Le pays du Soleil levant abrite du mercredi 28 au vendredi 30 août, la 7e édition de son sommet triennal, la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD). Cette grand-messe de la coopération entre l’archipel asiatique et le continent africain, initiée, depuis 1993, se veut une tribune de renforcement, voire d’affirmation des liens économiques entre les deux entités. Dans un contexte mondial de baisse des échanges commerciaux, et où les regards des grandes puissances se tournent de plus en plus vers les immenses ressources africaines, le Japon ne veut pas rester en marge de cette course effrénée pour investir dans le berceau de l’humanité. L’Afrique à elle seule représente l’avenir, du fait de son potentiel humain et économique. Et les dirigeants nippons l’ont compris depuis plus de deux décennies. C’est donc à Yokohama que le pays du Soleil levant donne l’occasion à l’Afrique d’étudier les voies et moyens à même de donner un souffle nouveau à leur coopération. Le thème évocateur du face-à-face : «Faire progresser le développement de l’Afrique à travers les hommes, la technologie et l’innovation», vise à diversifier l’éventail des partenariats commerciaux entre le Japon et l’Afrique. Déjà, depuis 2007, les Investissements directs à l’étranger (IDE) du Japon sont passés de 3,9 milliards à 10 milliards de dollars en 2016 et le nombre d’entreprises japonaises y opérant est ainsi passé de 520 en 2010 à 796 en 2017. A voir de près, ce rapprochement du Japon de l’Afrique, nourrit aussi l’ambition de concurrencer son rival chinois. Lors de la Ticad VI, le pays s’était engagé à soutenir à hauteur de 30 milliards de dollars les investissements publics et privés africains dans les infrastructures. Il y a un an, lors du sommet Chine-Afrique, Pékin avait promis, lui, le double. Mais plutôt que de se lancer dans une course aux chiffres, le Japon use d’une «diplomatie silencieuse et non-impliquée», promouvant à la clé, des investissements «de qualité» et de «développement des ressources humaines locales». Sans perdre de vue que chaque puissance a ses intérêts économiques à satisfaire, il faut reconnaître que cette concurrence ouverte entre les grandes économies du monde, «fait l’affaire» de l’Afrique. Reste que les dirigeants africains, de manière concertée, doivent en tirer le maximum de profit, en orientant ces investissements étrangers vers le développement des ressources humaines, la formation professionnelle et la croissance des Petites et moyennes entreprises (PME) notamment. Le TICAD VII promet un prêt de 3,4 milliards d’euros pour la construction d’éoliennes en Egypte et de centrales géothermiques au Kenya et à Djibouti. Une seconde enveloppe d’environ 2,6 milliards d’euros serait destinée à d’autres projets d’infrastructures, «de qualité». Des cadeaux certes, mais dont la contrepartie, renvoie, à notre sens, à «fortifier» l’économie nipponne et à rechercher le soutien des pays africains pour obtenir un siège au Conseil de sécurité des Nations unies. Il convient donc de parler «business» avec le secteur privé nippon, et non plus «d’aide» avec les établissements publics. Parce qu’il est grand temps que le financement privé prenne la relève du secteur public, à travers des partenariats publics-privés pour surtout transformer la production africaine sur place, si possible avec l’aide d’industriels et investisseurs étrangers.
Jean-Marie TOE