Le 2e sommet africain sur le climat qui se tient du 8 au 10 septembre 2025, à Addis-Abeba, en Ethiopie, a servi de cadre à l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique (AFSA) d’organiser un panel sur le thème : « Formuler des politiques adaptées pour une agriculture et des systèmes alimentaires et résilients en Afrique », le lundi 8 septembre 2025.
Plus que les autres secteurs, l’agriculture et les systèmes alimentaires africains subissent de plein fouet les effets pervers du changement. Selon l’Alliance pour la souveraineté alimentaire en Afrique (AFSA), pour y remédier, la solution réside dans des politiques publiques domestiquées, basées sur la transformation des systèmes alimentaires africains à travers l’agroécologie comme solution africaine à la crise climatique.
Dans le but de contribuer à à l’adhésion et l’appropriation de cette vision par les différents acteurs, elle organisé un panel sur le thème : « formuler des politiques adaptées pour une agriculture et des systèmes alimentaires résilients en Afrique », le lundi 8 septembre 2025, à Addis-Abeba, en Ethiopie, où se tient le 2e sommet africain sur le climat. Les échanges étaient modérés par la chargée de programmes à AFSA, Bridget Mugambe.

Dès l’entame, le Coordonnateur général de AFSA, Dr Million Belay, a indiqué que l’agroécologie, comme fondement de la souveraineté alimentaire de l’Afrique, n’est pas seulement une question pratique mai aussi et surtout un enjeu politique. En d’autres termes, plus qu’une simple pratique, l’agroécologie est un mouvement politique, qui vise sortir le continent de la dépendance de ses systèmes alimentaires et politiques agricoles vis-à-vis des agendas et des instances extérieurs, qui contrôlent aussi la recherche, les outils de recherche, la mobilisation de la connaissance.
Pendant ce temps, les connaissances et les savoirs endogènes des paysans sont négligés, a-t-il déploré. C’est pourquoi, recommande-t-il, il est important de produire des évidences sur ses savoirs paysans et les documenter pour les générations futures. C’est aussi une question politique, car ce sont de la culture africaine, les droits des femmes, des jeunes, des populations indigènes, des agriculteurs du continent qui sont en jeu, a-t-il ajouté.
Convaincre les politiques par des évidences scientifiques
Sur la question, la directrice du département nourriture, terres et eau à World Ressources Institue Afrique, Dr Susan Chomba, est revenu sur l’importance de la recherche pour soutenir l’agroécologie, qui est nécessaire pour comprendre les conditions de nos terres, nos systèmes, nos populations, et qu’il importe de prendre en compte dans la transformation des systèmes alimentaires durables du continent. Mais pour y arriver, il y a lieu d’impliquer les politiques qui peuvent avoir des compréhensions différentes des enjeux. La recherche devrait donc aller chercher ces décideurs politiques où ils se trouvent, afin de les amener, à travers des évidences scientifiques, à abandonner leurs politiques en faveur des monocultures, de l’agriculture industrielle pour des modèles de production diversifiés, intégrés et durables qu’offre l’agroécologie, a-t-elle souligné.
Pour M. Bealy, le financement constitue aussi un autre défi. Et l’aide au développement constitue un autre moyen de contrôle des systèmes alimentaires et des politiques du continent. Pour celui qui se dit admiratif du Président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, qu’il qualifie de panafricain, les trois pays de l’AES « sont sur un très bon chemin pour contrôler l’avenir ». Comme alternative aux ressources extérieures, Susan Chomba a appelé à des financements endogènes publics et privés conséquents de l’agroécologie. Elle préconise également d’aller vers des partenaires qui veulent aider l’Afrique à bâtir sa souveraineté alimentaire, tout en produisant des évidences et des données pour challenger les modèles industriels de production agricole.

La paneliste Anne Maina, de l’Association pour la biodiversité et la biosécurité (BIBA) du Kenya, a, quant elle, mis en exergue quelques moyens efficaces pour remettre en question les politiques imposées de l’extérieur et promouvoir des alternatives agricoles. Ces solutions résident, a-t-elle précisé, dans la nécessité de renforcer la capacité des agriculteurs à s’exprimer, de promouvoir des politiques et des financements en faveur de l’agroécologie afin de soutenir la transition vers cette dernière.
Le rôle de la jeunesse
La recherche menée par les agriculteurs, la communication, tant sociale que grand public, constituent aussi de puissants leviers pour faire connaître les réussites et influencer le changement de paradigme en faveur de l’agroécologie, a argumenté Mme Maina. C’est pourquoi, son organisation soutient les visites d’échange et d’apprentissage avec les agriculteurs, les décideurs politiques et responsables politiques, afin de présenter les pratiques agroécologiques réussies et de les inciter à s’engager en faveur de l’agriculture durable.

Le rôle de la jeunesse dans la transformation des systèmes alimentaires africains, mais aussi dans le changement de paradigmes et de narratifs par rapport aux récits dominants sur l’alimentation, était au centre de la présentation de la jeune volontaire zimbabwéenne pour l’environnement, Melissa Murwira. Pour elle, à travers la technologie, les innovations, la documentation et la vulgarisation des évidences agroécologiques, des savoirs endogènes africains, les jeunes peuvent s’illustrer comme une solution aux défis auxquels le continent fait face.
En tout état de cause, la souveraineté alimentaire de l’Afrique n’est pas une option, mais un impératif, dira le paneliste Tennyson Williams de World Animal protection. Et cela passe par un contrôle des systèmes alimentaires par l’Afrique et pour l’Afrique, à travers l’agroécologie. Et la plus grande attente de AFSA à ce 2e forum africain sur le climat est de voir les dirigeants du continent adopter l’agroécologie comme solution africaine à la crise climatique mais aussi comme base de la durabilité de ses systèmes alimentaires, a conclu son Coordonnateur général, Dr Million Belay.
Mahamadi SEBOGO
(Depuis Addis-Abeba, Ethiopie)
Légende (crédit photo : Mahamadi SEBOGO)