A l’initiative du président du Faso, le dialogue politique s’est tenu, du 15 au 22 juillet 2019. Les travaux ont réuni 20 représentants de l’Alliance des partis et formations politiques de la majorité présidentielle (APMP) et 20 autres des partis politiques affiliés au Chef de file de l’opposition politique (CFOP).
Avec pour vocation de contribuer, entre autres, au renforcement de la paix, de la sécurité, de la cohésion sociale et de favoriser la réconciliation et la tenue d’élections démocratiques et apaisées, ce dialogue a abouti à de nombreuses décisions et recommandations consensuelles, hormis la question de l’utilisation de la carte biométrique consulaire comme document de votation. Sur la question du quota genre, en particulier, les participants ont, entre autres, convenu de «la suppression de la sanction de rejet des listes de candidature non conformes au quota, de l’instauration d’une sanction positive en faveur des listes respectant le quota, du positionnement alterné et de la prise de mesures d’accompagnement des femmes engagées en politique».
S’il y a de quoi se réjouir de l’instauration d’une sanction positive et de l’accompagnement des femmes engagées en politique, la suppression de la sanction de rejet des listes de candidature non conforme au quota, reste au travers de la gorge de plus d’un. Selon certains observateurs, ce consensus politique peut conduire au non-respect de la loi portant fixation de quota aux élections législatives et municipales au Burkina Faso qui avait soulevé tant d’espoirs.
En effet, depuis sa phase test en 2012, de nombreuses organisations publiques et privées font des pieds et des mains pour l’effectivité de ces textes adoptés, afin de favoriser une meilleure participation politique des hommes et des femmes. Après plusieurs années d’application de la loi aux élections municipales et législatives de 2012, 2015 et 2016, des acquis avaient été enregistrés avec toutefois des insuffisances. Au lieu du respect de 30% de candidatures sur chaque liste, certains partis politiques ont préféré appliquer le minimum de 30% sur l’ensemble des candidatures de tout le parti. Au niveau du positionnement sur les listes, la majorité des candidates n’étaient pas à «des positions éligibles». Alors que certains estimaient que la sanction du non-respect des textes n’était pas suffisamment dissuasive, consacrant juste la perte de 50% du financement de la campagne, la classe politique a décidé de s’en débarrasser.
Si l’on sait que certains grands partis pourraient se passer de cette subvention de l’Etat, il y a de quoi s’inquiéter quant à l’effectivité de la loi sur le quota genre. Déjà que l’engagement pris par le président Roch Marc Christian Kaboré, de respecter une présence de 30% de femmes au gouvernement n’a pas encore été mis en œuvre, les efforts des acteurs de la société civile et du ministère en charge de la femme en tête, risquent d’être vains, si cette décision «consensuelle» du dialogue politique venait à être appliquée. Aucune démocratie ne saurait se construire, sans l’implication réelle de l’autre moitié du ciel dans les sphères de décisions.
Il serait illusoire de faire fi de cette réalité, surtout sous nos cieux où les femmes représentent plus de la moitié de la population. Le changement en faveur de l’égalité des sexes, de l’équité et de la justice sociale s’impose et la loi portant fixation de quota aux élections législatives et municipales doit y participer. Mais les réalités semblent tout autre. Il reste à espérer que la relecture du projet de loi soit effective pour rectifier le tir.
Jean-Marie TOE
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