Procès en appel de détournement de deniers publics: le Cour d’appel de Ouagadougou réexamine le dossier de l’affaire Tiegnan et autres

Au deuxième jour du procès, la Cour d’appel de Ouagadougou a continué à entendre les parties.

Le procès en appel de l’affaire de détournement de fonds public au ministère de l’Action humanitaire et de la Solidarité s’est poursuivi, avec les auditions des accusés, mardi 4 novembre 2025, à la Cour d’appel de Ouagadougou.

Le 24 décembre 2024, le Tribunal de grande instance Ouaga I a condamné Amidou Tiegnan et ses trois complices à une peine d’emprisonnement ferme allant de 6 à 15 ans. Non satisfaits de cette décision de justice, les accusés et les représentants de l’Etat ont interjeté appel. Le procès qui s’est ouvert, le 3 novembre 2025, avec les auditions des parties s’est poursuivi ce 4 novembre, à la Cour d’appel de Ouagadougou. Poursuivis pour usage de faux en écriture publique, complicité de détournement de deniers publics, enrichissement illicite et blanchissement de capitaux, les accusés se sont succédé à la barre pour se défendre. Salifou Ouédraogo a été le premier à se présenter devant la Cour.

Condamné pour avoir « fabriquer » des états financiers illicites pour couvrir des dépenses irrégulières, notamment les manutentions des vivres destinées aux personnes vulnérables, il a reconnu partiellement les faits, parce que, selon lui, 462 fiches d’émargement contenues dans ses dossiers sont des brouillons qui n’ont jamais été réutilisés. Le principal accusé, Amidou Tiegnan, a déclaré que tous les chèques irréguliers tirés au nom du CONASUR sont endossés par Salifou Ouédraogo.

« On a exploité les failles du ministère pour émettre, à plusieurs reprises, des chèques supplémentaires et se partager le montant encaissé », a-t-il affirmé. Quant à Pétronille Tarpaga, elle a aussi reconnu partiellement les faits qui lui sont reprochés. De ce qu’elle a dit, en 2024, Amidou Tiegnan a tiré deux chèques de 10 millions F CFA chacun en son nom, pour lui acheter un véhicule. « Je ne me suis jamais mêlée à une quelconque concertation avec mes collaborateurs dans le but de mener des activités irrégulières », s’est-elle défendue.

Son conseil a soulevé l’exception de prescription des chèques irréguliers de 5 millions F CFA et 8 millions F CFA, émis par sa cliente respectivement en 2018 et en 2019. « Le montant de chaque chèque n’atteignant pas 10 millions F CFA, l’infraction constitue un délit qui est frappé de la prescription triennale », a-t-il relaté. Au préalable, il a soulevé l’incompétence de la Cour d’appel à connaitre l’affaire de sa cliente, car les détournements de fonds publics sont des actes criminels relevant de la compétence de la Chambre criminelle.

Une possibilité d’alléger ou d’aggraver les peines

Lors de l’audience, le Procureur général de la Cour, Pinguedewindé Désiré Sawadogo, a déclaré que le Procureur du Faso a fait appel sur des aspects techniques qu’ils vont examiner et porter éventuellement devant la Cour. « L’agent judiciaire de l’Etat et les condamnés ont fait appel. Et la loi donne la possibilité à toute personne condamnée en première instance de faire réexaminer sa cause en seconde instance par la Cour d’appel. C’est un droit qu’ils ont exercé », a-t-il poursuivi.

A l’entendre, c’est un nouveau procès qui commence, car la Cour n’est pas tenue de s’aligner sur la décision de la première instance. « Elle a la possibilité de relaxer, de confirmer, d’infirmer la première décision, éventuellement en aggravant les peines ou en les ramenant à la baisse ».

L’agent judiciaire adjoint de l’Etat, Mahama Tako, représentant l’Etat dans ce procès, a fait savoir que dans cette procédure, l’Etat étant une victime, il est normal que ses intérêts soient soignés au mieux. « Dans la décision de première instance, le montant accordé à l’Etat n’est pas celui qu’il a réclamé. Nous avons interjeté appel pour lui permettre de rentrer dans ses fonds », a-t-il avancé.

Me Souleymane Bako, conseiller de Philippe Bayoulou, a précisé que son client, en plus des peines d’amendes individuelles et solidaires, a écopé d’une peine d’emprisonnement de 6 ans qu’il estime disproportionnelles, a-t-il dit à l’infraction commise. « Ce n’est pas que la justice n’a pas fait son travail, mais pour un dossier pareil, il est nécessaire de prendre suffisamment de temps pour tout élaguer. Mon client estime que le montant de son amende ne correspond pas à celui qu’il a irrégulièrement pris. Nous souhaitons que la Cour revienne sur son cas afin qu’il puisse bénéficier d’une réduction des peines », a-t-il espéré.

Adama SAWADOGO

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