Qui sont-ils ces ravisseurs de nos enfants qui arpentent nos villes sur les traces de
« gibiers humains » destinés à des fins inavouées ? Pourquoi le phénomène semble prendre de l’ampleur ? Assez de questions pour un sujet d’actualité qui révèle la chute des murs de valeurs d’une société de plus en plus solitaire, individuelle, voire égoïste.
Que de questions pour une préoccupation devenue presque une réalité banale par la récurrence de ses manifestations. Combien d’enfants sont disparus ? Combien de familles victimes sont dans le désarroi ? Combien le seront les jours à venir ? Touchons du bois, mais soyons réaliste, l’heure est grave ! Dans notre société l’égoïsme a bâti ses murs dans les cœurs.
De nos jours, le tissu social est devenu un torchon sans entretien, foulé au pied par un voisinage hermétique aux portes et aux cœurs fermées à double tour. La méfiance et l’indifférence font le lit du silence dans certains voisinages. Chacun vit sa vie dans son coin de petit confort social, dans son cocon à bouchon sans véritable interaction humaine, loin de la solidarité et du partage qui crient en silence.
Les seules traces d’humanité dans nos lieux de vie est une main matinalement agitée qui dit bonjour sans être le secours qui accourt au moment de détresse. Des familles entières vivent comme des pigeons en cage, enfermées dans les coquilles d’une individualité suicidaire. Il y en a qui ne savent même pas comment s’appelle leur voisin immédiat, pendant que d’autres se complaisent dans leur prison avec deux ou trois enfants qui ne fréquentent jamais les bambins du voisinage.
Leurs compagnons les plus sûrs sont la télévision et les tablettes de jeux de l’addiction en manque de socialisation.
De nos jours, personne n’éduque encore l’enfant de l’autre. L’éducation a été privatisée, personnalisée et jetée entre les mains parfois vides d’une responsabilité parentale limitée. Avant, la société éduquait l’enfant de l’autre ; aujourd’hui, l’enfant de l’autre est devenu un bien privé doté de droit, dressé comme un bois sec par une mère et un père presque sans repère.
L’enfant du voisin n’est pas mon enfant si les fessées que je lui administre sont perçues comme une violation des droits humains. Personne ne veille encore sur l’enfant de l’autre comme si c’était le sien propre. Personne ne ressent la douleur de l’enfantement comme une expérience partagée avec empathie.
Personne ne cause, ne mange chez l’autre dans le plat du partage qui assouvit l’envie du vivre-ensemble. Dans une société où le voisin peut mourir sans qu’on ne sache qu’il était malade depuis des mois ; dans une société où la sensibilité humaine est un cœur surgelé qui glace l’âme, quelle place accordée à l’instinct grégaire givré par l’isolement volontaire ?
Drôle de société de plus en plus introvertie avec une espèce d’indifférence bien entretenue au froid et de plus en plus acceptée au nom de la liberté individuelle, du confort personnel et du bonheur privé.
Non, revenons à nos fondamentaux africains ! Brisons les barrières et fréquentons-nous en tant que voisins et citoyens ; partageons nos vies sans complexe et avec le reflexe de bien faire ; éduquons nos enfants ensemble en leur donnant les valeurs que nous avons reçu de nos dignes pères ; veillons les uns sur les autres comme de vrais voisins, comme de vrais Burkinabè. Osons donner la fessée de la réprimande qui corrige plutôt que le silence de l’indifférence qui détruit.
Vivons en communauté dynamique où le riche et le pauvre se complètent à travers les partages de valeurs de solidarité, d’humilité et de paix. La sagesse dit que lorsque nous dormons, il y a toujours un bon voisin qui veille sur nous. Soyons mutuellement des solutions dans notre entourage ; vivons en famille dans nos quartiers ; ayons des moments de partage de chaleur humaine et rappelons-nous qu’une seule main ne peut ramasser la farine.
Veillons sur nos enfants, soyons des gardiens de vie sans distinction de rang social. En attendant qu’une communication publique digne de ce nom soit mise en branle à travers tous les médias pour interpeler et appeler à la responsabilité de chaque Burkinabè, dressons-nous contre le phénomène de disparition d’enfants au Faso. Dans l’espoir que des actions fortes sont en cours ou viendront mettre le grapin sur le réseau funeste.
Clément ZONGO
clmentzongo@yahoo.fr