Le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) a organisé, le vendredi 9 octobre 2020 à Ouagadougou, une cérémonie au cours de laquelle il a lancé officiellement le rapport 2019 sur l’état de la corruption au Burkina Faso.
La police municipale est le service public le plus corrompu, selon le rapport 2019 du Réseau national de lutte anti-corruption (RENLAC). Sur un échantillon de 251 cas, elle totalise un taux de corruption de 64,9%. L’activité concernée est le contrôle de la circulation urbaine. L’information a été donnée, le vendredi 9 octobre 2020 à Ouagadougou, lors de la cérémonie de lancement du rapport 2019 sur l’état des lieux de la corruption au Burkina Faso. La douane, la police nationale, la Direction générale des transports terrestre et maritime (DGTTM) et la gendarmerie occupent respectivement les 2e, 3e, 4e et 5e places.
Le rapport est structuré, d’une part, autour du résultat d’une enquête d’opinion des populations semi-urbaines sur la fréquence de la corruption et sur ses facteurs déterminants. D’autre part, il fait une revue des actions de lutte anti-corruption, entreprises par les acteurs étatiques et non étatiques. La présentation des résultats du sondage a permis de constater que la corruption est un phénomène qui prend des proportions inquiétantes au pays des Hommes intègres. Certains services ont amélioré leur classement en 2019 comparé à celui de 2018. Il s’agit de la Douane qui est passé de 1er en 2018 à 2e en 2019, la DGTTM de 3e en 2018 à 4e en 2019, la gendarmerie du rang de 4e en 2018 à 5e en 2019. Par contre, d’autres ont vu leur situation se dégrader. Il s’agit de la police nationale qui était au 5e rang en 2018 et au 3e en 2019 et du Centre de contrôle des véhicules automobiles.
Plus de 75,7% des personnes enquêtées estiment que « le phénomène est fréquent, voire très fréquent », révèle le rapport. « Ce résultat met clairement en exergue le fait que la gouvernance actuelle n’a jamais produit les résultats escomptés en matière de lutte contre la corruption », selon le secrétaire exécutif du RENLAC, Sagado Nacanabo. En effet, le rapport constate que l’année 2019, tout comme les précédentes, s’est traduit par le “manque d’engagement et d’exemplarité” de l’exécutif et “l’impuissance” des structures de contrôle de l’Etat face à la gangrène, selon lui. L’analyse des actions au sommet de l’Etat et dans l’administration publique le prouve à suffisance.
« Asseoir une gouvernance vertueuse »
Certains membres du gouvernement, selon le rapport, perçoivent des émoluments en violation du décret N°008-891/PRES/PM/MEF du 31 décembre 2008, portant rémunération du Premier ministre, des présidents d’institutions et des membres du gouvernement. Selon le décret, toutes les hautes personnalités qui occupent les mêmes fonctions quels que soient leur provenance professionnelle et le niveau de rémunération antérieurement acquis, perçoivent la somme totale d’un million cent cinquante-cinq mille (1 155 000) FCFA. « Or, dans le gouvernement actuel formé le 24 janvier 2019, une vingtaine de ministres serait ainsi dans cette pratique », a dévoilé le rapport.
Le secrétaire général du RENLAC a interpellé les différents acteurs à asseoir une gouvernance vertueuse. Pour sa part, il a souligné que « ce constat malheureux semble résumer l’action politique et partisane en un moyen d’enrichissement personnel ». Dans cette lancée, il a formulé sa satisfaction pour cette modeste contribution du REN-LAC. Toutefois, M. Nacanabo a regretté la résurgence de la crise morale à la veille des élections couplées du 22 novembre prochain. Car, a-t-il poursuivi, le spectacle auquel s’adonnent des hommes politiques, est orienté sur un fonds d’achat de consciences. « Ce constat malheureux semble, aujourd’hui, résumer l’action politique et partisane en un moyen d’enrichissement personnel, suivant la logique de l’argent pour le pouvoir et le pouvoir pour l’argent », a fait savoir le premier responsable de l’organe de lutte anti- corruption. Par ailleurs, quelques recommandations ont été faites à l’endroit des acteurs étatiques notamment la poursuite du renforcement de l’arsenal juridique de prévention et de répression de la corruption.
Il est recommandé aux acteurs non étatiques d’être plus incisifs dans la traque et initier un plaidoyer auprès du gouvernement pour l’adoption de décrets d’application de la loi. Enfin, à l’endroit des services perçus comme les plus corrompus, il urge d’instituer des contrôles réguliers au niveau des activités, des séances de sensibilisation aux méfaits de la corruption et dénoncer les agents fautifs en leur sein.
Achille ZIGANI
(Collaborateur)