Ethiopie-Erythrée : rien n’est encore perdu !

Cela fait un an, que les frères ennemis de la corne de l’Afrique l’Erythrée et l’Ethiopie ont enterré la hache de guerre. Ils ont ficelé un accord de paix, le 9 juin 2019, pour tourner définitivement la page noire qui a entaché l’histoire politique de ces deux pays. L’on se souvient de ces deux décennies d’hostilité, marquées par une guerre sanglante (1998-2000), qui a eu pour conséquence des milliers de morts de part et d’autre. Pour les populations et les dirigeants des deux pays, cette nouvelle ère suscite donc de l’espoir. En Ethiopie, l’apaisement se faisait sentir déjà. C’était avec enthousiasme que le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, avait fait campagne, l’an dernier, au sujet de la restauration de la paix. De nombreuses actions, sur le plan intérieur, ont été posées dans ce sens. Le pays d’Hailé Sélassié a procédé à la libération des détenus politiques. Des appels au dialogue et au renoncement de l’usage des armes ont été également lancés. Le nouveau bol d’air s’est aussi manifesté par des rencontres bilatérales en grande pompe, la réouverture des ambassades et de plusieurs postes-frontières et le rétablissement du pont aérien entre Asmara et Addis-Abeba. Un an après la signature des accords, force est de constater, que de nombreux chantiers restent en suspens. La délimitation de la frontière entre les deux Etats n’est toujours pas conforme au tracé déterminé en 2002 par la Cour d’arbitrage internationale de la Haye – tracé selon lequel la région contestée de Badmé revient à l’Erythrée. Quant à l’accès de l’Ethiopie aux ports érythréens, ce n’est qu’un projet pour l’instant. Le fait que le président érythréen, Isaias Afwerki, s’est engagé dans un processus, dont il est l’unique acteur, est mal perçu par certains experts. Surtout que son voisin a emprunté, dans la même dynamique, les canaux constitutionnels après avoir obtenu l’aval du Parlement. Les spécialistes craignent, que les décisions qui découleront de la démarche en solo d’Afwerki n’engagent le peuple érythréen. Au niveau politique, un élément peut aussi expliquer que la paix soit aujourd’hui en souffrance. Il s’agit des profondes divergences de vues en Éthiopie et la précipitation des événements dans ce pays. Les visites de part et d’autre des dirigeants des deux pays ont cessé depuis quelques temps. Pendant ce temps, le conseiller et bras droit du chef de l’État érythréen, Yemane Gebreab, a affirmé que le Premier ministre éthiopien n’avait pas la situation en main. Cette déclaration est perçue comme une véritable flèche décochée, côté érythréen sur le processus de paix. Les nuages semblent encore sombres, concernant la réconciliation entre les deux pays, mais l’espoir est encore permis. Rien n’est encore perdu ! En matière de réconciliation, il y a des hauts et des bas. Une autocritique au niveau des deux parties peut faire avancer le processus, pourvu que de vraies concessions soient faites. Il reste à souhaiter un apaisement des cœurs, afin que l’accord ne vole pas en éclats.

Abdoulaye BALBONE

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