Robert Zongo, frère cadet de Norbert Zongo

Le 13 décembre prochain, cela fera exactement 22 ans que le journaliste Norbert Zongo a été assassiné sur la route de Sapouy. A quelques jours de la commémoration de ce triste anniversaire, son frère cadet, Robert Zongo, sérigraphe à Koudougou, revient sur les péripéties du dossier, le refus de l’indemnisation et le transfert du principal accusé, François Compaoré au Burkina Faso.

Sidwaya (S) : Le dimanche 13 décembre 2020, cela fera 22 ans jour pour jour que votre grand frère a été assassiné sur la route de Sapouy, avec ses compagnons dans un véhicule. Jusqu’à présent, les circonstances de sa mort restent encore troubles. Quel sentiment vous anime ?

Robert Zongo (R.Z.) : Je me souviens de ce crime comme si c’était hier, tant la douleur et l’émotion restent vives face à l’horreur de cet assassinat. Avec la ténacité du peuple burkinabè, cela prendra le temps qu’il faut, mais la lumière sera faite sur la mort de Norbert. La justice tergiverse et le principal accusé, François Compaoré passe de recours en recours, payant des avocats à des sommes faramineuses, pour ne pas être extradé dans son pays. Quand il aura épuisé tous les recours devant les juridictions du monde, il rentrera au Burkina Faso pour faire face à la justice parce que le procès aura lieu. C’est inévitable !

S : Comment appréciez-vous l’avancée du dossier au niveau de la justice burkinabè ?

R. Z. : Sous le régime Compaoré, le dossier avait été classé. Il a fallu attendre que l’insurrection populaire de fin octobre 2014 arrive pour que le dossier revienne sur la table des juges. Malgré toutes les péripéties, il faut se réjouir de ce tournant. Cela permet aux gens de savoir que le dossier Norbert est imprescriptible.

S : Il avait été question d’indemnisation, mais votre famille et particulièrement votre défunte mère s’y était opposée. Est-ce qu’on peut revenir sur les raisons qui avaient amené la famille à refuser le versement de la somme d’argent ?

R. Z. : Aujourd’hui on a tendance à mettre l’argent au-dessus de tout, alors que l’argent ne peut pas tout faire dans la vie. Il s’agit, dans ce cas précis, d’une blessure de cœur qu’il faut soigner. Est-ce qu’on peut apaiser un cœur meurtri par la mort d’un proche avec de l’argent ? Notre famille n’est pas nantie, mais nous ne crevons pas de faim non plus. La question aurait pu être réglée depuis longtemps si l’accusé acceptait faire son mea culpa devant les Burkinabè. La famille Zongo veut savoir ce qui est arrivé à Norbert et pour quelles raisons. C’est tout ! La démarche a péché car on a privilégié l’argent. Norbert est le premier fils de son père et à ce titre, il a droit à des funérailles ou à une messe mais, pour le moment, rien ne peut se faire. Pour cela, la défunte maman était pressée d’aller rejoindre son fils.

S : Une certaine opinion veut que ce dossier soit laissé par perte et profit au nom d’une réconciliation qui prône l’abandon des poursuites judiciaires à l’encontre de Burkinabè quels que soient les crimes commis. Que leur répondrez-vous ?

R. Z. : Ceux qui proposent ces schémas de raccourcis pour le retour de la paix n’ont certainement pas subi la douleur de la perte d’un être cher. Sinon, quelqu’un qui a été sur le lieu de l’assassinat et qui a vu l’état des corps de Norbert et de ses compagnons, s’il est habité par un brin d’humanisme, il ne va pas oser dire de faire table rase sur de tels crimes crapuleux. Comment apaiser les cœurs sans connaitre la vérité des faits ? Tout schéma de réconciliation qui écarte la justice de son processus va se solder par un échec. Nous sommes tous Burkinabè, nous voulons connaître la vérité pour permettre à la famille de faire le deuil de Norbert afin que son âme repose en paix et tourner définitivement cette page triste. Les juges également ne demandent qu’à entendre François Compaoré, mais en refusant de venir s’expliquer, il se culpabilise lui-même.

S : Les autorités françaises ont donné leur accord pour le transfert de François Compaoré, principal suspect dans l’assassinat en signant le décret mais les avocats de l’accusé ont fait recours devant le Conseil d’Etat. Est-ce que vous croyez en la sincérité des autorités françaises et de leur justice ?

R. Z. : On peut se payer le luxe de prendre les avocats de renom pour tenter de se tirer d’affaire. C’est le cas du frère cadet de l’ancien président Blaise Compaoré. Mais qu’il se ravise, les avocats qu’il paie à des sommes faramineuses ne pourront pas l’empêcher de comparaître devant le tribunal et éclairer la famille Zongo et l’ensemble des Burkinabè sur les circonstances de la mort de Norbert. Les avocats ne pourront rien faire pour le sauver de ce qui l’attend au Burkina Faso et il est temps que François Compaoré le sache !

Entretien réalisé par
Beyon Romain NEBIE

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