Un siècle de sacrifices à préserver !

Le peuple burkinabè a commémoré, hier 11 décembre 2019, les 100 ans de la création de son pays, autrefois Haute-Volta et le 59e anniversaire de son accession à la souveraineté nationale et internationale sous le thème : «Cent ans de la création du Burkina Faso : devoir de mémoire et engagement patriotique en vue de la consolidation de l’Etat-nation». Des grandes révoltes contre l’oppression coloniale à la création de la colonie de Haute-Volta, le 1er mars 1919 à nos jours, en passant par sa dislocation en 1932, sa reconstitution en 1947, l’indépendance du pays en 1960 et le changement d’appellation en 1984 (Burkina Faso), l’histoire du pays nous enseigne que sa consolidation a été marquée par un sursaut patriotique spontané et une détermination constante afin de réserver aux générations à venir, une nation résiliente et digne d’où le nom pays des Hommes intègres.
Le hic, c’est qu’au moment où les Hommes intègres fêtent cet héritage vieux d’un siècle, leur Nation vit l’une des étapes les plus sombres de son parcours. En effet, jamais, autant de Forces de défense et de sécurité (FDS) et de civils ne sont tombés face à un ennemi inconnu et invisible dans une violence inouïe.

A cette guerre asymétrique sans merci, s’ajoutent une fronde sociale à son pic et un front politique sans pitié. A cette allure, que va-t-on réserver aux générations futures, si l’on sait que l’ennemi menace la Nation jusque dans son fondement, son intégrité territoriale ? Qu’avons-nous fait de l’héritage de patriotisme, d’engagement collectif et d’union sacrée pour défendre l’intérêt général que nos devanciers nous ont légué ? Sommes-nous sûrs de pouvoir transmettre aux générations montantes et futures cette dignité, cette bravoure et cette communauté de destin dont nous nous ventons ?

Quand les grandes nations sont prises à partie, ses fils et filles ont toujours su faire fi de leurs divergences et querelles intestines, pour faire face à l’ennemi commun. Parce que «Personne n’a d’avenir dans un pays qui n’en a pas», comme le disait sous forme de slogan, l’émérite journaliste d’investigation Norbert Zongo. Cette vérité et cet appel à la responsabilité individuelle et collective des Burkinabè est d’autant plus d’actualité que l’avenir de la Nation est menacée. Elle doit être comprise par tous parce que nos ambitions et projets personnels sont appelés à mourir au pied de l’insécurité, si rien n’est fait. Il suffit de penser à la situation des déplacés internes pour s’en convaincre.

Il est donc temps pour chaque Burkinabè, au lieu d’entonner l’Hymne national comme n’importe quelle autre chanson, le poing levé, de scruter et de soupeser chacun des mots qui le composent, mais surtout de s’inspirer de son sens profond comme la boussole de ses actions quotidiennes. Parce qu’aujourd’hui, le terrorisme qui frappe de façon aveugle le Burkina Faso n’est rien d’autre que la «férule humiliante», la «rapacité venue de loin» et la «cynique malice». Le Ditanyè (hymne de la victoire) le dit si bien : «les échecs, les succès, la sueur et le sang ont fortifié notre peuple courageux et fertilisé sa lutte héroïque». C’est dire que malgré cette adversité, nous devons être en mesure de nous surpasser, de nous réconcilier, pour préserver notre communauté de destin, notre vivre-ensemble.
A défaut, l’histoire retiendra que nous avons failli à notre devoir et à notre responsabilité, incapables que nous avons été, de servir de courroie de transmission d’un précieux trésor, vieux de 100 ans que les générations successives ont jusque-là jalousement préservé et transmis à leurs successeurs. Les Burkinabè de demain y ont droit.

Jean-Marie TOE
jmt16j@gmail.com

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