il s’agit, entre autres, d’une motion de félicitations et de soutien au président Roch Marc
Christian Kaboré, une motion d’encouragement au gouvernement, une motion de soutien et d’encourage-ment aux Forces de défense et de sécurité (FDS), une motion de soutien aux Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) et aux populations résistantes et une résolution portant élévation du camarade Simon Compaoré à la dignité de président d’honneur du MPP. Au cours du congrès les participants ont, par ailleurs, adopté une déclaration qui dépeint la situation internationale, africaine et nationale.
La situation sanitaire marquée par la COVID-19 et sécuritaire ont été relevées. A propos, les militants ont été invités à aller vers les populations pour un travail de conscientisation et de mobilisation. « L’intelligence collective face au péril commun commande que tous les Burkinabè, au-delà des divergences d’ordre politique ou autres qui peuvent les opposer, renouent le pacte de sang qui caractérise la fraternité face au terrorisme en appuyant l’Etat dans les efforts déployés par ses dirigeants pour vaincre l’ennemi », a laissé entendre Ousseini Tamboura livrant le contenu de la déclaration.
Abdoulaye BALBONE
Bala Sakandé ou la transition générationnelle
Alassane Bala Sakandé s’est véritablement révélé au public burkinabè en septembre 2017 quand il a pris la tête du Parlement burkinabè, à la suite de la brusque disparition de Salifou Diallo, alors Président de l’Assemblée nationale (PAN). En plus de cette charge qui lui a été confiée à nouveau au soir des élections législatives de 2020, il est désormais le président du Bureau politique national (BPN) et président du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP). Ce Yarga bon teint (toujours taquin des peulhs, ses parents à plaisanterie), cadre supérieur de banque (BIB devenu UBA) né le 21 août 1969 à Ouagadougou, n’est pourtant pas un novice en politique.
En effet, élu conseiller municipal de la ville de Ouagadougou entre 1995 et 2000 et de 2006 à 2012 au compte du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), il gravira les échelons pour devenir secrétaire chargé des structures géographiques au Bureau exécutif national (BEN) du MPP, avec la création du parti en 2014. Elu pour la première fois député, le 29 novembre 2015, il a été le président du groupe parlementaire MPP de 2016-2017, avant d’assumer le poste de secrétaire exécutif national adjoint du parti du Soleil levant. Depuis son élection comme PAN pour succéder à Salifou Diallo, Alassane Bala Sakandé, ou ABS pour ses proches (en référence aux initiales de son nom), n’a cessé de gagner en popularité au sein de son parti, dans sa circonscription électorale d’appartenance, la province du Kadiogo et un peu partout dans le pays.
Directeur provincial de la campagne électorale de 2020 dans le Kadiogo, il a réussi à offrir quatre sièges de député à son parti dans ladite circonscription. A travers des actions d’éclat, de bienveillance et de solidarité, Bala Sakandé a fait grimper sa cote auprès des masses. Réputé proche des populations, il tisse progressivement sa toile, avec une bonne dose de franc-parler. Son accession à la tête du MPP était plus ou moins envisageable, si l’on sait que l’ombre de la succession de Simon Compaoré a fortement plané sur le dernier congrès ordinaire du parti en mars 2020. Annoncé comme celui du renouvellement de la direction politique du MPP, ce 2e congrès
extraordinaire a donc consacré un tournant décisif dans sa vie politique et militante. Même si lors de son discours, ABS a fait savoir qu’il n’a jamais rêvé d’être président du MPP, il n’en demeure pas moins que ses intentions n’en étaient pas loin. Marquant ainsi une transition générationnelle à la tête du parti, il se positionne comme l’un des potentiels successeurs de Roch Kaboré pour la présidentielle de 2025. Le président du MPP n’est pas d’office le candidat du parti à l’élection présidentielle, mais cela ne saurait compromettre d’éventuelle ambition présidentielle de Bala Sakandé. Entre 2021 et 2025, beaucoup d’eau va couler sous les ponts et les chances du MPP dépendront du style de management qu’il va imprimer au parti.
Jean-Marie TOE
La politique dans l’âme
Le 2e congrès extraordinaire du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) qui s’est ouvert le 24 septembre 2021 a connu son épilogue après trois jours de travaux intenses sur le thème « poursuivre le renforcement du MPP dans un Burkina Faso réconcilié, résilient et prospère ». Les instances dirigeantes du parti ont été renouvelées avec comme président, Alassane Bala Sakandé, actuel président de l’Assemblée nationale. Celui qui dirigeait le MPP jusque-là, Simon Compaoré, a été désigné président d’honneur de parti. Comme il l’avait souligné récemment dans les colonnes du quotidien L’Observateur paalga, son départ était imminent de la tête du parti.
« Moi, Simon Compaoré, je n’ai plus d’ambition. C’est vrai que je n’ai pas été président, mais je suis quelqu’un de très raisonnable, ça ne m’a jamais traversé l’esprit », avait-t-il confié. L’homme qui assurait l’intérim à la tête du parti au pouvoir depuis le décès de Salifou Diallo en 2017 en est devenu le président en mars 2020. L’ambition de l’ancien maire de Ouagadougou (1995-2012) était claire, quand il prenait officiellement les rênes du MPP : assurer une victoire éclatante au candidat du MPP, le Président Roch Marc Christian Kaboré au premier tour à la présidentielle.
Il réussit l’exploit au soir du 22 novembre 2020 avec l’élection du président au 1er tour et une majorité à l’Assemblée nationale avec 56 députés. Dans cette victoire, il faut compter avec l’appui des partis alliés que Simon Compaoré avait su mobiliser pour la cause. Durant la campagne électorale, l’homme qui va souffler bientôt ses 70 ans s’était fait remarquer à travers la formule en langue swahili « Hakuna matata » (pas de souci en français). Par cette formule sortie opportunément, il avait ravi la vedette même aux candidats à la présidentielle.
Connu pour son franc-parler suscitant parfois des controverses, Simon Compaoré règne sur l’échiquier politique burkinabè depuis plus de trois décennies. Durant son passage à la tête du MPP, il aura travaillé à concilier toutes les positions pour maintenir l’union sacrée face aux défis. A ceux qui soutenaient qu’entre lui et son successeur, règne une certaine rivalité, il a toujours répliqué qu’il n’en était rien. D’ailleurs, il soutenait ceci à propos dans sa récente interview : « On ne peut pas empêcher les gens de raconter ce qu’ils veulent, mais je voudrais dire par rapport à tout ce qui se dit là qu’il n’y a pas de bagarre entre le petit frère Bala Sakandé et moi.
Il n’est pas le seul, ils sont nombreux à être à la direction du parti, mais je n’ai pas de problème avec quelqu’un ». En cédant sa place à la tête du parti au pouvoir, l’ancien ministre de la Sécurité (2016-2019) passe le témoin à une nouvelle génération de leaders politiques qui devra impulser une autre dynamique en phase avec les ambitions du MPP. Dans ses nouvelles responsabilités de président d’honneur du parti, le célèbre édile de la capitale burkinabè va certainement œuvrer à la consolidation de ses bases pour mieux faire face à l’adversité.
Ceux qui seraient tenter de penser que ce titre de président d’honneur du parti ressemble à une retraite politique auront certainement tort. L’infatigable bête politique va encore peser de tout son poids et de son aura au sein du MPP et dans l’arène politique. Ce serait risqué de vouloir le prendre au mot, quand il dit ne plus avoir d’ambition. « The game is not over » (le jeu n’est pas fini), pour le fils de pasteur qui a vu le jour en 1952.
Karim BADOLO
Vu et entendu au congrès
Hommages tous azimuts à Simon Compaoré S’il y a bien un responsable du MPP à qui un hommage a été rendu, c’est bien le président sortant, Simon Compaoré. En effet, c’est à travers un « standing ovation » d’une minute à un «manager », « baobab politique », « démocrate dans les veines », qu’il a été accueilli à son entrée dans l’enceinte du palais des Sports de Ouaga 2000. Cet hommage a été rendu à celui qui est désormais le président d’honneur du parti au pouvoir, pour avoir relevé le défi de consolider le leadership du MPP sur l’échiquier politique national avec la victoire du candidat du parti à la présidentielle de 2020 et l’obtention de 56 sièges de députés à l’Assemblée nationale.
Mathias Tankoano démissionne du CSC
Président du Conseil supérieur de la communication (CSC) depuis quatre ans, Mathias Tankoano, a rendu sa démission, hier dimanche 26 septembre 2021. La raison est qu’il est désormais le secrétaire national chargé des questions électorales du MPP. Ainsi désigné lors du deuxième congrès extraordinaire du « parti du Soleil levant », Mathias Tankoano plie donc bagages du CSC pour « incompatibilité » avec cet engagement politique affiché avec sa fonction de président du CSC et du poste de conseiller de cette institution qui requiert neutralité et impartialité.
Alfred Sanou et Jérôme Bougouma au BPN, Toussaint Abel Coulibaly, au BEN
Démissionnaire du CDP, Alfred Sanou a rejoint la section provinciale du Houet (Bobo-Dioulasso) du MPP, il y a quelques mois avec plusieurs autres camarades. Lors de ce congrès extraordinaire, il a intégré le Bureau politique national (BPN) du parti. C’est aussi le cas de Jérôme Bougouma, ministre de la Sécurité du dernier gouvernement de Blaise Compaoré qui a rejoint la section du Zoundwéogo du MPP, il y a deux mois avec des centaines d’autres démissionnaires du CDP. Jusqu’à récemment président de l’Union pour la république (UPR) qui a fusionné avec le MPP, Toussaint Abel Coulibaly a pour sa part intégré le Bureau exécutif national (BEN), en tant que secrétaire adjoint chargé des questions électorales. Cela confirme les propos de l’ex-président du MPP, Simon Compaoré qui précisait lors de l’une de ses rencontres politiques à Manga, qu’il n’y a pas de militants de la 25e heure.
Une flopée de bonnets rouges
Comme à l’ouverture du congrès extraordinaire du MPP, un nombre impressionnant de chefs coutumiers s’est fait remarquer au palais des Sports de Ouaga 2000, à la clôture des travaux. Une véritable flopée de bonnets facilement reconnaissables dès l’entrée du palais.
« We are stile fighting and wining »
Il fallait s’y attendre et il n’a pas dérogé à la règle. Chaque fois qu’il est au micro des rencontres politiques, Simon Compaoré ne peut se passer de quelques mots en anglais. En effet, faisant référence à la mobilisation des militants à la clôture du congrès extraordinaire, il a lancé « The MPP is on the road » pour dire que le MPP est sur pied, sur le bon chemin. Il a ajouté : « We are stile fighting » et « We are stile wining » (Nous luttons toujours ; nous gagnons toujours). Arrangueur de foule devant l’Eternel, il use d’une communication politique dont lui seul a le secret. On se rappelle encore de sa mythique expression Hakuna Matata qui demeure, même après la campagne électorale présidentielle/législatives 2020.
Des vuvuzelas de trop
Alors que Simon Compaoré livrait son message de président sortant du MPP, des « vuvuzelas » ont perturbé, à plusieurs reprises son intervention qui était très attendu. En dépit des interpellations des membres du comité d’organisation, le discours devenait par moment inaudible, du fait des bruits de ces vuvuzelas. Il a fallu que Simon Compaoré lui-même demande à la sécurité de monter dans les gradins pour les faire taire. Ces sifflets témoignaient certes de l’ambiance cordiale dans laquelle les travaux du 2e congrès extraordinaire du MPP se sont déroulés, mais, ils étaient de trop lors du discours du président sortant.
Rassemblées par JMT