L’accès à l’eau potable et à l’assainissement a toujours été un défi au Burkina Faso, surtout en milieu rural. Face à cette problématique, de fortes actions sont menées dans la région du Nando afin d’améliorer les conditions de vie des populations pour plus de résilience. Constat !
En cette fin de la première quinzaine du mois de novembre, c’est l’heure des récoltes dans les villages et hameaux de culture au Burkina Faso. Chacun s’active à récolter les fruits de son dur labeur agricole. Fian, bourgade située à une dizaine de kilomètres (km) de Léo, province de la Sissilli, région du Nando, est dans la dynamique. Nous sommes mercredi 12 novembre 2025. Il est 14 heures. Ce jour-là, quelques bambins déambulent dans le village. Sous un grand arbre, des fillettes, élèves de l’école primaire, n’ayant pas cours cet après-midi, se consacrent à la lessive, sous le regard admiratif de leurs génitrices. L’ambiance est décontractée.
Pendant que certaines sont à la tâche, d’autres remplissent leurs bidons et seaux d’eau dans une Pompe à motricité humaine (PMH), située juste à quelques pas d’elles. « Comme nous n’avions pas école ce soir, nous profitons laver nos habits et tenues scolaires pour le reste de la semaine », confie Alimatou Diasso, élève en classe de Cour moyen première année (CM1). Visiblement pressée de repartir remplir son bidon d’eau, elle est hélée par sa mère, Mariam Nebié sur un autre sujet.

Celle-ci, élancée et le visage peu desséché, explique qu’avant l’implantation de cette pompe, ces jeunes scolaires étaient parfois obligés d’abandonner, malgré elles, les salles de classe à la recherche de l’eau potable pour subvenir aux besoins vitaux de la famille. Mais, avec la dotation du village de cet ouvrage d’approvisionnement en eau potable, avoue dame Nebié, de nombreux soucis des habitants de Fian sont résolus. « C’est vraiment très bien pour nous », dit-elle, dans une bonne humeur.
Le Conseiller villageois de développement (CVD) de Fian, Adama Nignan, ne dissimule pas sa satisfaction pour la réalisation d’une pompe dans la
localité qui l’a vu naitre. Agé de la cinquantaine, ce délégué local, revient du champ, sa daba toujours à l’épaule. Il soutient que la mise en place de cette source d’eau potable apporte un plus aux conditions de vie des ménages. Il en veut pour preuve la réduction des corvées d’eau, la réduction des maladies d’origines hydriques et l’amélioration des conditions d’études des filles. M. Nignan indique que pour la propreté autour de l’ouvrage, des consignes sont données à tous ses usagers aux fins de le maintenir permanemment assaini.
« Nous avions mis en place une Association des usagers de l’eau (AUE) pour assurer l’entretien de l’ouvrage. Chaque ménage cotise 5 000 F CFA par an pour les réparations des pannes éventuelles », détaille le quinquagénaire, tout sourire. Cette même joie est partagée par les populations du village de Neliri, un patelin établi à une quinzaine de km de Sapouy, province du Ziro. Là encore, la localité a été dotée, en 2023, d’un forage équipé d’une pompe à motricité humaine. L’implantation de ce forage est vivement saluée, en raison de la présence de nombreuses Personnes déplacées internes (PDI) dans ledit village.

Et, en plus de permettre aux habitants de Neliri de réduire leurs distances pour avoir accès à l’eau potable, le forage facilite l’abreuvage des animaux. Minata Soré est l’une des usagers permanents de ce point d’eau. Comme à son habitude, accompagnée de quelques femmes, à bicyclette, elle vient chercher l’or bleu avec ses deux bidons. A peine la manette de la pompe en main, son enfant pleurnichard au dos, l’interrompt.
Garantir la pérennité des ouvrages
Raclant sa gorge, elle estime que c’est une nouvelle ère de vie pour le village pour avoir eu cette pompe qui, selon elle, contribue à renforcer la résilience des PDI en facilitant, notamment, leur intégration dans la localité. « Depuis des années, c’était dans les puits qu’on puisait l’eau. Mais, avec cette aide, on subvient facilement à nos
besoins en eau et on abreuve aussi nos animaux », confie cette mère de six enfants. Consciente de la nécessité de garantir la pérennité de l’infrastructure au profit de tous, dame Soré invite les usagers à en prendre soin.
A ce propos, Alidou Sankara, président de l’AUE du village rassure. D’un air tempéré, il fait savoir que des dispositions sont prises pour une utilisation à bon escient du forage. Toutefois, il suggère la formation de certains membres de l’Association sur la gestion des ouvrages hydrauliques. Cela, souligne-t-il, en vue d’une prise en charge diligente des difficultés, le cas échéant. « Ce forage a apporté un grand changement dans nos quotidiens. Donc, c’est de notre intérêt d’en prendre soin », indique-t-il. Du reste, le responsable de l’AUE de Neliri salue les efforts fournis par le département ministériel en charge de l’eau pour faciliter l’accès à l’eau potable aux populations. Lesquelles populations, révèle M. Sankara, souhaitent tout de même que ces efforts s’étendent à d’autres réalisations similaires.
En attendant qu’une réponse favorable soit trouvée à cette doléance, trois blocs de latrines sont construits, à une dizaine de km de là, dans l’enceinte de l’Ecole primaire publique du village de Diaré. A notre passage, ce mercredi 14 novembre 2025, enseignants et élèves sont en classe. Ces latrines, réalisées en 2023, comportent un bloc réservé au corps enseignant et deux autres dédiés aux filles et aux garçons.

« Le bloc de latrines des garçons comporte quatre cabines dont une est munie d’une rampe d’accès réservée aux personnes à mobilité réduite. En plus des trois cabines, le bloc des filles comporte une cabine réservée aux personnes à mobilité réduite et une autre pour la Gestion hygiénique des menstrues (GHM). Le nettoyage s’effectue trois fois par semaine », renseigne la responsable du Club hygiène et assainissement de l’école, Florence Ouédraogo. De l’avis de la Directrice de l’école, Minata Sawadogo, ces latrines sont la bienvenue car, elles contribuent à renforcer l’hygiène des élèves en les dotant surtout des notions élémentaires pour l’assainissement de leur environnement immédiat.
« Nous les organisons en groupe et profitons des heures des Activités pratiques de production (APP) pour nettoyer les latrines et la cour de l’établissement », fait-elle savoir. Se satisfaisant de ces acquisitions, grâce au Projet d’eau potable et d’assainissement en milieu rural (PEPA- MR), la responsable de l’école de Diaré souhaite l’installation d’une Adduction d’eau potable (AEP) afin de leur faciliter davantage l’accès à l’eau potable.
Dans la dynamique des politiques gouvernementales
A l’image de Fian, Neliri et Diaré, l’accès à l’eau potable et à l’assainissement est en passe d’être une réalité dans la région du Nando (Koudougou). En effet, les infrastructures réalisées dans le domaine soulagent des milliers de personnes pour qui naguère c’était la croix et la bannière pour étancher leur soif, tant en milieu rural qu’urbaine des quatre provinces de la région que sont le Ziro, le Boulkiemdé, la Sissili et le Sanguié.
Et ce, dans la dynamique des politiques gouvernementales mises en œuvre à travers des Programmes budgétaires du ministère de l’Eau, de l’Assainissement et de l’Envi-
ronnement, notamment le Programme national d’approvisionnement en eau potable (PN-AEP), sous la coordination de la Direction générale de l’eau potable (DGEP).
Selon le Directeur provincial de l’eau, de l’assainissement et de l’environnement de la Sissili, Fabrice Kondé, dans le cadre de l’atteinte des objectifs en matière d’eau potable, la province a bénéficié du système d’Adduction en eau potable simplifié (AEPS). Ainsi, Yallé, village de la commune de Bihéa, à une quinzaine de km du chef-lieu de la province, Léo, est bénéficiaire de l’AEPS composé d’un forage alimentant un château de
80 m3 qui dessert huit bornes fontaines et 100 branchements particuliers.
Des contrats d’affermage pour une gestion efficace

t à l’assainissement ».
Pour une meilleure gestion des ouvrages d’approvisionnement en eau potable, un contrat a été signé entre la Commune de Bihéa et un opérateur privé (fermier). Le contrat du fermier prévoit des extensions en vue d’augmenter le nombre de bornes fontaines et des branchements particuliers. A une borne fontaine du village, nous retrouvions Safouratou Nebié. Agée d’une quarantaine d’années, bidon en main, elle vient s’approvisionner en eau, non loin de son domicile. Les bornes fontaines les plus fréquentées sont munies d’un lampadaire et pour un meilleur assainissement des alentours de l’ouvrage, des poubelles ont été installées.
« Même si nous revenons des champs dans la nuit, nous pouvons venir chercher l’eau facilement. Il y a même des gens qui ont eu le robinet chez eux et qui en profitent mieux », relate Safouratou Nebié. Ounon Massah Napon est l’un des bénéficiaires de ces branchements privés de l’AEPS. Il se félicite des initiatives du ministère en charge de l’eau, pour réduire considérablement les difficultés liées à l’accès à l’eau potable des populations. Dans ce sens, il exhorte les habitants de Yallé à souscrire massivement aux branchements privés.
Cela, dit-il, pour mettre fin à la corvée d’eau des ménages et permettre un meilleur épanouissement de l’autre moitié du ciel. Cet appel, Victor Zio, habitant du village de Dabiou, dans la commune de Léo, l’a bien attendu. Bénéficiaire d’une latrine familiale, il est marié et père de cinq enfants. Pour lui, les autres membres de sa famille ainsi que ses voisins n’ont plus de soucis d’accès aux toilettes. « Nous avons compris qu’il est nécessaire d’avoir des latrines chez soi. Cela préserve notre santé et assainit notre cadre de vie », estime-t-il. Fort de cela, M. Zio invite chaque chef de ménage à s’inscrire dans la dynamique.
Déjà, pour une prévision de 4 500 latrines familiales, 3 500 ont été réceptionnées dans la province de la Sissili. Et, à l’échelle de la région du Nando, ces efforts sont également faits dans la commune de Réo, province du Sanguié, selon le Président de la délégation spéciale (PDS), Issaka Sindi Zagré. A la faveur de la mise en œuvre du PEPA-MR et les actions d’Organisations non gouvernementales (ONG), fait-il savoir, de nombreux ouvrages hydrauliques et d’assainissement ont été réalisées. « Aujourd’hui, nous sommes satisfaits des réalisations d’ouvrages d’eau potable et d’assainissement.
Même si nous en demandons toujours », lance-t-il. L’autorité communale indique que fort de l’appui de l’Etat, à travers les ressources transférées et en plus des réalisations d’ouvrages hydrauliques, Réo a bénéficié de latrines familiales, institutionnelles et publiques ainsi que des bacs à ordures. Au regard des acquis, il se dit confiant quant à l’atteinte des objectifs en matière d’accès à l’eau potable et à l’assainissement dans sa collectivité. En attendant, M. Zagré confie poursuivre la sensibilisation des populations à un bon usage de ces infrastructures.

A cet effet, il exhorte les bénéficiaires à s’acquitter de leurs contributions pour le prélèvement d’eau afin d’assurer la maintenance des ouvrages. Cela, laisse-t-il entendre, à l’effet de garantir leur durabilité et, partant, consolider les conditions de vie et de résilience des bénéficiaires.
« Nous avons besoin d’une population en bonne santé pour mettre en œuvre les actions du gouvernement », rassure-t-il, tout en saluant l’apport des organisations associatives à la bataille rangée pour l’accès à l’eau potable et à l’assainissement.
Satisfaire les droits des citoyens
C’est, d’ailleurs, ce combat que mène l’Association eau pour tous, dans la province
du Boulkiemdé (Koudougou) depuis 2008. Son président, Daouda Kaboré, se rappelle qu’il y a quelques années, l’accès à l’eau constituait un véritable souci pour les populations, notamment dans les périphéries de la ville de Koudougou. « Il y a des acteurs privés qui ont volé au secours des populations par la réalisation de forages privés », observe cet enseignant à la retraite. Mais, ces dernières années, reconnait-il, l’Etat et ses partenaires ont mis les bouchées doubles pour que tout cela soit résolu.
Pour lui, les actions menées par l’Etat sont réconfortantes, ce d’autant plus que le combat de l’accès à l’eau et à l’assainissement est en train d’être gagné. Toutefois, M. Kaboré dit continuer le plaidoyer pour consolider les acquis, car, soutient-il, « l’eau, c’est la vie ». C’est dans ce sens que le Directeur régional de l’Eau, de l’Assainissement et de l’Environnement du Nando, Mamoudou Kandé, relève que, conformément à la politique du gouvernement, des ouvrages sont construits au profit de la population.
L’objectif étant, de son point de vue, de satisfaire les droits des citoyens en matière d’eau et d’assainissement tant en milieu urbain que rural. A cet effet, laisse-t-il entendre, dans le Nando, en 2024, sur une population estimée à 1 502 776, ce sont 1 077 388 personnes qui ont été desservies en eau potable, pour un taux d’accès de 71,7% sur une cible de 74,8%. « Ces deux dernières années, la région a construit beaucoup d’ouvrages qui ont augmenté le taux d’accès à l’eau potable », explique M. Kandé.
Ainsi, il fonde l’espoir que le Nando, grâce à la synergie d’actions des acteurs du secteur de l’eau, sera au rendez-vous de 2030 (Ndlr, Objectif de développement durable) pour faire de l’accès à l’eau et à l’assainissement une réalité. Pour ce qui est de l’assainissement, poursuit-il, 5 174 latrines familiales, 92 blocs de latrines institutionnelles (latrines dans les lieux publics, les centres de santé et les écoles) ont été réalisés en 2024, pour un taux d’accès de 26,12% contre 23,33% en 2023.

« J’invite les populations à accompagner les communes pour une gestion durable et efficiente des ouvrages réalisés », lance le responsable régional. Embouchant la même trompète, le Directeur général de l’eau potable (DGEP), Souro André Sanon, martèle que l’entretien des ouvrages réalisés favorise leur pérennité en permettant à l’Etat d’optimiser ses ressources pour renforcer l’existant.
« Lorsque ces ouvrages sont mal gérés, il faut revenir les réhabiliter en injectant encore des ressources financières. Et, cela ne fait pas progresser le taux d’accès », explique-t-il.
Gagner, ensemble, le pari
Pour lui, ces dernières années, des efforts significatifs ont été consentis par l’Etat et ses partenaires pour accroitre la couverture en eau potable et améliorer l’accès à l’assainissement aussi bien en milieu urbain que rural. S’agissant de l’accès à l’eau potable, détaille M. Sanon, les interventions se traduisent par la réalisation de nombreux ouvrages d’approvisionnement en milieu rural, comprenant les systèmes d’adduction d’eau potable et les forages équipés de pompes à motricité humaine ainsi que le renforcement des capacités de production et de distribution des centres urbains.
Ainsi, pour le DGEP, la synergie d’actions de l’Etat et de ses partenaires a permis, en 2024, l’atteinte d’un taux d’accès à l’eau potable de 78,6%, sur tout le territoire national, contre 76,2% en 2023. En effet, précise Souro André Sanon, en 2024, environ 970 000 personnes ont bénéficié d’une amélioration de l’accès à l’eau potable. Ces données, affirme-t-il, résultent de la réalisation de 1 400 forages équipés de pompes à motricité humaine, 347 postes d’eau autonome et 122 systèmes d’adduction d’eau potable. Le DGEP cite également la réhabilitation d’infrastructures dont cinq postes d’eau autonome, 17 AEPS et la réhabilitation de 482 pompes.
Au titre des acquis en milieu urbain, M. Sanon note la pose de 282 km de réseaux de canalisation, la réalisation de 34 632 branchements particuliers et de 167 bornes fontaines, l’augmentation des capacités de stockage de 600 m3 et le renforcement de la capacité de production de 44 800 m3 jour.

« Malgré ces progrès notables, des défis persistent, en milieu rural et péri-urbaine où les disparités d’accès demeurent. En milieu urbain aussi, la disponibilité et la continuité du service d’eau est mis à rude épreuve par la pression démographique et l’urbanisation galopante », déclare-t-il. Pour y faire face, il invite l’ensemble des acteurs à savoir les structures déconcentrées, les collectivités territoriales, les Partenaires techniques et financiers ainsi que la population à une synergie d’actions pour pouvoir relever ce défi.
« Nous avons des motifs de satisfaction. En dépit de cela, nous comptons accélérer le processus de réalisation de nos ouvrages. Et, nos autorités ont donné des orientations dans ce sens », annoncet-il.
Par ailleurs, le DGEP reconnait la contribution des ONG et associations dont il salue les actions qui, de son point de vue, concourent à l’atteinte des objectifs en matière d’accès à l’eau potable et à l’assainissement. « Nous leur demandons de poursuivre cet accompagnement de l’Etat pour permettre de gagner ensemble, le pari de l’accès universel à l’eau potable, à l’assainissement, à l’horizon 2030, dans le cadre des objectifs de développement durable », conclut Souro André Sanon.
Soumaïla BONKOUNGOU






