Pour éviter la propagation du coronavirus (COVID-19) au Burkina, le président du Faso, dans une adresse à la nation prenait une batterie de mesures-barrières le 20 mars 2020. Depuis cette date, des mesures de restriction dans les maquis, bars et restaurants sont édictées. Des restrictions qui ont entrainé certains maquis de la ville de Dédougou à l’arrêt de leurs activités et mettre leurs employés au chômage.
Maïmounata Rouamba, âgée de vingt ans environ, est une hôtesse d’un maquis- restaurant dans la ville de Dédougou. Elle gagne sa vie à la tâche, c’est-à-dire en fonction du travail fait. Avec la panoplie de mesures-barrières de restriction prises par le chef de l’Etat, Roch Marc Christian Kaboré, pour éviter la propagation de la pandémie du coronavirus (COVID-19), son lieu de travail a mis la clef sous le paillasson. La jeune adolescente s’est retrouvée du jour au lendemain sans emploi. Les jours se suivent et se ressemblent avec son corolaire de misère pour l’hôtesse de bar qui confie traverser une période difficile, voire pénible. Le visage attristé, les yeux hagards et pleins d’interrogations, Maïmounata Rouamba, ne cache pas son amertume et la misère qu’elle vit à la suite de la fermeture du maquis-restaurant dans lequel elle travaille. « Je n’ai plus de travail. Par conséquent, pas de revenus pour me prendre en charge. Souvent, je passe par des acrobaties pour avoir de quoi manger », confie-t-elle presque larmoyante. Tout comme la vingtaine, ils sont nombreux les employés des maquis et bars-restaurants qui confient traverser une période de désert en ces temps de COVID-19.
« La situation est dure à tel point que nous n’avons pas de quoi manger ni payer nos loyers. Pire, avec la quarantaine, l’on ne peut pas rejoindre nos familles. Moi je suis de Tchériba (ndlr localité située à une cinquantaine de km de Dédougou sur l’axe Dédougou-Koudougou) mais je ne peux pas rentrer à cause de la quarantaine malgré les appels incessants des parents », renchérit Fatoumata Bayoulou, une autre hôtesse de maquis dans la cité de Bankuy. Cuisinier au maquis « Oasis » de Dédougou, Patrice Dayo, confie vivre péniblement cette fermeture de son lieu de travail. « En temps normal, on pouvait faire des recettes de plus de cent mille F CFA la journée, mais aujourd’hui avec l’arrêt des activités, c’est la galère. En dehors de quelques commandes qui ne nous permettent même pas d’avoir dix mille F CFA, il n’y a pas de ventes », lance tout déboussolé le cuisinier Patrice Dayo.
Traverser dignement cette période difficile
« Je suis un disque joker (DJ) qui mange dans le micro quand les maquis fonctionnent. Maintenant que les lieux sont à l’arrêt pour cause de COVID-19, que devenons-nous ? », s’interroge Ousmane Bâ dit Kampti Bâ « La Résolution » avant de s’apitoyer sur le triste sort des hôtesses qui vivent plus durement la situation. « Il est certes, vrai que l’arrêt de travail nous est préjudiciable, mais il l’est beaucoup plus pour les filles qui sont plus vulnérables et plus exposées.
Si rien ne change, ces filles peuvent facilement basculer dans la prostitution par contrainte », se convainc le DJ du maquis Oasis. La cinquantaine d’employés de ce maquis reconnu pour son poisson braisé dans la cité de Bankuy, selon le gérant Pierre Sidibé, sont mis à la porte depuis les mesures restrictives pour faire face au coronavirus. « Depuis les mesures de restriction, le patron a préféré fermer le maquis pour éviter tout risque. Du coup, les employés sont au chômage. Si cette situation perdure, elle peut entraîner les filles à la débauche », regrette Pierre Sidibé. Autre maquis, mêmes réalités. Au maquis « La Consolatrice » de Dédougou, la dizaine de serveuses a été aussi remerciée en attendant la reprise, aux dires du gérant Salomon Coulibaly. « C’est un coup de massue que nous avons tous reçu. Il faut reconnaître que les maquis et bars restaurants sont en quelque sorte des espaces de rencontres et de loisirs où les gens viennent se retrouver pour échanger autour de la bouteille et se distraire. Ce n’est seulement pas une histoire d’alcool. Et la mesure d’interdiction de se regrouper dans les maquis vient changer la donne si bien que les clients se font rares. Conséquence, nous avons dû fermer et mettre nos serveuses au chômage technique en attendant une réouverture pour pouvoir les réengager », martèle Salomon Coulibaly.
Même si ces acteurs vivent difficilement ces mesures « drastiques » qui ne visent qu’à stopper la propagation du COVID-19, ils reconnaissent dans leur ensemble que ce n’est la faute à personne. « Individuellement, l’on ne peut pas nous plaindre du moment où c’est une question de santé publique qui concerne tout le monde entier », admet le gérant du maquis « La Consolatrice » de Dédougou. Tout de même, ces victimes collatérales du coronavirus souhaitent une assistance qui pourrait leur permettre de traverser dignement cette période difficile de leur vie.
Kamélé FAYAMA