Repenser la lutte contre le SIDA

Les ONG intervenant dans le domaine humanitaire et les malades du VIH/SIDA ont les regards tournés vers la ville de Lyon, en France, qui accueille le 9 octobre 2019, la 6e conférence de reconstitution du Fonds mondial de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme. Cette rencontre, qui se tient pour la première fois en terre française, connaîtra la participation du président Emmanuel Macron et de plusieurs chefs d’Etat et de gouvernement qui viendront des quatre coins du monde et principalement d’Afrique. Organisée tous les trois ans, la conférence s’est fixé pour objectif de venir à bout des épidémies du SIDA, de la tuberculose et du paludisme à l’horizon 2030 à travers une mobilisation de ressources substantielles pour lutter contre leur expansion. Lesquelles épidémies font chaque année plus de 3 millions de morts dans le monde dont la majorité provient du continent noir. Autant dire que ce n’est pas une mince affaire, au regard du tarissement des sources traditionnelles de financement et de la rareté de nouveaux bailleurs de fonds. La question du financement de la lutte contre ces maladies, notamment le VIH-SIDA, est devenue depuis ces dernières années, un casse-tête chinois pour les organisations et ONG intervenant dans le domaine avec à leur tête l’ONUSIDA, l’organisme spécialisé des Nations unies. Les contraintes budgétaires auxquelles les humanitaires sont confrontés plombent les actions sur le terrain, alors que la prise en charge des malades doit se faire de façon continue et dans le strict respect des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Ces difficultés s’expliquent en partie par le fait, que plus de 70% des ressources du Fonds mondial pour la lutte contre le SIDA sont destinées aux pays africains, alors que l’ensemble des contributions du continent représentent moins de 1% de l’enveloppe globale du fonds. A la tête des bénéficiaires africains, on retrouve des Etats comme le Nigéria, la Tanzanie, la République démocratique du Congo (RDC), le Mozambique et le Zimbabwe. Il est vrai que d’année en année, le nombre de nouveaux malades souffrant du SIDA diminue, mais on constate un ralentissement des progrès ces derniers temps si l’on se réfère aux données de l’OMS. D’où l’importance de la conférence de Lyon, qui prévoit la mobilisation d’au moins 14 milliards de dollars auprès de partenaires publics et privés. Mais elle est loin d’être la panacée quel que soit le montant mobilisé. Pour pallier un tant soit peu le manque de financement de la prise en charge des malades du SIDA issus majoritairement de l’Afrique, il faut que les pays du continent trouvent des mécanismes à l’échelle nationale pour mobiliser les ressources à l’interne pour renflouer davantage les caisses. Il paraît aussi nécessaire de redéfinir les règles plus rigoureuses de gestion, afin que l’argent versé aux Etats pour la lutte contre l’épidémie ne soit détourné pour financement d’autres projets de développement au détriment des malades du SIDA. L’autre défi de la lutte contre le SIDA est le tabou qui continue d’entourer la question. Celui-ci fait que certaines personnes refusent le dépistage proposé par les ONG d’aide humanitaire, pourtant gratuit. Le qu’en dira-t-on si jamais le test révèle un statut séropositif amène certains citoyens à bouder les services des ONG et autres groupements de volontaires intervenant sur la question. Pire dans certains milieux, notamment dans les zones rurales, le SIDA est toujours perçu comme une maladie des villes. Ainsi, dans ces milieux où le lévirat est encore pratiqué, des familles entières sont parfois décimées sans que cela n’émeuve personne. Cette ignorance suicidaire pour les populations est la preuve que la lutte contre «le mal du siècle» sur le continent doit être repensée pour prendre en compte les réalités sur le terrain. Cela doit commencer par la dédramatisation du VIH !

Beyon Romain NEBIE
nbeyonromain@yahoo.fr

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