« Japonais » pour les intimes, Amado Kassi Ouédraogo, grâce à ses crochets et à ses déboulés, a contribué à animer le championnat burkinabè de football de D1 dans les années 2000. Que ce soit avec le Santos ou avec l’ASFA-Y, il a à chaque fois fait parler la poudre avant de mettre le cap sur l’Europe. Là-bas, cet attaquant a évolué dans plusieurs clubs belges et français avant de mettre un terme à sa carrière. En France où il vit depuis près de deux décennies, l’ex-Etalon, aujourd’hui âgé de 37 ans, n’a pas quitté le milieu du football.

Que devient Amado Kassi Ouédraogo ?
Je ne suis plus en activité mais je reste dans le sillage du football. Je vis toujours en France. A l’issue de ma carrière, j’ai changé d’activité et d’option. Je suis devenu chaudronnier métallique soudeur. Mais comme on le dit, tu peux arrêter ta passion mais elle te rattrapera toujours. Pour vous dire qu’étant chaudronnier métallique soudeur, on m’a rappelé dans le football. J’ai été copté comme entraîneur dans un petit club. Deux fois dans la semaine, je suis dans le football et le reste du temps, je m’occupe ailleurs.

Pour cette génération qui ne t’a pas connu, qui a été le footballeur Kassi ?
Il est évident que beaucoup de cette nouvelle génération ne m’ont pas connu. Je profite au passage l’encourager pour ce qu’elle fait pour le football burkinabè. Elle est en train de monter en puissance. Ça fait plaisir de la voir jouer. Elle n’a qu’à rester humble et tout ira dans le bon sens. Pour revenir à votre question, je dirai qu’Amado Kassi Ouédraogo a commencé à taper dans la boule en cuir dans son quartier à Gounghin. Ensuite, j’ai connu des clubs comme l’AS-SONABEL, le Santos, Kaya qui est ma ville natale, puis à l’ASFA Yennenga avant de partir en Europe. Là-bas, j’ai d’abord porté les couleurs de Lokeren en Belgique avant d’évoluer dans plusieurs clubs français comme AC Arles-Avignon, Besançon, CA Bastia, AS Beauvais, etc.

Quelle est ton appréciation du niveau du football burkinabè ?
La première chose que je déplore est l’absence des supporters dans les stades. Quand nous étions petits, les stades étaient à chaque fois bondés lors des journées de championnat, surtout le jour d’un derby EFO-ASFA-Y. Il n’y a plus d’ambiance dans les stades car il y a beaucoup moins de monde. Je pense que ce phénomène joue largement en défaveur du football burkinabè. Il est vrai que l’avènement des centres de formation pourra produire des effets positifs, mais le football burkinabè vu de l’extérieur ne va pas comme on l’espère. On n’attend juste que quelques derbys pour voir de vrais chocs. On constate que des grands clubs de l’époque, pour ne pas dire des clubs légendaires ne répondent plus à l’attente. J’allais dire qu’ils se cherchent. Cela est inadmissible.

Quelle comparaison peux-tu faire entre le football de ton époque et celui de maintenant ?
C’est sûr que ce ne sont pas les mêmes époques. Nous avons hérité des aînés qui ont disputé la CAN 98. Après, il y a eu une période transitoire avec les Mahamoudou Kéré et autre Moumouni Dagano. Ils se sont battus pour faciliter notre intégration. A notre époque, il y a eu quelques-uns qui sont allés dans les centres de formation comme Planète champion. Après, il y a cette génération, celle où il y a plus de centres de formation, plus de managers modernes, plus de structures avec beaucoup de moyens injectés par rapport à la nôtre. Voyez vous-même que la différence est énorme. Quand tu jouais en première division, souvent, tu n’avais même pas de crampons pour pratiquer ton sport préféré. Alors que de nos jours, les jeunes ont accès à tout. On avait la passion mais pas les moyens. Aujourd’hui, on sent que tout est là. Ils ont plus de chance que nous. La génération d’aujourd’hui doit savoir qu’elle a eu énormément de chance et qu’elle doit la saisir pour mieux faire que nous. Ce qu’elle fait actuellement n’est pas mal mais elle peut mieux faire.

Qui est, selon toi, le meilleur footballeur burkinabè de tous les temps ?
Honnêtement, c’est très difficile de se prononcer. Je vais parler de la génération que je connais, c’est-à-dire celle de 1998 jusqu’à ce que je mette un terme à ma carrière. Je vois deux joueurs, Seydou Traoré et Moumouni Dagano. Ils ont fait un long chemin sur le plan national et international.

Et le meilleur de cette nouvelle génération ?
On ne peut pas parler de cette génération sans évoquer le nom de Bertrand Traoré. Un jeune comme Franck Lassina Traoré aussi n’est pas mal. J’ai vu ses images. Alain Traoré était en vogue mais ses blessures l’ont ralenti. Mais selon moi, je dirai que c’est Charles Kaboré grâce à sa stabilité dans sa carrière. Pour moi, il est le meilleur. Après lui, je pense à Jonathan Pitroipa qui, lui, est resté régulier. Je pense que la génération des Edmond Tapsoba pourra être meilleure.

De ta carrière au Burkina, quel défenseur t’a le plus causé de misères ?
J’ai croisé pas mal de très bons défenseurs au Burkina. Que ce soit Moussa Ouattara dit Bouffe-tout de l’ASFA- Yennenga, Ousmane Moussa, Zakaria Zèba, Brahima Korbéogo, Ibrahima Cissé, il y avait pas mal de très bons défenseurs. Excusez-moi du terme, mais il y a eu ce que nous appelons dans le jargon, des défenseurs méchants et les barbares. Mais, les plus vicieux qui peuvent te faire mal étaient Soumaïla Tassembédo et Djibril Traoré.

Des projets pour le football burkinabè ?
Je n’ai pas beaucoup de projets au niveau du football. Après ma carrière, je suis sur un autre projet. J’accompagne ceux qui sont déjà en Europe et qui ont des difficultés. Vu la distance, je ne peux pas faire grand-chose du côté du Burkina. Peut-être dans l’avenir. Pour l’instant, je me consacre à mon petit travail et à mon petit club. Ceux qui quittent le Burkina pour la France, lorsqu’ils arrivent et que je peux donner un coup de main, je n’hésite pas.

Que penses-tu de l’avènement des centres de formation qui dominent maintenant le football burkinabè ?
C’est ce que j’ai dit dès le départ. L’avènement des centres de formation est une bonne chose. Quand les jeunes sont bien formés, forcément de bons joueurs y sortiront. Des joueurs vont percer. Mais, nous voyons des centres de formation qui stagnent depuis des années, incapables de faire sortir un joueur. C’est du gâchis et une grande perte. Il y a eu beaucoup d’investissements pour rien. Présentement, c’est Salitas et Rahimo qui font beaucoup plus de différence. J’ose croire que cela va fouetter l’orgueil des clubs comme l’ASFA-Y, l’EFO, l’USO, le SANTOS, le RCK, le RCB, l’ASFB qui sont les élites du football burkinabè. Il faut que nos clubs aient des ambitions en ayant des gens performants autour, des dirigeants capables de dire stop. Ils ne peuvent pas être là depuis de nombreuses années et incapables d’injecter des moyens suffisants. Quand je les vois, j’ai mal au cœur.

Entretien réalisé par Yves OUEDRAOGO

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