Les Burundais iront aux urnes, demain jeudi 5 juin 2025, pour élire les 123 députés devant siéger à l’Assemblée nationale. Comme en 2020, le parti au pouvoir, le CNDD-FDD, qui a mené une campagne XXL, devrait remporter une large majorité des sièges face à une opposition quasiment mis au banc de touche. L’omniprésence de la formation présidentielle et le sort peu enviable de l’opposition présage d’un scrutin sans enjeu.
La Commission électorale nationale indépendante (CENI) a rejeté les listes de plusieurs opposants politiques, dont le plus emblématique est Agathon Rwasa, candidat malheureux à la présidentielle de 2020 face à l’actuel chef de l’Etat, Evariste Ndayishimiye. L’ancien chef rebelle hutu pendant la guerre civile burundaise a déploré la décision de l’organe chargé des élections, lui qui soupçonne le pouvoir en place d’être à la base des bisbilles au sein de son parti, le Congrès national pour la liberté (CNL).
Entre autres, motifs évoqués pour justifier ces rejets, des listes de candidats incomplètes, le non-respect des équilibres ethniques et de genre prévus par le Code électoral. Pour les opposants mis à l’écart, et par ailleurs victimes d’intifimidations ou d’agressions, le pouvoir a manœuvré pour s’assurer une victoire quasi-certaine aux législatives de jeudi. A priori, on ne peut pas battre en brèche leur position, puisque tous les moyens sont bons pour nuire aux adversaires politiques, dans nos démocraties africaines.
Au Burundi, la réalité est que l’opposition est de plus en plus perçue par une certaine opinion comme une alternative crédible, face au régime de Ndayishimiye, dont la gouvernance fait l’objet de vives critiques. Aux commandes depuis 20 ans, le CNDD-FDD, devenu pratiquement un parti-Etat, règne en maitre absolu sur le pays, mais son action ne semble plus en phase avec les aspirations des populations. En effet, les Burundais vivent une grave crise socio-économique, caractérisée par la vie chère et les pénuries de toutes sortes.
Alors que les salaires restent relativement faibles, les prix des denrées de première nécessité et des logements explosent. Si la situation n’est pas facile en campagne, elle est pire dans les villes comme Bujumbura, où les habitants doivent se démener pour joindre les deux bouts. Sous les feux de la rampe, le Président Ndayishimiye, au pouvoir depuis juin 2020, multiplie les promesses de lendemains meilleurs à ses compatriotes, mais encore faut-il qu’ils en soient convaincus.
La promesse, qu’il a faite de faire chaque Burundais, un millionnaire d’ici à deux ans, pendant la campagne pour ces législatives, fait jaser dans les rues. Même s’il est bon d’avoir de l’audace, certains citoyens se demandent comment leurs pays peut produire des millionnaires, avec une situation économique des plus catastrophiques. Ils n’ont pas totalement tort. A moins que des miracles s’opèrent, la situation économique difficile du Burundi ne relève pas de la fiction, mais bel et bien de la réalité.
Dans cet Etat d’Afrique de l’Est, 76% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale. La preuve, que le Président Ndayishimiye va devoir déployer de nombreux efforts pour sortir sa patrie du gouffre dans lequel il se trouve actuellement. Le défi est de taille…
Kader Patrick KARANTAO