A Ouagadougou, chacun a sa spécialité ou son activité. Il en est ainsi pour Maminata Bagagnan, une femme, la trentaine bien sonnée, dévouée à la cause des clients détenteurs de motos à capots brisés. A la « forge », aux côtés de son mari, tous les jours, à longueur de journée, elle colle et recolle les bribes de capots d’engins à deux roues.
Maminata Bagagnan, âgée de 36 ans et mère de deux enfants, est une femme «atypique» qui vit en zone non lotie, dans l’arrondissement n°9 de Ouagadougou. Aux côtés de son mari, il y a plus d’une décennie, du lundi au dimanche, elle répare les capots brisés de motos, un travail que l’imaginaire populaire attribuerait aux hommes. Très souriante et sans complexe, elle s’active, autour d’un feu de bois, pinces et barreau de fer en mains, pour faire disparaître les lézardes sur les capots, dans l’optique de donner le sourire aux clients. Sous le regard jovial de son conjoint, Moumouni Bagagnan, elle est fort admirée et appréciée dans cette œuvre par tout passant. A Tampouy, sous un hangar de fortune, où elle «officie» le travail de la métallurgie traditionnelle et archaïque, elle affirme recevoir, par jour, la visite d’une vingtaine d’hommes et de femmes, souvent, compte tenu, dit-elle, de son dévouement, dans un domaine «réservé». Femme convaincue de la nécessité d’aider son mari, dame Bagagnan déclare avoir abandonné la coiffure, non pas par manque de clients, mais par détermination d’épauler un conjoint qui en a fortement besoin. Elle confie, dans un large sourire, la générosité de son mari qui ne ménage aucun effort pour, chaque fois, reconnaître son «boulot» bien fait. «Quand je reçois l’argent des clients, je le lui remets ; il m’en donne un peu pour m’encourager. Le reste d’argent est gardé pour les besoins de la famille», laisse-t-elle entendre, dans un rire «profond».
Toutes les «bourses» pour se faire coller son capot
En effet, le couple affirme faire de bonnes affaires, dans une activité, indique Maminata Bagagnan, négligée par bon nombre de personnes. Pour elle, comme le dit l’adage, «Il n’y a pas de sots métiers, il n’y a que de sottes gens». D’ailleurs, c’est une pensée, à l’entendre qui la galvanise, à plus d’un titre, dans son œuvre, d’autant plus qu’elle balaie du revers de la main, les «mauvaises langues» qui dénigrent une tâche, à son avis, salutaire. Concernant son «chiffre d’affaires», elle indique qu’elle peut s’en tirer, souvent, avec une somme comprise entre 15 000 F CFA et 20 000 CFA, pour une clientèle évaluée à une quinzaine, au quotidien, pouvant débourser 250 F CFA, 750 F CFA, 3 000 F CFA… «Pour arranger totalement tous les capots d’une moto, le propriétaire doit dépenser près de 10 000 F CFA», ajoute-t-elle. Sur les capots, au début, déclare-t-elle, après avoir fini de les réparer, elle y applique une peinture pour l’esthétique. Cependant, de son point de vue, cela n’est pas rentable, car la contrepartie versée par les «abonnés» pour la peinture ne couvre pas ses dépenses pour l’acquérir. «Nous leur laissons maintenant le choix d’aller mettre la peinture», précise-t-elle. Les capots brisés de motos occupent la majorité de son temps pour leur «recollage» du fait qu’ils constituent son «centre d’intérêt». Mais, n’empêche, selon elle, qu’elle s’adonne à des activités connexes. En effet, elle se lance, quand il y a la demande, dans le «recollage» des chaises. Toutefois, le souci majeur exprimé par la «retapeuse de capots» est relatif à l’espace de travail qu’elle estime restreint pour l’activité. Elle compte, par ailleurs, acquérir de nouveaux capots pour les clients qui en veulent une fois qu’ils jugent que les anciens sont « complètement » hors d’usage. Lors de ce « dur labeur », Maminata Bagagnan raconte n’avoir jamais eu de problème avec les clients, mais ce qui la dérange, c’est quand ils sont nombreux à attendre leurs engins.
En ce moment, à l’écouter, elle se demande comment sera le résultat malgré la confiance qu’elle éprouve en elle-même. S’agissant du ménage, elle s’y applique, chaque jour, avec abnégation et amour pendant que son mari, la quarantaine révolue, part à la recherche d’eau potable dans une localité où l’accès à la denrée est un casse-tête chinois. Maminata Bagagnan ne peut pas évaluer les multiples cadeaux et récompenses qu’elle reçoit le long de la journée des mains des visiteurs qui l’apprécient. Mais, pour la visibilité de son entreprise, elle lance un appel pressant aux bonnes volontés pour développer son métier.
Boukary BONKOUNGOU
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