Le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré a rencontré le Conseil supérieur de la magistrature, le jeudi 14 novembre 2019 à Kosyam. La rencontre statutaire a permis d’évaluer le processus d’indépendance du pouvoir judiciaire amorcé à la suite des réformes de 2015.
L’article 131 de la Constitution, telle que modifiée en 2015, prévoit chaque année une rencontre, courant novembre, entre le président du Faso, garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire et le Conseil supérieur de la magistrature. Cette année, le rendez-vous statutaire, le 4e depuis son institutionnalisation, s’est tenue, hier jeudi 14 novembre au palais de Kosyam. A l’occasion de cette session, les statistiques sur le rapport des populations à la justice ont révélé que le taux de saisine de la justice sur l’ensemble du territoire s’est amélioré, a indiqué le président du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), Jean Kondé, qui a noté le contraste entre ces chiffres et l’idée couramment répandue de manque de confiance en la justice. « Si vous n’avez pas confiance en une structure vous n’y allez pas », a-t-il fait remarquer. De quoi les encourager à persister dans la dynamique de sorte qu’au rendez-vous de l’année prochaine il y ait encore des avancées significatives. Si le président du CSM a relevé quelques difficultés au processus d’indépendance de la justice, il s’est toutefois montré optimisme eu égard aux « très bonnes dispositions d’esprit » du chef de l’Etat pour accompagner le processus. « Il a pris l’engagement de travailler à lever les quelques goulots d’étranglement », a confié Jean Kondé. Ces difficultés se résument, entre autres, à l’autonomisation du CSM en le dotant d’un siège définitif et d’un véritable budget.
L’indépendance, une quête perpétuelle
Le premier président de la Cour de cassation a évoqué également le blocage du concours de la magistrature « sur des bases souvent discutables » et la création d’une école de la magistrature qui permettra déjà, a-t-il dit, de résoudre les difficultés récurrentes d’intégration des magistrats en fin de formation. Sur ce dernier aspect, il a rappelé que des juridictions attendent toujours l’arrivée de magistrats qui ont fini leur formation depuis juin 2019.
Au rang toujours des difficultés inhérentes au processus d’indépendance du pouvoir judiciaire, le président du CSM a espéré que la mise en conformité des textes législatifs avec la constitution sur le statut de la magistrature soit effective d’ici l’année prochaine. « Il est toujours stipulé dans la loi organique portant statut de la magistrature que le président du Faso et le ministre de la Justice sont respectivement le président et le vice-président du Conseil supérieur de la magistrature. Pourtant la modification constitutionnelle a établi que c’est le premier président de la Cour de cassation qui en assure la présidence et le président du conseil d’Etat la vice-présidence », a-t-il expliqué. Le magistrat Jean Kondé, qui a assumé la présidence du CSM depuis seulement cette année 2019, a rappelé que l’essentiel du principe de l’indépendance de la justice est la liberté complète des juges, pris individuellement, d’inscrire et de juger les affaires qui leur sont soumises sans qu’aucune personne ou entité, un gouvernement, un groupe de pression, un particulier ou même un autre juge n’intervienne ou tente d’intervenir dans la façon de conduire la procédure et de rendre la décision. Ce qui implique, selon lui, un état d’esprit et un ensemble de dispositions institutionnelles et opérationnelles.
Nonobstant les obstacles ci-dessus cités, le magistrat Jean Kondé, à l’aune des réformes entreprises depuis un certain temps dans le système judiciaire, est d’avis que « des garanties objectives et opérationnelles existent au Burkina Faso de nature à rendre le pouvoir judiciaire indépendant ». Il a fait référence en cela à la déconnexion entre le pouvoir judiciaire et l’exécutif, les nominations aux postes de responsabilité dans la magistrature par appels à candidature, l’évaluation du magistrat par son supérieur hiérarchique immédiat en lieu et place du ministre de la Justice, la gestion de la carrière du magistrat par le secrétariat permanent du CSM et la « relative » sécurité financière des magistrats.
Fabé Mamadou OUATTARA