L’ancien Président de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, en exil depuis une année, a décidé de revenir au bercail. Cela pour, dit-il, contribuer à la recherche de solutions face à la « déliquescence qui gangrène tous les secteurs de la vie nationale ». En effet, cette décision de l’ancien président, pour le moins surprenant, intervient à un moment où son pays se trouve dans des démêlés politico-militaires, après son invasion par le groupe armé AFC/M23 de Corneille Nanga, qui tente, de jour en jour, de consolider ses positions dans le conflit qui l’oppose à l’armée congolaise, dans l’Est du pays.
On se rappelle que M. Kabila, qui a été à la tête du pays pendant 18 ans, avait quitté la RDC par souci de sécurité personnelle pour s’établir en Afrique du Sud, la nation arc-en-ciel. Si la date exacte de son retour imminent n’a pas encore été précisée, l’information suscite déjà des réactions, des supputations tant au sein de la population, des acteurs politiques que dans le milieu des observateurs de la situation de crise que traverse le pays. En effet, l’initiative de rentrer au pays rappelle aux uns et aux autres le rôle crucial qu’a joué Kabila au sein du paysage politique congolais et interroge sur ses véritables desseins.
Des réactions qui valent leur pesant d’or, ce d’autant plus que l’ex-président a indiqué qu’il regagnerait la RDC par la partie orientale du pays, fief de la rébellion de AFC/ M23 qui occupe militairement et administrativement les grandes villes de la région. Quelles peuvent être donc les implications véritables d’un tel come-back, dans ce contexte de crise politico-militaire où aucune solution concrète ne se profile à l’horizon. Joseph Kabila envisage-t-il revenir s’impliquer personnellement pour apaiser le conflit dont il a toujours critiqué la gestion par le Président Félix Tshisekedi ? Dans ces incertitudes, il est loisible de se demander si Kabila saura créer une dynamique de réconciliation ou attiser les rancœurs déjà tenaces ?
Autant d’interrogations qui signifient que le retour annoncé de Joseph Kabila renferme de multiples enjeux aussi bien politiques que sécuritaires. En tous les cas, les élucubrations vont bon train dans le milieu de la scène politique congolaise. Chacun y va de ses analyses, des plus pertinentes au plus saugrenues, sur ce retour « stratégique » dans un contexte troublé. Si certains Congolais estiment que Joseph Kabila, comme tout autre citoyen, a le droit de revenir et de s’installer où bon lui semble dans son pays, nombreux sont ceux qui consi-dèrent que son retour par l’Est, contrôlé par des rebelles, confirmerait les accusations du Président Félix Tshisekedi, selon lesquelles Kabila soutiendrait les rebelles.
A tort ou à raison, son retour pourrait être perçu par bien de citoyens comme un appui déguisé à certaines factions de combattants. Toute chose qui pourrait également crisper davantage le climat socio-politique et influer sur les initiatives de médiation. A contrario, vu sous un autre angle, le retour de l’ex-président pourrait également galvaniser les forces loyalistes et renforcer ainsi la position des Forces armées nationales (FARDC) dans leur lutte de reconquête du territoire déjà occupé par les groupes armés. Ce qui est certain, c’est que le retour de M. Kabila, figure incontournable du landerneau politique congolais, aura un impact sur le pays déjà fortement fragilisé et en proie à de nombreux défis. En attendant, les regards sont tournés vers le nouveau médiateur désigné par l’Union africaine (UA), le Président togolais, Faure Gnassingbé sur qui les Congolais fondent, dorénavant, leur espoir pour un retour définitif de la paix.
Soumaïla BONKOUNGOU