Problème de santé publique majeure au Burkina Faso, le paludisme touche chaque année des millions de personnes et cause des milliers de décès, notamment chez les jeunes enfants de moins de 5 ans. Pour éradiquer la maladie, plusieurs mesures préventives dont le nouveau vaccin, le R21, sont implémentées dans des formations sanitaires dont le Centre médical urbain de Tanghin, secteur 17 de Ouagadougou. Constat !
Lundi 8 septembre 2025. Il est 9 heures au Centre médical urbain (CMU) de Tanghin, secteur 17 de Ouagadougou. Sous le hall du bâtiment « PEV /SMI », une trentaine de femmes sont assises sur des bancs. Nourrissons dans les bras, elles semblent impatientes. Tenant au respect de l’ordre d’arrivée, chacune surveille le moindre mouvement des autres. Des cris d’enfants se font attendre à l’intérieur de la salle de vaccination. Ces mères sont venues faire administrer le vaccin anti palustre à leurs bébés, en cette saison des pluies coïncidant avec le pic du paludisme.
La professeure des écoles, Alimata Nianta, en fait partie. Son bébé de 5 mois, Rachid Ramadan Savadogo, remplit les conditions édictées. II vient ainsi de recevoir la première dose du nouveau vaccin, le R21.
« Ce matin, j’ai décidé de venir vacciner mon enfant. Il vaut toujours mieux prévenir que de traiter », reconnait-elle, sourire aux lèvres. A l’en croire, une simple piqure de moustique crée parfois des sueurs froides.
« L’an surpassé, dans notre famille, une fille de 12 ans, atteinte du paludisme, était sévèrement anémiée. Nous l’avons conduite dans un dispensaire. Mais, il n’y avait pas de sang pour lui transfuser. Ce jour, on a fait le tour de la capitale à la recherche de sang, en vain. Nous étions tous découragés. Ce n’est qu’au troisième jour que nous avons pu avoir le liquide précieux pour sauver la vie de l’enfant », se remémore-t-elle. De l’avis de la mère de Rachid, le paludisme mérite d’être pris au sérieux au regard des
conséquences fâcheuses qu’il engendre le plus souvent.

Tout comme l’enseignante, cette mère d’enfant, Assétou Kangoyé, est déterminée à mettre sa progéniture à l’abri de ce fléau « impitoyable ». Sa fille, Latifatou Belem, âgée de 8 mois, a aussi reçu l’antigène du paludisme. « Chaque année, des membres de notre famille font la maladie, surtout les enfants à bas âge. Nous en souffrons énormément », raconte-t-elle. Des propos corroborés par le coordonnateur du CMU de Tanghin, Lassané Tiendrébéogo, qui confie que le paludisme constitue l’un des premiers motifs de consultation dans sa formation sanitaire. « Au cours du mois d’août, plus d’un tiers des patients reçus souffrent du paludisme.
« Je suis convaincu de l’efficacité du R21 »
Et les enfants de moins de 5 ans sont les plus touchés. Mais, avec l’implémentation des mesures de prévention comme la Chimio-prévention du paludisme saisonnier (CPS), la maladie a connu un recul », souligne M. Tiendrébéogo.
Rasmatou Dabré se réjouit de faire vacciner son bébé, Oumaïma Bandaogo, âgée de 6 mois. « A la suite des explications des agents de santé, je suis convaincu de l’efficacité du R21. Il va mieux protéger nos enfants, en ces temps pluvieux », affirme-t-elle.
Cette satisfaction est partagée par Rachidatou Sanfo. Sa fille Wassiratou Sawadogo de 5 mois a aussi bénéficié de la dose de vaccin. S’adressant à celles qui hésitent toujours, elle estime qu’elles doivent faire vacciner leurs rejetons. « Si le vaccin n’était pas fiable, les autorités ne l’auraient pas adopté.

On ne se fie pas aux préjugés. Toutes décisions prises en faveur du bien-être des populations, nous y adhérons entièrement », fait-elle savoir, très convaincue. Revenant sur le processus d’extension du vaccin visant à toucher le maximum d’enfants, le coordonnateur Tiendrébéogo indique que le Burkina Faso a d’abord introduit le vaccin RTS, S dans son programme de vaccination, le 5 février 2024. Il a été, selon lui, administré dans certaines régions du pays. « Mais le passage à l’échelle a véritablement commencé à partir du 15 août 2025 avec l’administration du vaccin R21 aux enfants de 5 à 23 mois.
Cette mesure préventive concerne les enfants nés en janvier 2025 », précise-t-il.
Pour ces dames, l’unique solution pour recouvrer la santé chez leurs enfants est de les conduire vers un centre de santé pour une meilleure prise en charge. Cela, grâce à l’existence d’un traitement curatif et préventif efficace. Ainsi, elles ne tarissent pas d’éloges pour le gouvernement qui, de leur avis, se préoccupe de la santé des populations, surtout celle des plus vulnérables. « Les mots me manquent pour remercier les autorités chargées de la santé », lâche Rasmatou Dabré. Même son de cloche pour Assétou Kangoyé qui se félicite des efforts déployés pour éliminer le paludisme au Burkina Faso.
« Nous l’encourageons à maintenir la dynamique », plaide-t-elle.
Le coordonnateur donne l’assurance que son centre médical a suffisamment de doses du nouveau vaccin. « La chaîne du froid aussi n’a aucun problème. Nous avons reçu environ 300 à 400 doses du vaccin R21. Et le ravitaillement va se poursuivre en fonction du besoin », soutient-il. D’après lui, ce vaccin fait beaucoup espérer qu’il pourra contribuer à faire baisser les cas de paludisme chez les enfants.

enfants sous des Moustiquaires imprégnées d’insecticides à longue durée d’action.
La sage-femme du CMU, Jeannette Taonsa, rassure de l’efficacité du vaccin, indiquant qu’il a été examiné, testé et validé. « Les parents doivent avoir confiance à ce vaccin qui a pour seul objectif de protéger leurs enfants contre le paludisme. C’est pour le bien-être de nos enfants », affirme-t-elle. Et au coordonnateur du centre médical, Lassané Tiendrébéogo, de renchérir : « un enfant qui reçoit toutes les doses sera protégé pendant au moins trois ans ».
Respecter le calendrier vaccinal
Pour la responsable du Programme élargi de vaccination (PEV), Clarisse Bazié, les comprimés de la chimio prévention protègent également contre le paludisme. « Si un enfant venait à les rejeter, on doit lui en donner moins de 30 minutes après le rejet. S’il continue de vomir, il est conseillé de consulter un agent de santé », suggère-t-elle. S’agissant du vaccin, la responsable du PEV précise qu’après son administration, l’enfant peut avoir des effets indésirables, comme la fièvre. « Cela peut être dû à l’antigène administré », justifie-t-elle. C’est pourquoi, elle demande aux hommes
d’encourager et de soutenir leurs femmes de sorte qu’elles puissent continuer à suivre
l’administration des autres doses.
Déterminées à « bouter le paludisme hors de leurs concessions », ces femmes ont mémorisé le calendrier vaccinal et tiennent à le respecter.
« On nous a expliqué que le vaccin R21 concerne les enfants âgés d’au moins 5 mois. Un mois après la première administration du vaccin, nous devons revenir pour la seconde dose. Nous devons respecter les périodicités prescrites jusqu’à boucler les 4 doses », précise la mère de Oumaïma. Visiblement motivée, Alimata Nianta ajoute : « pour que l’enfant soit mieux immunisé, un écart de 8 mois doit séparer la 3e et la dernière dose ».
Aux dires du coordonnateur Tiendrébéogo, les deux vaccins sont complémentaires.

« Ici, on est à la première dose du R21. Pour ceux qui ont déjà reçu le vaccin RTS, S ailleurs, ils poursuivent leurs prochaines doses avec le R21 », clarifie-t-il, comme pour souligner qu’en la matière, chaque trouvaille vaut son pesant d’or.
Selon ces mamans, les campagnes de vaccination contre le paludisme sont des aubaines à saisir. « Cette campagne est une opportunité à ne pas rater. Les années précédentes, je me rendais dans des établissements scolaires désignés pour la vaccination de routine contre la
maladie », affirme Rachidatou Sanfo.
Un avis partagé par Tenin Bognini après que sa fille Nessia Zongo (5 mois), ait reçu la dose « protectrice ». « A la maison, des proches parlaient du vaccin. Par la suite, j’ai eu l’assurance de la bonne nouvelle. Car récemment, j’étais de passage dans ce centre médical à la recherche de documents et des femmes m’en ont explicitement informés », explique-t-elle, s’estimant chanceuse.
Continuer la lutte anti-larvaire
De l’avis de la responsable PEV, Clarisse Dabiré, l’adhésion des mères au nouveau vaccin R21 se justifie également par le fait qu’à partir du mois de juillet, les équipes mobiles ont mis à profit les campagnes de la Chimio prévention du paludisme saisonnier (CPS) pour divulguer l’information. Des crieurs publics et des leaders religieux ont été aussi sollicités pour passer le message auprès des communautés », confie-t-elle.
Les mères entendent, à leur tour, contribuer à sensibiliser les sceptiques à prendre « d’assaut » les formations sanitaires afin de prémunir leurs enfants de cette maladie infectieuse. « Nous allons relayer l’information auprès de nos proches et notre entourage, dans le but de les convaincre à adhérer à cette noble initiative », promet Rasmatou Dabré, heureuse d’avoir fait œuvre utile. Quant à Rachidatou Sanfo, elle invite, d’ores et déjà, les parents des plus petits qui doutent encore à se rendre dans les centres de santé pour bénéficier de ce nouveau vaccin contre le paludisme. « Ce serait dommage d’attendre qu’un enfant tombe malade, se retrouve dans un état critique, avant de rechercher l’aide des médecins », avertit-elle.

Pour certaines, si le vaccin protège les mineurs, les bonnes habitudes le seront davantage pour toute la famille. « Chez nous, nous dormons tous sous des moustiquaires. On balaie la cour tous les jours, tout en évitant la conservation des eaux sales dans des récipients. La salubrité empêche la reproduction des moustiques », reconnait Rachidatou Sanfo, exhortant chaque ménage à faire pareil pour accompagner les efforts des autorités sanitaires. Selon Assetou Kangoyé, ces reflexes ne sont pas à occulter, au regard des conséquences nuisibles d’une simple piqure de l’anophèle.
« Comme à l’accoutumée, des moustiquaires nous ont été offertes gracieusement. Elles sont surtout importantes pour les femmes enceintes et les enfants », signifie-t-elle. Dans la même logique, le coordonnateur du CMU, Lassané Tiendrébéogo, soutient que la vaccination n’exclut pas les autres mesures préventives. « Il faut continuer la CPS et la lutte anti-larvaire à travers la pulvérisation spatiale et intra domiciliaire des gites larvaires », insiste-t-il, estimant qu’avec la synergie de toutes les mesures préventives, le pays pourra venir à bout du paludisme. Quant au médecin-chef dudit centre médical, Aïnata Savadogo, elle recommande surtout aux femmes qui ont des enfants à bas âges de les protéger avec des vêtements couvrant leurs corps et de surtout les faire dormir sous des Moustiquaires imprégnées d’insecticides à longue durée d’action.
Adama SAWADOGO
A la découverte du PEV-SMI au Burkina Faso ?
Le Programme élargi de vaccination du Système de management intégré de la santé (PEV-SMI) est la stratégie nationale visant à protéger tous les enfants contre les maladies évitables par la vaccination. Le programme prend en compte des vaccins pour 13 maladies : la tuberculose (BCG), la diarrhée (le rotavirus), l’hépatite B, la diphtérie, le tétanos, la coqueluche (DTC), les bactéries (le Haemophilus influenzae type b), la poliomyélite (VPO), le pneumocoque, le méningocoque, la rougeole, les oreillons, la rubéole (ROR) et le paludisme (RTS, S). Pour renforcer son arsenal de lutte contre le paludisme, il a intégré le vaccin R21, en août 2025. Les vaccins sont administrés à des âges spécifiques, selon un calendrier établi pour assurer une protection optimale. Au niveau du Centre médical urbain (CMU) du secteur 17 de Ouagadougou, 4 291 enfants ont déjà bénéficié de ce programme, au cours de l’année 2025, constituant par la même occasion la cible du nouveau vaccin, le R21. Dans le seul mois d’août, le Centre enregistre 108 enfants vaccinés contre le paludisme et espère atteindre la moitié de cette cible, d’ici la fin de l’année.
A.S.
Source : OMS et CMU du
secteur 17 de Ouagadougou






















