Brésil : les défis de Lula

Ils ont eu tort, ces analystes qui avaient prédit la mort politique de Luiz Inácio Lula da Silva. L’ancien président brésilien signe son grand retour à la tête de l’Etat à l’issue du second tour de la présidentielle du 30 octobre 2022. En effet, de façon in extremis, le candidat de gauche a assuré la « remontada » en tenant en respect avec 50,9 % des voix son adversaire d’extrême droite, Jair Bolsonaro.

Celui qui a passé en 2018 plus d’un an et demi en prison et affronté un cancer revient de loin. Même si son adversaire n’a pas encore reconnu sa défaite, l’icône de la gauche latino-américaine de 77 ans s’apprête pour la gestion du pouvoir d’Etat.

A sa libération en 2019, le chef de file du Parti des travailleurs (PT) et président du Brésil de 2003 à 2011 assurait vouloir « sauver » le Brésil du « projet de haine » de Jair Bolsonaro. Au premier tour, il a largement attaqué son opposant sur sa gestion de la crise sanitaire, l’économie du pays en berne et la déforestation de l’Amazonie.

Les discours de campagnes clos, l’heure est désormais au travail en vue de relever les défis du moment. M. Lula avait été reconnu coupable d’avoir accepté environ 1 million d’euros, dont un luxueux appartement situé dans une station balnéaire près de Sao Paulo de la part de l’entreprise OAS.

Il aurait touché ces pots-de-vin en remerciement de son intervention pour l’attribution de contrats avec la compagnie pétrolière publique Petrobras. Cependant, en 2021, le Tribunal suprême fédéral a reconnu la partialité du juge Sergio Moro, qui l’avait fait condamner, et annulé ces deux condamnations pour vice de forme.

Une décision qui réconforte l’ancien président brésilien qui a toujours dénoncé un complot visant à l’empêcher de briguer un troisième mandat, huit ans après avoir quitté le pouvoir. La nouvelle administration qui va s’installer bientôt ne doit pas à son tour tomber dans les mêmes travers. Elle doit à tout prix s’interdire de se livrer à une chasse aux sorcières au risque de donner les mêmes armes à leurs adversaires pour la reconquête du pouvoir. Surtout que ces élections ont montré que les deux candidats étaient au coude à coude.

Le 2 octobre, en plus du premier tour de l’élection présidentielle, les Brésiliens ont renouvelé la totalité des membres de la Chambre des députés et un tiers des sièges de sénateurs. A la Chambre des députés, le Parti libéral de Jair Bolsonaro a remporté la victoire, conservant la première place avec 99 sièges conquis. Au Sénat, il a obtenu quatorze sièges, contre huit pour le Parti des travailleurs de Lula.

Toute chose qui indique que le camp Lula ne doit en aucun cas dormir sur ses lauriers car il aura en face une opposition très forte. L’autre défi est d’arriver à reconquérir les cœurs des Brésiliens. L’ancien ouvrier métallurgiste, Lula, avait atteint des niveaux de popularité record quand il avait quitté le pouvoir en 2010, notamment grâce à d’ambitieux programmes sociaux qui ont permis à des millions de Brésiliens de sortir de la misère.

Pourra-t-il rééditer l’exploit comme cela a été le cas pour son élection ? Le nouveau président est surtout attendu sur ce chantier de la relance économique et le projet de reforestation de l’Amazonie, ses deux principales promesses de campagne.

Abdoulaye BALBONE

Laisser un commentaire