Beaucoup de jeunes, à leur enfance, ont pu suivre des matchs de football à travers une porte d’entrée spécifique des stades, mais ignorent qu’elle a une histoire. Il s’agit de la porte n°13 d’abord du stade municipal puis par la suite au stade du 4-Août.

Un jour de l’an 1972 au stade municipal de Ouagadougou, une rencontre du championnat national de football de D1 met aux prises deux clubs rivaux de la capitale: l’EFO-l’ASFA-Y. Pour qui connait ce derby de la capitale, il attire des foules. Pour pouvoir assister à cette rencontre, il faut débourser 50 FCFA pour les enfants et 100 pour les adultes. Pour les tout-petits qui ne disposent pas de cette somme, il fallait prendre place sur les arbres (caïlcédrat) dressés tout autour du stade. Ce jour-là, survint un drame. Un enfant ressortissant du quartier Zangouetin tombe d’un arbre et décède sur-le-champ. Le Mogho Naaba de l’époque, Naaba Kougri, est alerté. Après avoir constaté les faits avec les organisateurs du match, il interdit désormais que les arbres soient transformés en gradins et somme les organisateurs à trouver une solution palliative. Sur place, l’on permet aux enfants d’accéder gracieusement au stade à partir de la porte n°13 pour suivre le reste de la partie. Ainsi venait de naître l’histoire de cette porte, devenue mythique pour les enfants de Ouagadougou. Boureima Ouédraogo a assisté à la scène ce jour-là. Il précise que le Mogho Naaba en personne est venu sur les lieux. « A cause des événements qui ont eu lieu ce jour-là, je ne me suis même pas rappelé du score du match », indique-t-il. Tout compte fait, il est l’un des instigateurs parmi tant d’autres enfants de l’époque de la gratuité d’entrée au stade pour les enfants. Par la suite, après l’inauguration du stade du 4-Août en 1984, la même porte a encore été réservée aux enfants.

« Mouka » et les enfants

Patrick Zoundi, international burkinabè à la retraite, garde un bon souvenir de la porte n°13. C’était vers les années 1990. Lui et ses camarades quittaient leur quartier Kologh-Naaba à pied pour venir assister aux matchs du championnat et ceux des Etalons au stade du 4-Août. « Arrivés à la porte n°13, vous faites la queue. L’on procède au tri à base de la taille de ceux qui pouvaient accéder au stade », se rappelle l’ex-pensionnaire de Planète Champion international. Selon Patrick Zoundi, l’âge comptait peu. « J’avais un ami très grand par la taille et un peu plus jeune que moi. Lui, ne pouvait pas avoir accès », raconte-t-il. Patrick avoue que le fait d’accéder au stade du 4-Août à partir de cette porte d’entrée lui a permis de rêver et de vouloir faire du football, son métier. « Des joueurs venaient célébrer leurs buts avec nous. Ils nous rendaient fou et nous faisaient rêver. Je me souviens surtout de feu Gabriel Gnimassou dit Garincha et José Mévi Williams », se remémore-t-il. Pour Kassoum Ouédraogo Zico, lui aussi ex- international et actuel fondateur de Kozaf, la porte 13 était tout un symbole pour eux footballeurs de l’époque. « C’est moi qui ai donné vie à la porte n°13 du stade du 4-Août parce qu’à chaque fois que je marquais un but, je partais le célébrer avec les tout-petits en leur lançant des bonbons », relate l’ancien joueur de l’EFO. Zico justifie ses gestes par le fait que lui aussi a été spectateur assidu de la porte 13.« Même si à notre temps au stade municipal, ce n’était pas dans les mêmes conditions », assure-t-il. Ambroise Tiemtoré a la cinquantaine bien sonnée. Lui aussi a fréquenté la porte n°13. Supporter puis joueur de l’USO, il se souvient d’un sourd muet plus connu sous le nom de « Mouka » qui y faisait la loi. « Il était de ceux qui géraient les entrées des enfants. Il était craint par cette franche jeune », informe Ambroise. Il se rappelle que ceux ayant une taille un peu élancée et qui voulaient tromper la vigilance de « Mouka » recevaient des coups de fouets. Près de 50 ans après, force est de constater que la porte 13 est désespérément vide, surtout lors des matchs du championnat national de football. Les tout-petits ont déserté leurs gradins comme leurs aînés qui boudent les rencontres du Faso foot. Seuls les grands matchs des Etalons réunissent les enfants dans les gradins qui leur sont dédiés.

Yves OUEDRAOGO

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