En un an, Hugues Fabrice Zango est passé de simple athlète à une star mondiale. Champion du monde en salle, médaillé d’or aux 12e Jeux africains, médaillé de bronze aux championnats du monde, le triple sauteur burkinabè de 26 ans a mis tout le monde d’accord. Dans l’Hexagone, sa terre d’accueil et dans son Burkina natal, il ne passe plus inaperçu. Les sociétés, les autorités, les écoles… bref, tout le monde veut s’afficher à ses côtés. C’est le constat fait après une journée passée en sa compagnie.

Le temps est beau en cette matinée du jeudi 10 octobre 2019, à Ouagadougou, la capitale burkinabè. En effet, une bonne pluie est tombée la nuit dernière. A 6h 20, Hugues Fabrice Zango, le triple sauteur, quitte son domicile familial sis au quartier Katr-yaar. Il entame sa journée par la visite d’une école, le groupe scolaire l’Académie, situé dans le quartier voisin appelé Karpala. Tee-shirt noir, pantalon jean de même couleur, training blanc, seul dans son véhicule blanc, il parcourt la petite distance d’à peine 4 kilomètres en moins d’une demi-heure. A l’entrée de l’établissement, une haie d’honneur est formée par une centaine d’élèves parés dans leurs tenues scolaires de couleur bleue. Dès que le médaillé de bronze des derniers mondiaux franchit le portail, une salve d’applaudissements accompagnés de cris «champion, champion, champion» l’accompagnent jusqu’au mât du drapeau, planté à environ 200 mètres de la porte principale de l’établissement. Au pied du mât, deux autres groupes d’élèves l’attendent pour la montée des couleurs. Après l’exécution de l’hymne national le Ditanyè, Hugues échange quelques mots avec ses hôtes. Il rappelle à ses jeunes admirateurs qu’il a obtenu son BEPC en 2009 dans ledit établissement. Année au cours de laquelle il était le meilleur au BEPC sur le plan national. Il exhorte ses jeunes frères et admirateurs à plus d’ardeur et d’abnégation dans les études s’ils veulent suivre son exemple. «Je ne saurais vous donner les clés du succès parce que je ne sais pas si j’ai réussi ou pas. Mais de par mon expérience, je peux vous affirmer que seul le travail paie», confie en toute humilité le champion.

Toujours resté humble

Après ce bref entretien, il est reçu par le directeur de l’école, André Eugène Ilboudo, avant de prendre la direction du quartier Ouaga 2000. A cause des bouchons à cette heure matinale, il met une heure en route pour arriver à destination. A l’entreprise Québec Machines, l’arrivée de la star de l’athlétisme burkinabè est passée presqu’inaperçue. Simple présentation au secrétariat et Fabrice patiente une quinzaine de minutes avant d’être reçu par le patron. Il est ensuite admis dans une salle de classe d’une cinquantaine d’adultes. Une brève présentation de l’hôte du jour est faite. Face à ces élèves d’un autre âge, Fabrice tient un discours similaire à celui tenu à ses jeunes frères de l’Académie. Ses interlocuteurs, bien curieux, l’assaillent de questions en retour. Comment faire pour atteindre un tel niveau ? Combien gagne un 2e vice-champion du monde ? Le cœur du triple sauteur est-il pris ? etc. Une séance de photos met fin à la rencontre. Et la personnalité sportive de l’Association des journalistes sportifs du Burkina 2019 de se démener dans les artères de Ouagadougou pour rejoindre le ministère des Infrastructures où il doit être reçu par le premier responsable du département. Il s’entretient une trentaine de minutes avec des amis trouvés sur place sous les arbres ombragés du ministère, avant d’être invité à prendre pied dans la salle d’attente. Au bout de dix minutes, le ministre des Infrastructures, Eric Bougouma, vêtu d’une tenue traditionnelle, sourire aux lèvres, reçoit son hôte. Fabrice lui explique brièvement comment s’est déroulée l’épreuve du triple saut des championnats du monde d’où il est sorti médaillé de bronze. Il présente au ministre Bougouma le métal qu’il avait par devers lui. Après l’avoir contemplé, le ministre prodigue des conseils au champion du triple saut. Il lui demande de toujours rester humble et d’éviter toute distraction qui pourrait l’éloigner de la voie du succès.

«Assez fatiguant»

Pas de répit pour Fabrice en cette journée puisque du ministère, il reçoit un appel des animateurs de l’émission l’Apéro de la télévision nationale pour un rendez-vous qu’il doit honorer à 12h 30. Un quart d’heure plus tard, le voilà sur le plateau. Il égaye durant 1h 30 mn les téléspectateurs. A peine l’émission terminée, il reçoit encore d’autres coups de fil. «Ce sont des collègues de bureau d’anciens athlètes qui m’ont beaucoup soutenu quand j’étais au stade du 4-Août et également mon ancien coach Christian Sanou qui avait souhaité que je vienne rencontrer ses collaborateurs», nous informe-t-il. Ces derniers veulent se rassurer que le rendez-vous prévu pour 13h est maintenu. L’athlète tient à honorer ces deux rendez-vous, en dépit du retard. C’est autour que 15h que la demi-journée du recordman d’Afrique prend fin. Le temps de prendre un repas et une petite pause, le cap est mis sur le stade du 4- Août.

«Casser toute barrière»

Dans cette cuvette du temple du football burkinabè, il rencontre dans la nuit tombante de jeunes athlètes. Ce sont une trentaine d’athlètes, d’encadreurs, membres de la Ligue du Centre d’athlétisme et de la fédération qui échangent avec le triple sauteur de renom. Sans tabou, Hugues Zango discute durant une heure de temps. « J’ai partagé mon expérience avec eux. Ils m’ont vu grandir. Il fallait que nous nous parlions. Certains d’entre eux ont été mes concurrents quand j’étais encore au stade du 4-Août. Maintenant, ils ont l’impression que je suis loin. Mais j’ai voulu casser toute barrière pour leur dire que tout le monde peut y arriver avec un sens de la rigueur », explique-t-il. Il indique avoir une totale confiance aux encadreurs du stade du 4-Août qui «peuvent amener les athlètes aux portes du haut niveau ». C’est après le stade du 4- Août que nous prenons congé de Hugues Fabrice Zango. Il s’apprêtait à aller honorer un dîner au cours duquel notre présence n’était pas souhaitée. Pourquoi et avec qui ? « Je ne vous dirai pas avec qui. Mais rassurez-vous, ce n’est pas avec une fille, ne vous inquiétez pas. (Rires). C’est un dîner d’affaires», s’amuse-t-il. Bien qu’éprouvante, le champion en triple saut soutient que la journée a été riche d’autant plus qu’il a échangé avec des personnes aimables.

Yves OUEDRAOGO

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