Les prix des condiments frais ont connu une hausse vertigineuse ces derniers mois à Bobo-Dioulasso, avec à la clé une chute de la demande. Constat.
La flambée des prix des condiments à Bobo-Dioulasso fait grincer des dents. Au marché de Ouezzin ville, d’ordinaire bouillonnant règne un calme inhabituel à 10 heures en ce mois de juin. Les vendeurs, visages marqués par l’inquiétude, peinent à attirer les clientes. Ces dernières font le tour des étalages, mais ne savent pas quoi acheter. Celles qui prennent le temps de marquer un arrêt devant les tables se contentent de regarder ou de toucher les condiments sans pour autant en acheter. Assise derrière ses étals, la commerçante Aïcha Sanou, entourée de son tas de tomates, ne cache pas son amertume. « Depuis le matin, rien ne s’achète, les clients sont rares et tout est au ralenti. Les clients sont absents », se lamente-t-elle. Selon dame Sanou, le prix de la caisse de tomate qu’elle prenait entre 30 000 et 35 000 F CFA chez les grossistes a explosé à 90 000 F CFA. Et de poursuivre qu’elle cède le tas de quatre tomates à 200 F CFA ou 500 F CFA pour limiter les pertes. Malgré cela, elle est souvent confrontée à des pertes de plus de 20 000 F CFA du fait de la mévente à chaque approvisionnement. Dossira Sanou, une voisine de stand, confirme ce sombre tableau. «En dix ans de métier, jamais les prix n’ont atteint de tels sommets», révèle-t-elle.
Une autre commerçante du domaine, Djeneba Sanou, fait remarquer que les autres légumes tels que les carottes, les aubergines, le haricot vert ne sont pas épargnés. Toutefois, elle souligne qu’en fonction des périodes, les prix varient. A titre d’exemples le haricot vert pendant sa période d’abondance est vendu entre 300 F CFA et 500 F CFA la boite, mais actuellement il est cédé à 2 000 F CFA parce que ce n’est pas la période. Mêmes les feuilles, à l’en croire passent de 25F à 100F le tas. Elle dit vendre des carottes importées à 1000 F CFA le lot, faute de production locale actuellement. Barakissa Zonou, une vendeuse de gombos frais, dit s’approvisionner auprès des producteurs. Dans un aveu d’impuissance, elle parle de pénurie et de coûts exorbitants de ce légume.
Elle demande au gouvernement un soutien accru aux agriculteurs pour stabiliser les prix. « Ainsi ces agriculteurs feront de bonnes récoltes et les prix des marchandises seront
réduits », se convainc Mme Zonou. Car les clients ont du mal à faire le marché. C’est le cas de la ménagère Bintou Palm consternée par la situation. «Avec 1500 F CFA, impossible de cuisiner correctement. Tout est hors de prix », déplore-t-elle.
Un soutien du gouvernement
De son avis, la cherté des condiments est due en partie à l’insécurité qui empêche les activités maraîchères à certaines localités de la région des Hauts-Bassins. Toute chose qui porte un coût à la disponibilité des condiments sur les marchés. Un tour dans un jardin potager au secteur 6 de Kuinima, confirme que la situation est tout aussi préoccupante au point qu’il ne faut pas écarter la question des aléas climatiques qui ont un impact considérable sur la production. Après tant d’efforts fournis pour préparer son jardin potager, les parcelles du producteur maraîcher Ibrahim Sanou présentent toujours un visage aride. Des jeunes pousses de tomates, d’aubergines et bien d’autres ne rassurent pas d’une bonne récolte selon le producteur. «Le manque d’eau retarde nos récoltes cette année. Le changement climatique en est la principale cause», déclare-t-il. Dans sa tentative d’explication de la sous-production, il pointe du doigt, la faible pluviométrie qui a entrainé le tarissement précoce des puits. A quelques pas de là, son voisin Siaka Sanou s’appesantit sur les prix des semences qui sont hors de portée, et souvent de mauvaise qualité. Un fléau qui, dit-il serait à l’origine du coup élevé des condiments sur les marchés. « Avant on se procurait cinq grammes de semence de tomate à 1000F CFA. Aujourd’hui cette même quantité est vendue à 6000F CFA », révèle-t-il avec désolation. Même si le jardin du producteur Issa Sanou installé à proximité présente une bonne physionomie avec des cultures florissantes, il rejoint ses pairs dans un appel pressant au gouvernement pour des investissements essentiels à savoir les forages, les semences et les engrais. Car pour lui, tout est crucial pour stabiliser les productions et les prix.
Yéri Augustine LADEDJI
(Stagiaire)