Le président équato-guinéen détient le record mondial de longévité au pouvoir des chefs d’Etat encore vivants, hors monarchies, mais il n’est pas encore prêt à prendre une retraite. Malgré ses 43 ans aux affaires, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo est candidat pour un 6e mandat à la présidentielle du 20 novembre 2022.
Ce scrutin a été récemment avancé de cinq mois, pour être couplé aux législatives, pour des raisons budgétaires. Il n’y a plus de suspense, le vieux loup va défendre les couleurs du Parti démocratique de Guinée équatoriale (PDGE), à cause de son « charisme », de son « leadership » et de son « expérience politique ». L’âge avancé de Nguema Mbasogo, 80 ans, n’est pas non plus un problème pour ses partisans, pour qui son cerveau « fonctionne encore parfaitement ».
Exit donc son fils et vice-président, Teodoro Nguema Obiang Mangue alias Teodorin, pressenti depuis des mois pour le remplacer à la tête de ce petit pays pétrolier d’Afrique centrale. Ce jet-setteur, dont la réputation dépasse les frontières équato-guinéennes, a toujours été considéré comme le dauphin de son père. Incontournable sur la scène politique de son pays, Teodorin devra encore patienter, les caciques du pouvoir clanique et autoritaire ayant estimé que son heure n’a pas encore sonné.
Son géniteur reste dans les bonnes grâces, en dépit du poids de l’âge et ne devra pas trop se dépenser pour conserver son fauteuil. Le chef de l’Etat équato-guinéen et sa famille politique règnent en maitres absolus sur la Guinée équatoriale, où l’opposition est réduite au néant. Il est abonné à des scores à la soviétique aux élections présidentielles, au point d’être indéboulonnable. Nguema Mbasogo devrait demeurer dans cette logique en conservant le trône, à l’issue de la prochaine présidentielle.
Rien ne pourra l’arrêter, surtout pas les quelques opposants de façade ou qui rasent les murs. Nguema Mbasogo a mis le pays sous coupe réglée. Son parti, le PDGE, qui occupe 99 des 100 sièges de la Chambre basse sortante et la totalité des 70 sièges du Sénat, ne devrait pas aussi connaitre une mauvaise fortune. Le président équato-guinéen, qui a accédé au pouvoir en 1979 à la suite d’ un coup d’Etat sanglant contre son oncle, Francisco Macías Nguema, gère le pays d’une main de fer.
Tous ceux qui se mettent en travers de son chemin l’apprennent à leurs dépens. Il est intraitable face aux contestataires et aux opposants qui lorgnent le fauteuil présidentiel. La torture et l’incarcération des opposants pour des motifs pas toujours valables sont monnaie courante. Nombre d’entre eux, du moins ceux qui ont pu échapper aux griffes du régime dictatorial de Nguema Mbasogo, vivent en exil dans différents pays.
Les défenseurs des droits de l’homme sont également persécutés. La répression politique est une triste réalité à Malabo et dans les autres villes du pays. Des ONG, comme Amnesty International, n’ont de cesse de dénoncer la violation des droits humains en terre équato-guinéenne. Une loi interdisant la torture existe depuis 2006, mais n’a jamais été appliquée. Dans un tel environnement liberticide, l’abolition de la peine de mort, le 19 septembre 2022, constitue une avancée, mais il ne faut pas se voiler la face.
Ce progrès ne saurait dissimuler les violations répétées des droits de l’homme en Guinée équatoriale. Le terrorisme d’Etat, comme l’ont qualifié certains observateurs, aura toujours cours dans ce pays. Sur le plan socioéconomique, la situation des Equato-Guinéens n’est pas non plus enviable, malgré les richesses du pays, du reste concentrées entre les mains des barons du régime.
La grande majorité des 1,4 million d’habitants vit sous le seuil de pauvreté, selon la Banque mondiale. Dans ces conditions, on se demande à quoi servira le 6e mandat, presque assuré de Nguema Mbasogo, si ce n’est à perpétuer un système dictatorial. A moins qu’il nous surprenne agréablement…
Kader Patrick KARANTAO