Décret de mobilisation générale et de mise en garde : « Désormais, chacun sait légalement ce qui l’attend », Da Sié de Bindouté, sociologue et journaliste

Le sociologue et journaliste, Da Sié de Bindouté : « chaque burkinabè doit prêcher partout le patriotisme et l’honnêteté ».

Sociologue et journaliste, le Burkinabè Da Sié de Bindouté, résidant aux Etats-Unis, donne sa lecture dans cette interview, le décret de mobilisation générale et la mise en garde, récemment pris par le gouvernement de la Transition. Tout en saluant le « combat panafricain » du capitaine Ibrahim Traoré, il appelle l’ensemble du peuple burkinabè à s’unir autour du président de la Transition dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

Sidwaya (S) : Depuis peu, les Burkinabè constatent un changement dans la lutte contre le terrorisme. Comment appréciez-vous l’engagement des nouvelles autorités dans la lutte contre le terrorisme ?

Da Sié de Bindouté (D.S.B.) : Moi j’ai foi en mon pays, le Burkina Faso. Mais, personne n’avait vu venir un certain capitaine Ibrahim Traoré. Personne ! On l’a connu à la suite de sa déclaration sur RFI. Je pense que c’est cette déclaration qui a dévoilé son patriotisme. Voilà comment le peuple l’a adopté immédiatement.

Vu toutes les mesures prises par le Président Traoré, je pense que toutes répondent aux aspirations du peuple burkinabè. Moi, en tant que panafricaniste, disciple de Cheikh Anta Diop et de Joseph Ki-Zerbo, j’apprécie et je salue l’engagement des autorités burkinabè. Pour celui qui connait l’histoire de l’Afrique le Président Ibrahim Traoré s’inscrit dans le combat panafricain.

De ce point de vue, j’appelle le peuple burkinabè à veiller personnellement sur la sécurité du Président de la Transition, le capitaine Traoré. Il faut agir comme les asiatiques. Il faut copier l’exemple vénézuélien. Dans ce contexte précis, le peuple burkinabè doit venger le Président Thomas Sankara en veillant, sans crainte, à la sécurité du Président Traoré. L’Afrique doit tirer des leçons de son histoire.

S : Face à la situation sécuritaire, le gouvernement a adopté en Conseil des ministres, un décret portant mobilisation générale et la mise en garde. Que renferme cette notion « mobilisation générale et la mise en garde » ?

D.S.B. : Du point de vue historico-militaire, le concept de « mobilisation générale » a été utilisé pour la première fois pour qualifier les préparatifs de l’armée Prusse (Allemagne) entre 1850 et 1860. Elle consiste à assembler des troupes et du matériel pour préparer une guerre. La mobilisation a contribué à la puissance de l’armée Prusse et partant de l’armée allemande. Cette stratégie a inspiré plusieurs pays d’Europe pendant les différentes guerres. La France particulièrement, en s’inspirant de l’ouvrage La force Noire (1910) du lieutenant-colonel Charles Mangin va jusqu’à mobiliser ses colonies pour toutes ses guerres impérialistes.

Ceci dit, sans répéter le décret, je dirai que la mobilisation générale et la mise en garde sont cette étape ou tout le peuple burkinabè doit savoir qu’il doit se tenir prêt à défendre le pays à tout moment. Aussi, c’est le moment de savoir qu’on peut prêter ses biens à l’Etat ou à l’armée pour la défense de la patrie. Bref, c’est l’appel du chef de l’Etat qui somme tout burkinabè que désormais la guerre n’est plus l’affaire de la seule entité armée mais une affaire de tous. Par ailleurs, chaque Burkinabè doit mettre ses compétences intellectuelles au service de l’armée.

S : Comment appréciez-vous cette décision du gouvernement ?

D.S.B. : Cette décision du gouvernement est salutaire. Elle est l’expression du courage et du sens du patriotisme du Président de la Transition, le capitaine Ibrahim Traoré. Je dois dire que cette décision montre que le chef de l’Etat burkinabè voit grand. Car, il s’inscrit dans la légalité constitutionnelle pour mobiliser son peuple afin de vaincre cette guerre qui nous a été imposée pour des raisons purement néo-colonialistes.

Vous voyez bien que le terrorisme est partout en Afrique. De ce point de vue, la lutte contre le terrorisme ressemble à cette époque des guerres de libération nationale ou indépendantistes. Les pays occidentaux refusent d’aider les pays africains mais ceux-là qui cherchent à se défendre seuls comme le Burkina et le Mali sont soumis aux pressions sous couvert des droits humains, des libertés et du calendrier électoral. Au total, cette décision est la suite logique des décisions souveraines prises par le gouvernement depuis l’arrivée du capitaine Traoré à la présidence du Faso. On peut citer, entre autres, le refus des troupes françaises et des coopérants militaires français, la suspension de RFI et de France 24 sur l’étendue du territoire burkinabè.

S : Quel sera l’apport de ce décret dans la lutte contre le terrorisme ?

D.S.B. : Ce décret vient mobiliser le peuple burkinabè pour soutenir son armée qui est engagée sans peur dans la lutte contre le terrorisme depuis la première attaque terroriste à Ouagadougou. Ce décret est aussi un canal par lequel le Burkina Faso, une fois de plus, affirme sa souveraineté en matière de défense comme nos ancêtres l’ont toujours été. En effet, le tout premier apport de ce décret est moral. Car ,nous affirmons aux yeux du monde que nous allons vaincre le terrorisme de façon endogène.

En matière de ressources humaines, ce décret va engendrer un autre engouement dans l’enrôlement pour le front. Sur le plan financier et matériel, je dois dire que vue la transparence prônée par le Président de la Transition, le capitaine Ibrahim Traoré, c’est une source de confiance de plus pour que, malgré les difficultés, les burkinabè puissent contribuer à l’effort de guerre.

S : Que doit faire chaque Burkinabè pour que le terrorisme soit vaincu ?

D.S.B. : Je pense qu’il faut d’abord dire à nos frères dits terroristes qu’il n’y a aucune bravoure quand on combat ses propres frères, on endeuille sa propre terre. Il faut que nos frères dits terroristes comprennent que les occidentaux les utilisent contre leurs propres frères pour pouvoir s’approprier les ressources minières de leur pays. L’Afrique a trop souffert à cause des guerres que l’Orient et l’Occident lui ont imposées.

Nous devons comprendre cela afin d’éviter d’être les moutons des autres. Ceci dit, je pense que chaque Burkinabè doit cultiver la sincérité. Chacun à son niveau doit faire son travail honnêtement. Pour moi, chaque Burkinabè doit savoir que le terrorisme a engendré de nombreuses conséquences. Par conséquent, chacun doit savoir contrôler son langage, chacun doit se demander toujours si ce qu’il fait ou dit construit ou détruit le pays.

Je lance un appel à tous les inventeurs ou toute personne qui possède des connaissances capables de sauver le pays, de les mettre au service de l’armée. De son coté, c’est le moment pour l’Etat de savoir valoriser les savoirs endogènes. Bref, chaque Burkinabè doit prêcher partout le patriotisme et l’honnêteté.

S : Certaines voix s’élèvent pour dénoncer l’instauration de ce qu’elles appellent dictature déguisée à travers ce décret. Est-ce que vous êtes de cet avis ?

D.S.B. : Vous savez, la vie politique en Afrique a toujours été perturbée par les endo-colons ou la 5e colonne. C’est ce que Zedess (artiste burkinabè, ndlr) appelle « les colons noirs ». Hier, c’étaient les colons blancs, aujourd’hui, ce sont les colons noirs. On les voyait en Centrafrique mais le Président Touadera a tenu bon. Toute la CEDEAO s’était mobilisée contre le Président malien le colonel Assimi Goïta mais le peuple malien a agi en digne héritier de Soundjata Keita.

Au Burkina Faso, tous ceux qui parlent de dictature déguisée ont oublié que ce sont eux-mêmes qui ont poussé le gouvernement à prendre cette mesure. Sinon, le président croyait en la bonne fois de chaque Burkinabè pour un sursaut patriotique. Je crois que ce décret a surpris les colons noirs car, apparemment, ils ne savaient pas qu’en temps de guerre l’Etat peut restreindre les libertés. Désormais, chacun sait légalement ce qui l’attend. Moi je ne partage pas cet avis. Pour moi, le Président de la Transition a mis en application le Ditanyè. Il a refusé d’être un traitre contre sa patrie.

S : Quelles sont vos attentes vis-vis de la mobilisation générale et la mise en garde ?

D.S.B. : Avant de répondre à cette question permettez-moi de saluer le patriotisme de notre armée. Je remercie toute l’armée pour le fait qu’elle a mis les intérêts supérieurs du Burkina Faso en avant en se mobilisant courageusement autour du Président le capitaine Traoré pour ouvrir actuellement des fronts bien tenus. Je félicite l’armée pour le refus des forces étrangères dans notre pays.

Certains avaient soutenu que notre armée est divisée et mal organisée, donc impossible pour elle de gagner cette guerre. Actuellement, la peur a changé de camp. Ceci dit, ce que j’attends de la mobilisation générale et la mise en garde c’est de voir une Renaissance du Burkina Faso. Pour ce faire, le président du Faso doit continuer à voir grand. De ce fait, je propose ceci dans ce contexte de mobilisation générale et de la mise en garde : Le Burkina Faso doit retirer tous ses militaires des missions de maintien de la paix en commençant par ceux qui sont au Mali dans le cadre de la MINUSMA.

Nous devons du point de vue diplomatique aider le Mali à se passer de la MINUSMA. Le Burkina Faso et le Mali ont le devoir de mettre en place un Etat-major fédéral pour contrôler la frontière commune. Le président de la Transition doit examiner le cas des militaires, policiers et gendarmes radiés. A mon avis, il doit être le bon père de famille du Faso comme le Président le général Lamizana.

Cela facilitera les futurs débats sur la réconciliation nationale. En même temps, il faut renforcer l’éducation civique au sein de l’armée pour éviter de voir dans l’après-guerre, des militaires s’en prendre à des civils à la suite de disputes. L’Etat doit équiper le génie militaire afin de faciliter les travaux de réinstallation des déplacés internes. Du point de vue scientifique, le président du Faso doit réhabiliter le colonel Auguste Denise Barry et travailler à ce que l’Etat s’approprie son centre d’Etude stratégique pour une nouvelle philosophie militaire endogène. Aussi, ce centre pourrait aider dans les réflexions sur l’après-guerre.

Interview réalisée en ligne par la rédaction

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