La région du Sahel, depuis plus d’une dizaine d’années, fait face à des troubles sécuritaires qui fragilisent la paix et la cohésion de ses Etats en plombant surtout son essor socio-économique. En réaction à cette situation, de nombreux efforts sont entrepris par les organisations sous régionales et internationales pour sortir cette partie de l’Afrique subsaharienne de ce « bourbier » dans lequel elle s’est empêtrée. Faut-il le rappeler, les pays du Sahel que sont le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Tchad et dans une moindre mesure, la Mauritanie sont confrontés à des attaques terroristes causant de nombreuses victimes civiles et militaires. C’est dans l’optique de mettre fin à cette entreprise meurtrière de guerre, que la Coalition du G5 Sahel a été mise sur pied et regroupe les pays sus-cités, depuis 2017.
Mais, depuis le retrait du Mali et le décès brutal du président Idriss Deby Itno, l’organisation s’est quelque peu fragilisée donnant l’impression d’une quasi inexistence. C’est dans ce contexte que le 6e sommet extraordinaire de cette coalition s’est tenu, le lundi 20 février dernier, à N’Djamena au Tchad. Placée sous le thème « Coopération régionale en matière de développement et de sécurité », la rencontre a été plutôt consacrée à la préservation et à la consolidation de ce cadre de coopération entre les quatre pays et la relance de ses activités.
Toutefois, à y voir de près, cette volonté de relance et de quête d’un souffle nouveau ne sera pas du tout aisée si l’on s’en tient à la réorganisation géostratégique et politique qui se trame dans quelques-uns de ses Etats membres. En effet, au regard du poids de la menace sécuritaire, le Mali (qui s’est déjà retiré) et le Burkina ont décidé de diversifier leur partenariat en se tournant notamment vers la Russie. Or, sans risque de se tromper, ce repositionnement n’est pas de nature à favoriser le climat au sein des Etats membres tels le Tchad et le Niger qui gardent toujours des relations privilégiées avec la France. Que peut alors faire le G5 Sahel, accusé à tort ou à raison d’inefficacité et de léthargie par de nombreux observateurs, pour assurer sa pérennité et atteindre ses objectifs escomptés ? Dans de telles circonstances, quelles innovations majeures cette organisation peut-elle encore faire preuve pour renforcer son intégration, promouvoir son développement socio-économique et relever surtout les énormes défis de son espace commun ? Ces interrogations valent leur pesant d’or. Ce, d’autant plus que depuis qu’il a été porté sur les fonts baptismaux à la grande satisfaction des populations de ses pays, le G5 Sahel n’a pas, sauf erreur d’analyse, encore réussi à faire bouger les choses.
Le moins que l’on puisse dire, sans détours, c’est que le G5 Sahel n’a pas été à la hauteur des attentes des populations de ses pays qui, dans leur majorité, sont toujours sous le joug des affres des attaques terroristes, au quotidien. Les exemples du Mali, du Burkina Faso et du Niger illustrent, à suffisance, cette réalité. Et, malheureusement, le terrorisme est en passe même de se métastaser allègrement vers les pays côtiers constituant une réelle menace pour la sous-région ouest-africaine. Les pays membres du G5 Sahel devraient saisir l’opportunité de ce 6e sommet extraordinaire pour repenser ses stratégies si tant est qu’ils veulent parvenir aux objectifs qui ont concouru à sa création mais aussi avoir l’onction de leurs communautés respectives. Ainsi, plutôt que se limiter à l’organisation de rencontres sans réels impacts sur la lutte contre le terrorisme, le G5 devrait travailler à être opérationnel en déployant sa force conjointe sur le terrain des hostilités. Ce n’est que par cela qu’il parviendra à relever ses défis, à se relancer et occuper la place qui lui revient dans l’espace sahélien. Ainsi, gageons que son nouveau président, le Président de la République islamique de Mauritanie, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, s’inscrive dans cette dynamique pour le bien des populations de cette union.
Soumaïla BONKOUNGOU