France : François Bayrou tiendra-t-il ?

Après la destitution de l’éphémère Premier ministre, Michel Barnier, le 4 décembre 2024, les regards étaient tournés vers le chef de l’Etat français, Emmanuel Macron. Plus d’une semaine après, le locataire du palais de l’Elysée a propulsé le centriste et professeur agrégé de Lettres classiques de 73 ans, François Bayrou, à Matignon. Quand bien même, son nom était cité parmi les figures pressenties pour prendre la tête du gouvernement, le patron du Mouvement démocrate (MoDem) n’était pas à priori le super favori.

Mais, au fil des consultations de Macron, Bayrou s’est révélé être la personnalité la plus consensuelle et à même d’assurer l’unité selon les indiscrétions, obligeant le président français à faire de lui le successeur de Barnier. Quatrième Premier ministre de Macron en moins d’un an, Bayrou arrive aux affaires à une période cruciale de l’histoire sociopolitique de la France. Aucune formation politique n’a obtenu la majorité absolue au Parlement à l’issue des législatives de juin-juillet dernier, ce qui a créée des soucis de gouvernance. En plus de la gestion des dégâts du cyclone Chido survenue ces temps-ci à Mayotte, Bayrou, politique rompu, a la lourde tâche de former un gouvernement et de faire adopter le budget 2025, emporté par la censure de Barnier.

Deux équations se posent à Bayrou. La première, c’est de former un gouvernement avec diverses forces politiques d’importance. Le nouveau Premier ministre, qui a entamé ses consultations pour satisfaire à ce besoin depuis hier lundi 16 décembre, va devoir user de tact et de réalisme pour donner à la France, le gouvernement stable qu’elle attend impatiemment. Les groupes politiques représentés à l’Assemblée nationale vont défiler par ordre d’importance en nombre de parlementaires à Matignon. Sont-elles toutes acquises à la cause de Bayrou, qui devrait négocier un pacte de non censure s’il veut sauver sa tête ? Il faut manquer de réalisme pour répondre par l’affirmative.

Même si la cheffe de file historique de l’extrême droite, Marine Lepen, a promis que sa famille politique ne voterait pas a priori, une censure contre Bayrou, elle ne semble pas le porter dans son cœur. N-a-t-elle pas qualifier sa nomination de « méprisable coalition des contraires » ? Pour sa part, La France insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon ne fait pas dans les formules diplomatiques. Elle a décliné l’invitation de Bayrou à Matignon, pour les consultations en vue de la formation du nouveau gouvernement. Cette force politique entend d’ailleurs déposer une motion de censure contre l’occupant de la Primature, tout comme elle l’avait pour son prédécesseur.

Pour la LFI, tant que Macron ne respectera pas le verdict des urnes suite aux récentes législatives, qui voudrait que le Nouveau Front populaire (NFP) hérite de Matignon, il l’aura toujours sur son chemin. Autre fait pas très rassurant, le Parti socialiste (PS) a d’ores et déjà fait part de son intention de ne pas participer au gouvernement en gestation, exigeant par ailleurs des compromis dans l’éventualité d’un pacte de non-censure. On ne peut pas dire, dans ces circonstances que le vent est favorable au cheval sur lequel Macron a misé, pour parler comme les joueurs du Pari mutuel urbain (PMU).

La deuxième équation qui s’impose à Bayrou, c’est l’adoption d’un budget qui tienne compte des aspirations des forces politiques en présence, ce qui n’est pas gagné d’avance. Mais en attendant d’y parvenir, il doit faire adopter dans l’urgence, un projet de loi spéciale pour permettre de garantir la continuité de l’Etat, la question du budget n’étant pas encore réglée. Cette démarche vise à autoriser une levée d’impôts, des dépenses de crédits sur la base du budget 2024 et des emprunts de l’Etat et de la Sécurité sociale. Tout est urgent pour Bayrou qui marche en terrain glissant. Pourra-t-il survivre à la tempête politique
qui secoue l’Hexagone ? Wait and see…

 Kader Patrick KARANTAO

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