Les actions coordonnées des forces combattantes dans les régions du Djôrô et des Tannounyan ont permis de réinstaller des populations de plusieurs dizaines villages et hameaux de culture et favoriser la réouverture et la consolidation du trafic routier sur la route national 11 (route Gaoua-Banfora). A ce jour, le constat fait état d’une vie retrouvée, avec le retour des services sociaux de base, et la présence de l’Etat via un dispositif type tout le long de la RN11.
Le Burkina Faso a traversé plusieurs étapes dans son processus de reconquête opérationnelle du territoire national. Depuis l’introduction de la guerre contre les terroristes, son développement, son intensification, la stabilisation et la consolidation des acquis, beaucoup d’eau a coulé sous le pont confirmant à ce jour les 72% de territoire reconquis dont le ministre de la Défense nationale a fait cas lors de la dernière évaluation des membres du gouvernement.
Sur les traces de la centaine de villages administratifs et hameaux de culture libérés dans les régions de Djôrô et des Tannounyan, une équipe de journalistes a pu toucher du doigt ce qu’il convient de reconnaitre comme une vraie bataille rangée pour l’honneur et la dignité. En effet, le premier village foulé est celui de Lou (un nom d’emprunt qui signifie la vallée forestière en Lobiri). Il avait été déguerpi à l’arrivée des groupes armés terroristes en 2020. Les populations dans leur fuite ont laissé derrière elles des terres cultivables, des biens matériels, du bétail entre autres.
L’administration publique, notamment les services déconcentrés (services agriculture, vétérinaires, centres de santé, écoles primaire et post-primaire) avaient été saccagés, dynamités et incendiés. Deux à trois ans après, la « civilisation » est de retour, la vie a repris ses droits, les champs présentent une physionomie reluisante, les us, coutumes, traditions sont réactivés.
Les marchés et les boutiques dans les quartiers ont tous réouvert. Balayant d’un revers de la main les sombres moments de son village, Laurent, un citoyen de Lou, préfère nous présenter son compte d’exploitation pour la campagne agricole en cours. « J’ai emblavé 12 hectares de maïs, 2ha de soja, 7ha de coton, 5ha de niébé entre autres. L’essentiel est que le village soit relogé et plus rien ne saurait perturber la quiétude des populations, tant nous sommes décidés », a-t-il poursuivi.
Plus loin, une autre localité à cheval entre les régions du Djôrô et de Tannounyan. Il s’agit de la commune rurale de Koun-Woh (nom d’emprunt qui signifie ruche en langue Lobiri). Ce département situé dans la province de la Comoé couvre une superficie estimée à plus de 2 800 km² et compte plus de 45 000 habitants, selon le dernier recensement général de la population. Koun-Woh avait vu sa trentaine de villages administratifs et hameaux de culture littérairement vidés.
Les terroristes y ont mis pieds depuis 2020, faisant main basse sur les champs et le bétail. Ils ont tué des populations innocentes et imposé un mode de vie confessionnelle, selon notre guide Grégoire (nom de grin). Ce dernier explique que des familles entières se sont disloquées et des villageois disparus à jamais. Son récit du martyre que les populations ont vécu au cours de ces années noires de l’insécurité laisse pantois.
« Mais plus rien ne sera comme avant », a-t-il conclu.
La Patrie, ou la mort !

« Cela est arrivé parce qu’il s’agissait d’un phénomène nouveau. Sinon, désormais, sur ces terres, nous ne pensons pas qu’un individu peut s’aventurer chez nous et faire ce que bon lui semble. Nous avons vu, nous avons compris et ça nous a ouvert les yeux. Le sacrifice consenti par les VDP et les forces combattantes afin que nous revenions sur nos terres ne peut être vain », confie-t-il le regard triste mais déterminé.
Grégoire, marié et père de 6 enfants, salue, la main sur le cœur, les plus hautes autorités qui, selon lui, ont vite fait de prendre le taureau par les cornes. Il est particulièrement reconnaissant du déploiement des combattants et de la stratégie de reconquête et de consolidation des zones en perte de contrôle dans la zone limitrophe de la région du Djôrô. « N’eut été cette intervention rapide, des villages entiers pourraient être rayés de la carte du Burkina Faso », a fait savoir celui-là qui s’est présenté comme un « Wayiyan » et un VDP.
Le chef du village de Koun-Woh partage la même analyse de la situation sécuritaire. Contraint de quitter le village pour une localité plus stable et
sécurisée à une vingtaine de kilomètres de sa circonscription administrative, le chef affirme avoir vécu ce qu’aucun chef ne peut souhaiter à son semblable. Sa juridiction traditionnelle a été déguerpie en pleine journée sous la baïonnette des forces du mal.
Situation sous contrôle

de Koun-Woh.
« Ils ont élu domicile dans certaines concessions, ont essayé de s’implanter en organisant l’occupation de nos terres. Et comme ils étaient plusieurs factions, ils coordonnaient leurs attaques et délimitaient soigneusement les zones dont ils ont besoin (…) », se rappelle-t-il. Aujourd’hui le chef de Koun-Woh, sur un ton guerrier, scande aux côtés de ses sujets la devise du Burkina « La Patrie, ou la mort, nous Vaincrons ! ».
La reconquête de la RN11 et de centaines de villages le long du tronçon a coûté du sang et de la sueur. Jusqu’à ce jour les VDP et FDS déployés dans la zone en détachement ou au sein d’unités mobiles tactiques ou encore au compte de groupes d’actions rapides de surveillance, ne ferment pas l’œil. Les patrouilles et autres « actions feu » se poursuivent puisque l’ennemi surfe sur la frontière avec des pays voisins et utilise les barrières naturelles terrestres pour espérer surprendre les hommes sur le terrain.
A ce jour, les expéditions punitives des « boys » dans le Djôrô ont été un franc succès, la situation est quasiment sous contrôle selon les officiers du théâtre des opération du Groupement de forces pour la sécurisation de l’Ouest (GFSO). Mais comme on aime à le dire dans la région du Djôrô, pour avoir été déjà mordu par un serpent, même le lombric peut apeurer. Les différents chefs d’unités ou de détachement qui assurent et coordonnent les actions sur le terrain ne sont pas allés du dos de la cuillère pour expliquer à quel point la bataille fut rude.
Sans s’attarder sur des victoires, ils indiquent que le vrai satisfecit c’est la réouverture de la RN11 avec un trafic dans les deux sens de jour comme de nuit. Aussi, le retour des populations dans leurs localités d’origine assurant paisiblement leurs activités quotidiennes sans se soucier justifient le sens de l’engagement des combattants. En un mot, la vie au village a repris son cours jadis, puisque les services sociaux de base (CSPS, écoles primaires et secondaires) sont fonctionnels, les préfectures, et mairies sont également en service en ce moment.
Wanlé Gérard COULIBALY