Bassolma Bazié, fonctionnaire démissionnaire et SG de la CGT-B : « La lutte pour la dignité doit se poursuivre »

Le syndicaliste dit ne pas regretter son engagement pour la défense des travailleurs

A la suite de sa démission de la Fonction publique, le professeur certifié en Sciences de la vie et de la terre (SVT), Bassolma Bazié, par ailleurs secrétaire général de la Confédération générale de travail du Burkina (CGT-B), s’est confié par mail à Sidwaya, le lundi 25 janvier 2021. Sans détour !

Sidwaya (S) : On vous sait très combatif. Certains trouvent cependant, que vous avez cédé aux supposées pressions des autorités en démissionnant de la Fonction publique. Que leur répondez-vous ?

Bassolma Bazié (B.B.) : (Rires !) Lorsque vous représentez des hommes de valeur, vous avez l’impérieux devoir de faire en sorte que votre prix soit l’honneur. Par conséquent, un salaire ne doit en aucun cas être un moyen de chantage. D’où ma démission de la Fonction publique afin de mieux me consacrer à la défense ferme des intérêts des travailleurs (euses) et du peuple burkinabè ! La lutte pour la liberté, la dignité et l’intégrité doit se poursuivre avec davantage d’engagement, de détermination et d’esprit de sacrifice ! Mais par naïveté, surtout politique, un acteur pourrait « trouver » que j’ai certainement cédé aux multiples pressions des autorités, la liberté de trouver existe ; seulement que cela impose des exigences de gestion après ces trouvailles.

S : Votre affectation à la Direction régionale du Centre du ministère de l’Education nationale pour nécessité de service semble être la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Travailler dans un tel service pose-t-il problème ?

B.B. : D’abord, j’exprime tous mes respects à tous les travailleurs qui œuvrent inlassablement nuit et jour pour le progrès de notre cher pays, dans des conditions très difficiles et aussi malgré l’ingratitude administrative totale et humiliante, de certains acteurs dans la hiérarchie. Tous mes respects et salut militant à eux ! J’ai eu accès à la Fonction publique, conformément à ma conscience en prenant part au concours de recrutement des Professeurs de l’Enseignement secondaire général et technique dans le centre unique de Ouagadougou, avec le « récépissé N°332 du 17/11/2000 » délivré par « le Directeur des examens et concours scolaires et professionnels », Monsieur « Kako Loya » et dans lequel j’ai été « déclaré admis et premier sur la liste, Option Sciences Naturelles par communiqué (01-001) » de Monsieur « le ministre de la Fonction publique et du développement institutionnel, du 04 janvier 2001 ».

Ensuite, les différentes notations de ma hiérarchie révélant 9/10 dont 4/4 en conscience professionnelle, en respect du bien public, en ponctualité sont des preuves que j’exécute mes tâches professionnelles, en classe de façon satisfaisante. Enfin, sur l’interpellation des autorités à respecter les textes et Conventions ratifiées par notre pays et aussi leurs propres engagements, j’ai été traduit en « Conseil de discipline » un certain « mardi 16 septembre 2020 » ; Une notification scandaleuse a été produite, indiquant que j’ai « été reconnu coupable, mais aucune sanction n’a été retenue contre ma personne ». Le 2 octobre, j’ai été mis devant le fait accompli de la suspension arbitraire de mon emploi de temps en évoquant la cause de l’existence d’un « contentieux » et d’instructions reçues.

Le 3 novembre 2020, je reçois une note d’affectation à la Direction régionale. C’est encore une violation flagrante des Conventions internationales citées par les autorités elles-mêmes. Pour cacher cette forfaiture, on tente sournoisement de me signifier qu’au bureau, je serai plus libre, je pourrai m’absenter des mois sans qu’on ne me le demande, etc. Au nom de l’exemplarité et de la décence, je refuse tout favoritisme, source de la culture de la médiocrité dans l’administration publique.

S : Vous êtes SG de la CGT-B. Pourriez-vous continuer à défendre la cause des travailleurs après avoir quitté l’administration publique ?

B.B. : La Confédération générale de Travail du Burkina (CGT-B) est une centrale regroupant des travailleurs de tous les horizons professionnels (Public, Parapublic, Privé). C’est du reste dans le sens de mieux m’organiser pour cette défense au cours de mon mandat, que j’ai démissionné de la Fonction publique d’Etat.

S : De quoi allez-vous vivre maintenant ?

B.B. : (Rires !) Je continue de vivre de ce dont ma famille biologique m’a élevé et qui a été renforcé au sein de l’Union générale des étudiants burkinabè (UGEB) et présentement au sein de la CGT-B à savoir : l’honneur, l’intégrité, la droiture, la dignité, l’exemplarité, l’esprit de sacrifices, le patriotisme et la liberté. J’exhorte avec forte humilité, tous et toutes à m’aider pour que cette ration existentielle ne me manque point.

S : Le Bureau international du travail (BIT) est ampliataire de votre lettre de démission. Pourquoi ?

B.B. : La Haute-Volta, actuel Burkina Faso a adhéré en 1960 à l’Organisation internationale du travail (OIT) qui a été créée depuis 1919. Le BIT est son organe exécutif. Une délégation tripartite (Gouvernement-Syndicats-Patronat) se rend chaque année à Genève à son siège pour la Conférence internationale du Travail au cours de laquelle les Conventions, les Recommandations etc. sont votées. Tout pays qui ratifie une Convention est tenu de la respecter dans son esprit et à la lettre. Notre pays, le Burkina Faso, a ratifié plusieurs Conventions dont l’actuel Premier ministre Dabiré, à la tribune en 2019 a exprimé la fierté de notre pays qui en a ratifié des dizaines de Conventions et y a réitéré tout l’engagement des autorités à se plier à leur mise en œuvre.

Il se trouve que le cas présent est le non-respect de ces Conventions, dont certaines ont été citées par les autorités elles-mêmes dans la correspondance « N°2020-796/MFPS/CAB, du 12 novembre 2020 », portant « Objet : Demande de suggestions sur la mise en place des permanents syndicaux », adressée à l’Unité d’action syndicale (UAS) : « la Convention n°135 de 1971 concernant la protection des représentants des travailleurs dans l’entreprise et les facilités à leur accorder ; la Convention n°87 de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical ; la convention n°151 de 1978 sur les relations de travail dans la Fonction publique ; la recommandation n°198 de 2006 sur le droit de négociations entre les parties à une relation de travail ; et aussi le non-respect de l’article 121 de la loi n°081-2015/CNT du 24 novembre 2015 portant statut général de la Fonction publique d’Etat. Il est donc bien que le Conseil d’administration du BIT, les démocrates et patriotes sincères aient une idée de la largeur du fossé existant entre la théorisation de nos dirigeants et leurs actes.

S : Vous êtes en première ligne dans la défense des intérêts des travailleurs depuis des années. Regrettez-vous par moment cet engagement ?

B.B. : Pas du tout ! C’est un grand honneur que les travailleurs, des patriotes, des progressistes, des révolutionnaires aient placé leur confiance en ma modeste personne de parler et d’agir en leur nom. Je ne puis que renouveler ici toute ma reconnaissance à cet effet et mon engagement renouvelé d’honorer cette confiance durant mon mandat de secrétaire général.

Entretien réalisé par
Honoré KIRAKOYA

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