Crise sécuritaire et humanitaire au Centre-Nord : de nombreuses réalisations au profit des PDI

Depuis 2017, la région du Centre-Nord est en proie à des attaques terroristes, avec à la clé un déplacement massif des populations vers les zones jugées « sécurisées ». Le gouvernement burkinabè et ses partenaires tentent tant bien que mal de juguler cette crise sécuritaire et humanitaire à travers de nombreuses réalisations.

Le Centre-Nord est la région la plus touchée par la crise humanitaire que connait le Burkina Faso. A la date du 30 avril 2022, selon les données du Secrétariat permanent du Conseil national de secours d’urgence et de réhabilitation (SP/CONASUR), la région enregistrait 657 041 Personnes déplacées internes (PDI), soit 34,54% du taux national (1 902 150), dont 412 201 enfants (62,74%) et 150 208 femmes (22,86%). Pour une prise en charge holistique de ces PDI, le gouvernement burkinabè, à travers le SP/CONASUR et ses Partenaires techniques et financiers (PTF), entreprend quotidiennement des actions humanitaires. En termes d’abris, 73 sites d’accueil ont été aménagés dans toute la région, où sont érigées des milliers de tentes de fortune. La direction régionale en charge de l’action humanitaire du Centre-Nord a réussi à intégrer certaines PDI dans des familles d’accueil.

« Tous ces sites d’accueil ont été identifiés en lien avec sept clusters : abris, wash, santé/nutrition, éducation, sécurité et sécurité alimentaire dans le but de contribuer à renforcer l’assistance dans les urgences et à clarifier la division des tâches », souligne le Directeur régional (DR) du Genre et de la Famille du Centre-Nord, Yacouba Ouédraogo. Des infrastruc-tures connexes comme les latrines et les forages ont été réalisées et/ou réhabilitées sur des sites d’accueil. La multiplication des forages à Kaya a permis de réduire la pénurie d’eau au cours des deux dernières années dans cette ville. Sur le plan sanitaire, en plus de la lutte contre la malnutrition chez les enfants déplacés internes de moins de cinq ans dans les centres de santé comme celui du secteur n°6 de Kaya, aux dires de Yacouba Ouédraogo, de janvier à décembre 2021, 2 349 PDI victimes de violences de nature morale et psychologique ont bénéficié d’une prise en charge psychosociale. Des infrastructures sanitaires ont été également réalisées. Le Premier ministre, Albert Ouédraogo, a inauguré, le 13 août dernier à Kaya, trois dispensaires réalisés dans les villes de Kaya (Sanmatenga), Kongoussi (Bam) et Dori (Séno) et une maternité réalisée à Tougouri (Namentenga).

Huit blocs de latrines écologiques ont été construits dans chacune des villes sus-citées en complément de ces infrastructures. Dans le domaine de l’éducation, trois bâtiments de deux salles de classe extensibles, entre autres, entièrement équipées ont été réalisés à Kaya, Kongoussi, Dori et Tougouri. Selon le ministre en charge de l’habitat, Boukary Savadogo, ces infrastructures sont estimées à 219 667 405 F CFA. Pour accueillir les PDI nouvellement venues des villages environnants de Kaya (46 808), un autre projet d’aménagement de 600 abris d’urgence de type sahélien sur un domaine de quatre hectares dans la ville de Kaya a vu le jour. Le dernier acte majeur du gouvernement en faveur des PDI et leurs hôtes est le lancement, le samedi 13 août 2022 à Kaya, de la construction de 312 unités de logement, dont 100 à Kaya, 100 à Tougouri, 57 à Kongoussi et 55 à Dori.

Des efforts salués

Selon Boukary Savadogo, ces cités communales, qui verront le jour dans les prochains mois, seront équipées Òde systèmes complets d’Adduction d’eau potable simplifiée (AEPS). Financées par l’Union européenne (UE) et mises en œuvre par le Programme des Nations unies pour les Etablissements humains (ONU-HABITAT), ces réalisations s’inscrivent dans le cadre du projet de « Renforcement de la résilience des collectivités territoriales du Burkina Faso face aux déplacements massifs de populations et à la pandémie du COVID-19 ». Autant d’efforts salués par des citoyens de Kaya même s’ils auraient préféré autre chose en lieu et place de l’initiative de construction des cités des PDI. «La priorité des priorités est le retour des PDI dans leurs villages d’origine, où elles ne manquaient pas d’abris ou de nourriture», estime le président de l’Appel de Kaya, Boukaré Ouédraogo, par ailleurs membre de la coordination régionale des Organisations de la société civile (OSC) du Centre-Nord. Cependant, il reconnait que cette initiative permettra d’une manière ou d’une autre de désengorger certains sites d’accueil des PDI et constituer plus tard des poches de recettes pour des collectivités territoriales bénéficiaires. Pour Abdoulaye Ouédraogo, professeur certifié des lycées et collèges d’histoire et géographie en service à la direction régionale des Enseignements post-primaire et secondaire du Centre-Nord, ces logements à construire ne sont qu’une goutte d’eau dans la mer au vu du nombre élevé des PDI. «100 logements à Kaya pour plus de 140 mille PDI. C’est juste symbolique », souligne-t-il. A l’entendre, la solution au logement des PDI est conditionnée par leur retour dans leurs villages d’origine.

« Il va falloir trouver une solution au problème sécuritaire afin de replacer les PDI dans leurs localités d’origine pour leur permettre une décente intégration socioéconomique», souligne-t-il. La recrudescence des attaques terroristes dans la localité, combinée au dynamitage des ouvrages de franchement provoque des déplacements continus des populations. « Ce qui sape davantage les efforts consentis par le gouvernement dans la prise en charge des PDI », laisse entendre Abdoulaye Ouédraogo. Le pont de Naré, situé dans la forêt de Ouanobia, sur l’axe Pissila-Tougouri, a été dynamité à trois reprises par des groupes armés. De ce fait, nos interlocuteurs exhortent le pouvoir en place à mener une opération militaire pour débusquer ces groupes armés dans la forêt de Ouanobia, afin de libérer la route nationale 3. Ils ont aussi proposé, entre autres, la diversification des partenariats dans la lutte contre le terrorisme et la réduction du train de vie de l’Etat.

Emil Abdoul Razak SEGDA

Segda9emil@gmail.com

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