C’est à une véritable démonstration de puissance à laquelle on a assisté vendredi 9 mai dernier sur la Place Rouge à Moscou à l’occasion de la commémoration de la Victoire de l’armée Rouge sur les forces nazies hitlériennes, le 9 mai 1945. La prise de Berlin par les troupes soviétiques ce jour-là consacrait en effet la fin de la deuxième Guerre mondiale et du nazisme avec la destruction du bunker et de son concepteur de triste mémoire Adolf Hitler. Défilé militaire martial, chars, missiles et drones de dernière génération, Moscou a rappelé à la face du monde si besoin en était encore, qu’elle demeure la première puissance militaire mondiale, comme elle l’était déjà en 1945, lorsqu’elle défaisait les troupes nazies sous la conduite militaire du maréchal Joukov et celle politique de Staline, héritier de Lénine et bâtisseur de l’Union Soviétique. Cette Russie-là, héritière de la Russie impériale de Pierre le Grand qui, à sa fondation en octobre 1721, s’étendait jusqu’à une partie de la Pologne et englobait l’Ukraine, la Moldavie, la Crimée, une grande partie des Etats asiatiques de la région et même l’Alaska vendue par la suite aux USA, Vladimir Poutine l’a rappelée, en l’espace d’un défilé aux dirigeants occidentaux qui n’ont de cesse de le traiter « d’impérialiste », depuis le déclenchement de la crise ukrainienne.
C’est l’hôpital qui se moque de la charité en fait, car, outre ce rappel historique, il n’est pas superflu de souligner que c’est Staline principalement qui a poussé à la roue lors de la conférence de Yalta en février 1945 (qui réunissait l’URSS, les USA et l’Angleterre, les grands vainqueurs de la guerre) pour mettre fin à la colonisation des Etats d’Asie et d’Afrique. Du reste, Moscou a beaucoup aidé nombre de ces pays dans leur guerre de décolonisation, soit directement, soit par l’intermédiaire de son allié cubain. Ceux qui traitent Moscou de « nouvel Etat impérialiste » sont donc victimes d’un narratif élaboré par ceux qui ne cessent de pleurer leur paradis perdu.
En tous les cas, Moscou est de nos jours un partenaire incontournable pour ceux qui ont une bonne lecture des enjeux stratégiques et économiques de l’heure
au moment où le siècle américain et généralement occidental est chahuté par des Etats en quête de souveraineté véritable et de développement endogène. Le Burkina Faso qui se situe dans le camp de ces altermondialistes a donc fait le bon choix et les résultats sont déjà palpables sur le terrain.
Pour en revenir à la crise russo-ukrainienne, elle perdure non pas en raison de la faiblesse de Moscou, mais plutôt de sa réticence à frapper la chair de sa chair. L’Ukraine, la Serbie et le Kosovo, faut-il le préciser, sont les « foyers incandescents » du panslavisme, qui rêve de regrouper tous les Etats slaves. Si la perestroïka de Mikael Gorbatchev a mis du plomb dans l’aile de ce rêve, on ne peut pas reprocher à Poutine de rallumer la flamme. Pour ce qu’il nous a été donné de voir vendredi dernier, il a les moyens de sa politique,
surtout que beaucoup d’Ukrainiens y sont favorables en raison d’une consanguinité avérée. A Moscou comme au Sahel, nous vivons le temps des révolutions.
Boubakar SY