Lutte contre le paludisme : KAF 156, une nouvelle combinaison antipaludique

Grâce à un partenariat entre l’Europe et des pays en voie de développement pour les essais cliniques (EDCTP) du KAF 156 (une nouvelle combinaison antipaludique), un financement de 10 millions d’euros sur cinq ans vient d’être acquis dans le cadre du projet « WANECAM 2 (réseau ouest-africain d’essais cliniques d’antipaludéens) ».

Il s’agit d’une collaboration unique entre les chercheurs sur les médicaments antipaludiques d’Afrique et d’Europe, originaires de 10 établissements universitaires, une société pharmaceutique (Novartis) et un partenariat à but non-lucratif dont l’objectif est de favoriser le développement de nouveaux médicaments (Medicines for Malaria Venture (MMV).

La recherche dans le cadre de la lutte contre le paludisme avance à grands pas. Dans ce sens, le consortium WANECAM (Réseau d’Afrique de l’Ouest pour les essais cliniques sur les médicaments antipaludiques), dix organisations universitaires basées en Afrique et en Europe collaborent avec l’organisme à but non-lucratif Medicines for Malaria Venture (MMV) et la société pharmaceutique Novartis pour développer son composé KAF156 en combinaison avec une nouvelle formulation de luméfantrine.

Une véritable révolution qui marque un tournant décisif dans la lutte contre le paludisme. Financés à hauteur de près de 6,5 milliards de francs CFA par le partenariat Europe-Pays en développement pour les essais cliniques (EDCTP), ces essais seront réalisés dans quatre pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique central.

Il s’agit du Burkina Faso, du Gabon, du Mali et du Niger. « Nous accueillons favorablement le soutien généreux de l’EDCTP et sommes reconnaissants de son engagement à long terme en faveur du développement clinique en Afrique et plus particulièrement de leur soutien à la recherche clinique dans les maladies sévères comme le paludisme. Ce soutien est vital pour accélérer le développement de ce nouveau composé indispensable », a dit dans un communiqué conjoint publié hier 15 avril 2019, le coordonnateur du projet Réseau ouest-africain d’essais cliniques d’antipaludéens (WANECAM), Pr Abdoulaye Djimdé, chercheur principal à l’Université des Sciences, des Techniques et des Technologies de Bamako.

Pour lui, la collaboration africaine avec un groupe d’experts internationaux dans le cadre de ce programme peut permettre de garantir que les essais soient achevés rapidement et conformément à des normes de qualité supérieures. « Etant donné l’existence d’informations selon lesquelles il existe une résistance à l’artémisinine et aux combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (ACT), il est essentiel de disposer de nouveaux médicaments antipaludiques prêts à être utilisés », a-t-il précisé.

KAF156, le nouveau composé antipaludique qui va être étudié, pourrait être la première nouvelle classe de composé chimique permettant de traiter le paludisme aigu d’ici à une vingtaine d’années. Il pourrait être administré en combinaison avec la nouvelle formulation de luméfantrine, en dose unique. Cette combinaison est actuellement en phase finale d’essai clinique dans 17 centres de neuf pays d’Afrique et d’Asie. Développée par Novartis, avec un soutien scientifique et financier de MMV (en collaboration avec la Fondation Bill et Melinda Gates), cette combinaison est l’un des sept antipaludiques en phase finale à être développé par MMV dans le cadre de plusieurs partenariats.

La subvention accordée par l’EDCTP permettra de financer deux essais. Un premier essai de phase 2B en 3 cohortes concernera les enfants âgés de 6 mois à 12 ans, les plus jeunes présentant un risque plus élevé de décéder de la maladie et un deuxième essai de phase 3 va concerner les adultes et les enfants âgés de plus de 6 mois.

De l’approche WANECAM

L’étude clinique WANECAM compare l’incidence du paludisme sans complications chez les enfants et les adultes traités avec des ACT répétés sur une période de deux ans. L’étude utilise des populations de trois des pays couverts par le réseau et compare les ACT, pyronaridine-artésunate (PA) et dihydroartémisinine-pipéraquine (DHA-PQP) à artesunate-amodiaquine (ASAQ) ou à l’artéméther-luméfantine (AL).).

Alors que la majorité des essais cliniques se concentrent sur un traitement unique et une analyse de suivi, cette étude reflète plus étroitement les approches réelles du paludisme en suivant les progrès du patient sur une période de deux ans. En pratique, ces ACT seraient utilisés à plusieurs reprises sur plusieurs années pour traiter des cas consécutifs de paludisme chez les mêmes patients.

L’approche WANECAM implique donc de suivre les patients sur une période prolongée et dans un échantillon de grande taille, ce qui permet non seulement une interprétation plus réaliste du fonctionnement de ces traitements, mais également la possibilité d’attraper des effets indésirables rares ou peu fréquents. En plus de comparer l’efficacité des différents traitements, l’essai vise également à atteindre un certain nombre d’objectifs secondaires importants, visant à recueillir des données supplémentaires sur les effets des traitements.

L’évaluation de la sécurité en utilisant chacun des ACT en traitement répété ; la recherche de nouveaux marqueurs moléculaires de la résistance aux antipaludiques ; la comparaison des taux de réinfection et de recrudescence par réaction en chaîne de la polymérase ; la comparaison de l’infectivité des gamétocytes et des taux de clairance des parasites ; et l’impact de l’immunité, de la pharmacocinétique et de la pharmacogénomique feront tous partie de l’étude.

Les études de WANECAM portent sur les ACT, qui associent divers médicaments antipaludiques à l’artémisinine, un composé dérivé de l’armoise annuelle, utilisé comme antipaludique dans certaines régions d’Asie depuis des milliers d’années.

Ils constituent une forme de traitement particulièrement efficace et, en raison de la variation possible lorsqu’il associe l’artémisinine à d’autres médicaments, il est plus difficile pour les parasites du paludisme d’y développer une résistance. L’efficacité peut être encore augmentée en développant de nouvelles combinaisons car comme le souligne Pr Djimdé, plus nous avons d’ACT, mieux c’est pour les patients atteints de paludisme.

Gaspard BAYALA
gaspardbayala87@gmail.com

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