Le mercredi 21 juin dernier, le Conseil des ministres a annoncé des mesures pour le secteur agricole, notamment la filière coton. Ces décisions traduisent une volonté de l’Exécutif de repositionner le Burkina à la première place des pays africains producteurs de coton. Ces mesures gouvernementales sont incitatives et doivent galvaniser les producteurs.
Le prix du coton première qualité fixé à 325 F CFA et celui deuxième qualité à 300 F CFA, avec en sus une possibilité de subventions de 10 milliards F CFA pour permettre l’achat des intrants. Malgré le contexte sécuritaire difficile, le gouvernement, qui ne compte pas sur le tout militaire pour gagner la lutte contre le terrorisme, travaille à maintenir le pays sur le chemin du développement.
Cependant, au regard du défi, il revient à toute la chaine de production, principalement aux producteurs, de se mettre en branle, suivant évidemment les recommandations des techniciens agricoles, pour des rendements à la hauteur des ambitions du gouvernement. Si de par le passé, les aléas climatiques et la fluctuation des prix d’achat à l’international et certaines difficultés structurelles constituaient les principaux facteurs limitant la production agricole dans son ensemble, de nos jours, c’est la crise sécuritaire qui bouleverse bien de projets.
Le cynisme des terroristes consiste à vider les campagnes ou à acculer dans leur retranchement les populations, compromettant ainsi les prévisions d’une production en qualité et en quantité. Qu’à cela ne tienne. Il nous faut, avec la relance de la filière coton, imaginer des solutions palliatives pour reprendre notre première place car la production nationale de l’or blanc ne cesse de régresser depuis cette crise.
Et l’action du gouvernement est salvatrice pour un secteur qui occupe plus de 350 000 producteurs, avec une contribution de près de 20% au PIB. Les champs communautaires avec la contribution des Forces de défense et de sécurité (FDS) et des détenus pourraient s’inscrire dans cette alternative. Mais la relance doit aller au-delà de la production.
Nonobstant les initiatives de consommation locale du coton, la question de la transformation demeure. Allons-nous continuer à vendre à l’état brut plus de 80% de notre production ? Allons-nous laisser les vannes ouvertes pour la réception des produits textiles tous azimuts ? Ce sont des questions qui méritent réponse et surtout concertation avec toute la société.
Petit à petit, une perspective de gros consommateurs du coton burkinabè se dessine. Avec cette perspective de voir désormais les enseignants du supérieur porter des toges en Faso danfani, la famille judiciaire, celles de l’Education nationale, de l’armée, ou l’idée de rangers en Faso danfani fait tilt dans les esprits.
Un nouveau marché de consommation se crée ainsi, en plus de la mode et de l’ameublement, une plus-value qui viendra valoriser davantage le secteur et booster la production et la transformation. Nous avons les rênes de notre développement, il suffit d’accepter cette introspection, ce regard intérieur qui ne bannit pas l’autre mais qui nous permet de nous regarder sans faux-fuyant. C’est en ce moment que le consommateur doit jouer, lui également, sa partition sans que cela ne soit perçu comme du chauvinisme ; mais
un acte patriotique dans un contexte international où ceux qui nous dictent la libre concurrence avec un marché tout ouvert n’appliquent pas moins un protectionnisme béat. C’est donc possible ; le Burkina peut redevenir premier producteur africain de coton. Le temps où le Faso danfani, la fierté du Faso, était désigné par le terme « Feu de feu (FDF) » comme pour rejeter la mesure du port de ce vêtement est bien révolu.
Le Faso danfani qui, au quotidien, conquiert le monde, doit, d’abord de l’intérieur, s’imposer pour contribuer à soutenir une filière porteuse. Faire de cette étoffe notre quotidien et notre « fond de valise », et nous faire le devoir et le plaisir de nous l’imposer à toutes les instances, va au-delà de tout chauvinisme. La contribution à l’universel n’a jamais donc été vraie que lorsqu’on se retourne vers notre moi culturel. Ne dit-on pas que la culture est ce qui nous reste quand on a tout perdu ?
Assetou BADOH
badohassetou@yahoo.fr