Des détenus de la Maison d’arrêt et de correction de Bobo-Dioulasso (MACB) sont formés aux techniques de production de pagnes traditionnels Faso Dan Fani et Koko Dunda et aux techniques d’élevage de poulets hybrides et de petits ruminants, grâce aux Initiatives présidentielles pour le développement communautaire (IPDC) et pour la Production agricole et l’autosuffisance alimentaire (IP-P3A). Une équipe d’hommes et de femmes de médias est allée en immersion dans ces ateliers de formation au sein de la MACB, vendredi 8 août 2025.
En cette matinée du vendredi 8 août 2025, à l’entrée de la Maison d’arrêt et de correction de Bobo-Dioulasso (MACB), ils sont à la tâche. Assis devant leurs métiers à tisser ou en en train de démêler les fils de coton, une douzaine d’hommes et femmes produisent des pagnes traditionnels Faso Dan Fani. Après un mois de formation au tissage et à la teinture, de décembre 2024 à janvier 2025, la production des pagnes Faso Dan Fani et Koko Dunda n’a plus de secrets pour ces « nouveaux artisans » à statut particulier. Concentrés sur leurs objectifs, leur quotidien ne ressemble en rien à celui d’un prisonnier.

Pourtant, les femmes et hommes à l’œuvre sont bel et bien des détenus de la MACB. Cette opportunité de se former à un métier, ces pensionnaires de la prison de Bobo-Dioulasso l’ont eu grâce à la volonté du Président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, de réformer les prisons burkinabè et de leur donner un visage plus humain. Cet engagement politique est aujourd’hui une réalité et a déjà pris corps à la MACB, à travers les programmes de formation professionnelle des initiatives présidentielles, par l’entremise du Bureau national des grands projets du Burkina (BN-GPB).

En effet, l’Initiatives présidentielle pour le développement xommunautaire (IPDC) a doté, la MACB de 17 métiers à tisser. Ce qui a permis de lancer une phase pilote de formation de 25 détenus et de cinq agents de l’administration pénitentiaire au tissage et à la teinture. Ils sont appelés à leur tour à former d’autres détendus. Prisonnière à la MACB depuis mars 2018, R.O fait partie de cette première cohorte d’apprenants. « Nous avons commencé la formation en décembre 2024. Nous apprenons la teinture, le tissage du pagne Faso Dan Fani et les techniques de production du pagne Koko Dunda. Les travaux d’apprentissage se sont passés dans de bonnes conditions », fait-elle savoir.
« Cette initiative est la bienvenue »
Mme R.O, n’avait aucune idée de ce qu’elle ferait lorsqu’elle va finir de purger sa peine en prison. Mais, grâce à cette formation, une fois en liberté, elle saura quoi faire de ses dix doigts pour se prendre en charge. Mieux, elle pourra être utile à la société, en aidant d’autres personnes à apprendre le métier de la production des pagnes traditionnels. Elle traduit sa gratitude aux initiateurs de ce projet. « Cette initiative est la bienvenue. Je souhaite qu’elle se pérennise pour le bonheur des détenus. Nous ne pouvons que remercié ceux qui ont pensé ce projet de formation à notre profit et qui nous être bénéfique à notre sortie de prison », confie-t-elle.
Outre le tissage et la teinture, les détenus bénéficient également d’une formation en techniques d’élevage de poulets hybrides et de petits ruminants. Et pour ce programme, c’est l’IP-P3A qui accompagne la MACB. « Bien avant l’installation de l’atelier de tissage, nous avons bénéficié d’une bergerie et d’un poulailler de 500 têtes, grâce toujours à l’Initiative présidentielle. Présentement, au niveau du poulailler, nous sommes en notre quatrième phase des poussins. Au niveau des animaux, nous avons reçu cinq béliers et cinq caprins pour l’embouche », fait savoir le contrôleur de sécurité pénitentiaire principal et chef de service production et formation professionnelle de la MACB, Bonko Lomboki. Avec environ 23 ans de séjour en milieu carcéral, T.Z fait partie de la vingtaine de prisonniers ayant été sélectionnée pour bénéficier de cette formation en techniques d’élevage.
Amélioration des conditions de détention
A l’image des autres prisonniers, il salue la mise en place ce projet de formation. « C’est une très belle initiative. Un détenu consciencieux qui en a bénéficié devrait, non seulement pouvoir se prendre en charge, s’occuper de sa famille, mais aussi contribuer au développement de son pays », soutient-t-il. En plus de cette formation professionnelle des détenus qui les prépare à l’exercice d’un métier après les geôles, elle a l’avantage de participer à l’amélioration de leurs conditions de vie et de détention. Ce projet leur offre une certaine liberté de mouvement. « Être dehors, en train d’apprendre l’élevage, nous procure énormément de bien, c’est nettement mieux que d’être confiné dans les prisions », se réjouit T.Z.

Au-delà des bénéficiaires, ce programme de formation a plusieurs avantages, aussi bien pour la prison, que pour la société, souligne l’inspecteur principal de sécurité pénitentiaire et directeur de la MACB, Ephrem Modeste Ky. « Pour les détenus, ce programme participe à leur formation professionnelle qui va leur permettre d’apprendre un métier, de s’installer à leur compte et se prendre en charge, tout en contribuant au développement socioéconomique de notre pays », développe-t-il.
Le fait de ne pas être confiné en prison et de s’émouvoir leur évite certaines pathologies, mais aussi permet de renforcer la sécurité pénitentiaire, car un prisonnier occupé n’a pas la tête à penser à des comportements repréhensibles, ajoute-t-il. « Avant l’arrivée de ce programme, les détenues n’avaient rien à faire. Et comme, vous le savez, l’oisiveté est la mère de tous les vices », renchérit M. Bonko.
Prévoir des kits d’installation
« Cette formation va donc contribuer à réduire les cas de récidive, car c’est le manque d’occupation à la sortie de prison qui amène certains à commettre de nouveaux crimes et y retourner, surtout que certains arrivent en détention sans connaissance préalable d’un métier », argumente-t-il. Pour preuve, des bénéficiaires en liberté profitent déjà des retombées de cette capacitation en milieu carcéral. « Certains prisonniers formés ici, à leur sortie de prison, ont été récupérés par des fermes d’élevage où ils sont employés et y gagnent leur pain », révèle-t-il.

Pour M. Ky, cette première phase du programme de formation est un succès, au regard de l’engouement et de l’adhésion des prisonniers. Et face à l’incapacité de prendre en compte tous les pensionnaires de la MACB, des critères de sélections ont permis de désigner les bénéficiaires. Il s’agit, entre autres, de l’engouement, l’intérêt pour le métier, la discipline dans comportement. « Pour la durabilité du projet, un mécanisme réinvestissement des revenus de la vente des produits (pagnes et animaux) issus des activités des prisonniers formés permet à la MACB de s’approvisionner en matière première de base et d’assurer la continuité des apprentissages », indique-t-il.
« Les pagnes sont vendus dans une boutique témoin et les revenus sont versés dans un compte au niveau du ministère. Il y a une clé de répartition, et les détenus ont leur part », précise le chef de service production et formation professionnelle de la MACB. « Pour permettre à ces programmes de formation professionnelle des détenus de produire leur impact, l’idéal serait de prévoir des kits d’équipements pour les bénéficiaires qui sortent de la prison », suggère Ephrem Modeste Ky au Bureau national des grands projets du Burkina Faso. Pour lui, cet appui en outils de travail va leur permettre de s’installer à leur propre compte et de réinvestir les connaissances apprises.
Mahamadi SEBOGO