Après Niamey en juillet 2024, les chefs d’Etat du Burkina, le capitaine Ibrahim Traoré, du Mali, le général Assimi Goïta et du Niger, le général Abdourahamane Tiani se retrouvent, aujourd’hui 22 décembre 2025 et demain aux bords du Djoliba au Mali dans le cadre de la 2e session du Collège des chefs d’Etat de la Confédération des Etats du Sahel (AES). Avant ce sommet, la première session confédérale du Conseil des ministres tenue, samedi 20 décembre, a balisé le terrain en examinant des dossiers majeurs dont le rapport d’exécution de la Feuille de route de l’An I de la Confédération, les protocoles additionnels relatifs à la défense, à la diplomatie et au développement et les dispositions encadrant les sessions parlementaires confédérales.
Cette 2e session du Collège des chefs d’Etat prouve, si besoin en était encore que la Confédération AES s’est imposée, en un temps relativement court, comme une orientation politique pleinement assumée, portée par une vision claire et des idéaux partagés par les trois pays. Née dans un contexte d’adversité sécuritaire, de pressions diplomatiques et de remise en cause de la dignité des peuples sahéliens, l’AES s’affirme aujourd’hui comme un projet de souveraineté, de solidarité et de renaissance politique, traçant ainsi un chemin structurant vers une indépendance réelle, fondée sur la maîtrise des choix stratégiques et le respect de la volonté populaire.
Au cœur de cette dynamique, il y a d’abord des idéaux. Ceux des trois chefs d’Etat qui ont fait le pari du courage politique, de la rupture avec les schémas de dépendance et de la primauté des intérêts des peuples. Leur engagement commun repose sur une évidence qu’aucun des trois Etats ne peut, isolément, relever les défis sécuritaires, économiques et géopolitiques auxquels il est confronté. La Confédération AES consacre ainsi le retour à une solidarité active, inspirée par l’histoire, la géographie et les liens socioculturels profonds entre les peuples burkinabè, maliens et nigériens.
Dans le domaine de la défense et de la sécurité, les acquis sont tangibles. La mise en place de la Force unifiée de l’AES et la remise officielle de l’étendard par le Président malien, Assimi Goïta, ce samedi 20 décembre 2025, à Bamako constituent ainsi le démarrage opérationnel, marquent une étape décisive dans la mutualisation des moyens et des stratégies.
Les manœuvres et opérations conjointes (Yéréko I et II), menées régulièrement, renforcent l’interopérabilité des forces, la confiance mutuelle et l’efficacité opérationnelle face à la menace terroriste. Cette approche endogène de la sécurité, pensée par et pour les Etats du Sahel, rompt avec les modèles importés qui ont montré leurs limites. Elle redonne aux forces nationales et aux populations, l’espoir d’une stabilisation durable, fondée sur la connaissance du terrain et l’adhésion populaire.
Mais la souveraineté ne se construit pas uniquement par les armes. Elle s’enracine aussi dans l’intégration des peuples. A cet effet, la libre circulation des personnes et des biens au sein de l’espace AES constitue une avancée majeure. Elle facilite les échanges commerciaux, renforce les liens sociaux et redonne sa vitalité naturelle à un espace historiquement intégré. L’instauration du passeport et de la Carte d’identité AES est hautement symbolique, traduisant une volonté politique de rapprocher les peuples et de faire de l’AES un espace de mobilité, d’opportunités et de solidarité.
Sur le plan institutionnel et juridique, la décision de se retirer de la Cour pénale internationale (CPI) s’inscrit dans une logique de réappropriation de la justice. Elle ne signifie nullement un rejet de la lutte contre l’impunité, mais plutôt la volonté de bâtir des mécanismes judiciaires endogènes et plus adaptés aux réalités du Sahel. La création annoncée de la Cour pénale et des droits de l’homme du Sahel illustre cette ambition.
Cette juridiction régionale vise à garantir la justice, la protection des droits fondamentaux et la responsabilité des acteurs, dans un cadre souverain et respectueux des valeurs africaines.La transformation de l’Autorité du Liptako-Gourma en un outil plus opérationnel et plus intégré témoigne également de la cohérence du projet AES.
En élargissant ses missions et en la dotant de nouvelles prérogatives, les Etats confédérés entendent faire de cet espace transfrontalier un pôle de développement, de sécurité et de coopération. Cette approche territoriale répond aux besoins concrets des populations et renforce la présence de l’Etat dans des zones longtemps marginalisées.
Sur le plan économique et financier, la création de la Banque d’investissement de l’AES qui sera inaugurée à Bamako lors de cette session ouvre des perspectives structurantes. Elle vise à financer des projets stratégiques dans les domaines des infrastructures, de l’agriculture, de l’énergie et de l’industrialisation. En mobilisant des ressources endogènes et en orientant l’investissement vers les priorités régionales, cette banque constitue un levier essentiel pour la transformation économique et la réduction de la dépendance extérieure.
Enfin, la diplomatie confédérale s’emploie à corriger le narratif souvent biaisé sur le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Par une parole décomplexée, des partenariats diversifiés et une présence affirmée sur la scène internationale, l’AES défend le droit de ses peuples à choisir librement leur destin. Cette diplomatie de souveraineté vise à rétablir la vérité des faits, à valoriser les efforts consentis et à bâtir des relations fondées sur le respect mutuel et l’égalité.
La marche de la Confédération AES vers la souveraineté est en cours. Elle exige constance, patience et unité. Les Burkinabè, Maliens et Nigériens sont donc appelés à se mobiliser, à soutenir leurs chefs d’Etat et à s’approprier ce projet commun. Car l’indépendance véritable se construit collectivement, par l’engagement, la vigilance et la foi en un avenir sahélien libre, digne et souverain.
Par Assetou BADOH






