Il est jeune, mais grâce à son dynamisme, il gère la Fédération burkinabè des sports équestres depuis huit ans. Il a encore été reconduit le 15 août 2020 pour un troisième mandat. Pour ce quatriennal, Rachid Nacoulma n’a qu’un objectif : « offrir au Burkina un hippodrome qui réponde aux normes ».

Qu’est-ce qui vous a motivé à briguer un troisième mandat ?

J’allais dire sans hésiter que c’est le travail abattu en amont. Je veux parler du projet que nous avons mis en place. Il y a aussi et surtout la demande des écuries et des chefs d’écuries. Ils m’ont fait une fois encore confiance pour que je puisse continuer le projet que nous avons commencé ensemble.

Comment jugez-vous le bilan de votre précédent mandat ?

Je juge le bilan satisfaisant dans l’ensemble malgré les petits problèmes à l’échelle nationale tels que l’insécurité liée aux actes terroristes et tout récemment la crise sanitaire qui a occasionné l’arrêt de nos compétitions. A part cela, je pense que le bilan est assez satisfaisant.

Voulez-vous dire que vous avez atteint vos objectifs ?

Ils n’ont pas été totalement atteints parce que la situation nationale ne nous le permettait pas. Mais au moins la majeure partie est faite. Vu que le pays était de temps à autre en détresse, nous n’avons pas pu mener nos activités à bon escient.

Qu’est-ce qui a pu être fait ?

Nous avons pu régulariser les écuries. Nous avons fait la formation des jockeys à la montée universelle. Nous avons délivré des licences pour les chevaux et pour les jockeys. Nous travaillons 3maintenant à délivrer des licences pour les entraîneurs et des cartes pour les membres de la fédération. C’est grosso-modo le travail qui a été fait au niveau administratif de la fédération. Au niveau des chevaux, nous les avons classés en cinq catégories. Nous avons les poulains, c’est-à-dire les chevaux qui sont nés chez nous pour la plupart et les chevaux qui ont moins de trois ans. Nous avons aussi la race locale, les métissés, les étalons et la race améliorée qui est des chevaux importés d’Europe, du Soudan, etc.

Et ce qui n’a pas été fait ?

C’est justement ce qui n’a pas été fait qui sera l’objectif principal de ce nouveau mandat. Il s’agit de la construction d’un nouvel hippodrome en remplacement de l’actuel qui est délabré. C’est une épine dans notre pied que nous allons essayer d’enlever. Au-delà que l’actuel n’a pas de clôture donc pas de porte, son sol est difficile et blesse des chevaux et cause souvent leur mort. Mais, nous espérons que cette année, avec la confiance que les écuries m’ont renouvelé, je vais travailler avec la LONAB pour au moins réaménager l’hippodrome afin qu’il réponde un peu aux normes et permettre une bonne pratique des chevaux. Nous avons engagé la procédure avec la LONAB. Vous savez qu’il y a eu un changement à la tête de la direction. Mais comme l’administration est une continuité, nous pensons que d’ici à 2021, les choses vont se décanter. Il est vrai que la COVID-19 a ralenti beaucoup d’activités et la LONAB n’a pas été en reste. C’est notre partenaire et nous comprenons cet état de fait. Nous espérons que d’ici à 2021, si la situation s’améliore, nous allons arriver à faire quelque chose avec la LONAB qui sera très bénéfique pour tout le monde.

Sous quel sceau placez-vous ce nouveau mandat quatriennal ?

Je place mon mandat sous le sceau de la réhabilitation de l’hippodrome qui est mon crédo et la collaboration avec la LONAB pour arriver à mettre en place le pari hippique burkinabè qui va regrouper tous les acteurs du cheval du continent. De telle sorte à ramener le pari hippique burkinabè et inviter les pays limitrophes à y participer. Faire les paris à l’échelle internationale surtout africaine à partir du Burkina Faso.

Comment est organisé l’hippisme burkinabè et quelles sont les compétitions phares de la fédération?

Nous avons vingt-six écuries affiliées à la fédération. Ces écuries sont issues de Ouagadougou, de Bobo-Dioulasso, de Kaya, de Dori… Ce sont des acteurs qui participent de près aux activités de la fédération. Nous organisons plusieurs compétitions comme le championnat national, la coupe du président du Faso. Nous avons aussi des grands prix comme celui du royaume du Maroc, le prix de Sa Majesté le Mogho Naaba Baongo. C’est pour vous dire qu’au sein de la fédération, nous essayons de rehausser l’image du cheval qui est notre emblème. Nous encourageons les éleveurs de chevaux à ne pas laisser disparaître notre patrimoine.

Pour certains, ne pratique pas les sports équestres qui veut mais qui a les moyens …

Non, ce n’est pas tout à fait un sport de bourgeois comme vous voulez insinuer. Le cheval c’est comme la moto. Il veut qu’on prenne soin de lui parce que c’est un animal qui est noble. C’est un animal qui mérite du respect parce qu’il représente l’emblème de notre pays. Ce qui n’est pas rien. Vous remarquerez qu’il y a des gens qui ne sont pas nantis mais qui ont des chevaux tout simplement parce qu’ils ont l’amour du cheval. Par rapport toujours à votre question, cela peut dépendre aussi de ce que vous voulez faire avec le cheval. C’est-à-dire si vous voulez en faire un cheval de compétition ou celui de prestige. L’un dans l’autre, tout dépend de la puissance du cheval. Plus tu prends un puissant, plus tu as beaucoup de dépenses. Donc, quelle qu’en soit la personne, je pense que tout le monde peut élever un cheval.

Comment voyez-vous l’avenir des sports équestres au Burkina Faso ?

Depuis le temps que nous travaillions, nous voyons qu’il y a de l’amélioration parce que si nous avons de nos jours vingt-six écuries alors que nous avons commencé avec quatre ou cinq, cela veut dire que le nombre d’adeptes s’accroit. Cela veut dire également qu’il y a beaucoup d’engouement autour de l’hippisme. A part le football et parfois le cyclisme, je ne sais pas quel sport peut regrouper autant de monde que le sport équestre. Les gens aiment le cheval et viennent voir les courses de chevaux parce que cela leur plait. C’est un engouement qui nous encourage. Je pense que le sport équestre a un avenir radieux au Burkina Faso.

D’où proviennent vos ressources si l’on sait que les sponsors ne courent pas les rues au Burkina ?

Nous avons notre ministère de tutelle qui est celui des Sports et des Loisirs qui, chaque année, nous accompagne avec les moyens. Même si ce n’est pas fabuleux, nous savons que nous sommes accompagnés. Il y a aussi la LONAB qui est notre partenaire officiel. Elle nous accompagne chaque année. A part eux, nous avons d’autres partenaires qui de près ou de loin nous soutiennent.

Contrairement aux autres disciplines, l’on ne sent pas trop le sport équestre à l’international ?

Pourtant si ! Chaque année, nous participons à des compétitions internationales. Par exemple l’année dernière, nous avons participé et gagné des compétitions. Nous avons été au Nigéria, au Niger, au Mali et les chevaux du Burkina ont toujours remporté les premières places. C’est comme ce que je vous disais tantôt, notre problème c’est surtout le terrain. Par exemple les chevaux qui gagnent ne sont pas ici au Burkina. Ils ne peuvent pas faire les compétitions en étant ici parce que notre hippodrome n’est pas adapté. Ce qui fait que nous sommes obligés de les amener au Niger ou au Nigeria où il y a du sable pour les entraîner avant de les amener à des compétitions à l’international.

Cette année particulièrement, le renouvellement des structures sportives a été houleux. Qu’est-ce qui fait courir les gens selon vous ?

Nous avons été parmi les premières fédérations à tenir notre élection. Nous avons même été félicités parce qu’elle s’est passée sans couacs. Nous l’avons préparée en amont pour que tout se passe bien. Vous savez, dans le jargon de l’hippisme, on dit que le sport est un derby. Et là où il y a le derby, vous constaterez toujours des tiraillements de gauche à droite parce que chacun vient pour gagner avec un objectif précis.
Ce qui fait que quand vous avez les mêmes objectifs mais pas la même stratégie de les atteindre, il faut obligatoirement qu’il y ait de petites querelles car tu vas toujours trouver que ton adversaire a un avantage par rapport à toi.

N’y a-t-il pas certains qui viennent pour se servir du sport ?

Si tu viens en ayant cet objectif, tu ne peux pas avoir deux mandats parce que forcément tu auras des problèmes dès le premier.
Si tu viens avec l’objectif d’exploiter les gens, ça sera difficile car nous ne sommes plus à l’ancienne époque. Tous savons que tout président de fédération investit déjà plus par rapport à ce qu’il gagne parce qu’on ne peut pas avoir une structure fédérale avec un petit budget et puis fonctionner.
Nous, en tant que président, nous investissons plus que ce que nous recevons pour que le sport évolue. Je profite de vos colonnes pour remercier les cavaliers avec qui, depuis huit ans, sommes dans le même bateau.
Nous luttons ensemble avec des secousses. Même si parfois il y a des divergences entre nous, l’essentiel c’est d’arriver toujours à se comprendre et à trouver une porte de sortie. Ces gens sont à encourager parce que sans eux, il n’y a pas de fédération. Je les encourage à persévérer dans leur travail pour pouvoir rehausser l’image du cheval au Burkina Faso, en Afrique et dans le monde.

Interview réalisée par Yves OUEDRAOGO

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